Vue normale

Il y a de nouveaux articles disponibles, cliquez pour rafraîchir la page.
À partir d’avant-hierFlux principal

Le Sénat vote la suppression de « l'attestation individuelle » pour les logiciels de caisse

Par : egonnu
29 novembre 2024 à 03:54

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, les sénateurs et sénatrices ont adopté les amendements visant à supprimer la possibilité pour les « éditeurs » de logiciels de caisse d'attester eux-mêmes de la conformité des fonctionnalités d'encaissement. Prochaine étape, la commission mixte paritaire.

Tard dans la soirée du mercredi 27 novembre, les sénateurs et sénatrices ont finalement adopté des amendements dont l'effet sera d'imposer la lourde procédure de la certification aux entreprises d'édition et d'intégration de logiciels de caisse. Comme nous avons déjà eu l'occasion de le rappeler1, cela impacterait particulièrement les logiciels de caisse sous licences libres qui s'appuient sur le dispositif de l'« attestation individuelle », bien mieux adapté aux réalités des pratiques ayant trait aux développements logiciels.

Deux informations intéressantes sont à retenir des débats qui ont eu lieu au Sénat2:

  • Dans la défense de son amendement, le groupe CRCE-Kanaky a évoqué le sujet des logiciels libres de caisse, contre lesquels il ne s'agit pas de « jeter l'opprobre ». Ce qui ne règle pas le problème… mais a le mérite d'inscrire le sujet dans les débats.
  • Le plus important sans doute : le gouvernement a émis un avis défavorable contre ces amendements. Ce qui signifie qu'il appelait à voter contre. Le ministre a interrogé les chiffres de la fraude mis en avant, évoqué la lourdeur du processus pour les petites entreprises et rappelé que la certification n'était pas une garantie contre la fraude. Il a enfin souligné qu'il s'agissait « d'un des chantiers les plus pertinents à creuser » et qu'il souhaitait y travailler avec les parlementaires et les « parties prenantes ». Dont acte.

La prochaine étape sera la commission mixte paritaire, dont le rôle sera d'essayer d'aboutir à un texte de compromis entre les positions du Sénat et de l'Assemblée nationale. Du fait du rejet du projet de loi par l'Assemblée, le texte ne sera pas « conforme » sur le sujet des logiciels de caisse, et demeure ainsi ouvert à évolution. Il reste donc utile de se mobiliser pour faire entendre notre voix, d'autant plus que le gouvernement a émis un avis défavorable.

Nous proposons aux entreprises éditrices et/ou intégratrices de logiciels libres de caisse, à celles qui les utilisent, et à toute autre organisation qui le souhaite, de joindre leur voix à la nôtre en signant cette « lettre ouverte ».

Sénateurs, sénatrices, ne sacrifiez pas les logiciels libres de caisse

Par : egonnu
27 novembre 2024 à 04:15

Après le rejet du projet de loi de finances 2025 par l'Assemblée nationale, le texte arrive au Sénat. De nouveaux amendements proposent la suppression de la faculté pour les « éditeurs » de logiciels de caisse d'attester de la conformité de leur solution, ce qui imposerait la seule certification. Une menace de portée existentielle pour les logiciels de caisse sous licence libre.

Nous proposons aux entreprises éditrices et/ou intégratrices de logiciels libres de caisse, à celles qui les utilisent, et à toute autre organisation qui le souhaite, de joindre leur voix à la nôtre en signant cette « lettre ouverte ».

Signer la lettre ouverte

Sénateurs, sénatrices, ne sacrifiez pas les logiciels libres de caisse

Le modèle de l'« attestation individuelle » n'est pas un gadget de la loi. C'est le reflet des réalités des pratiques ayant trait aux développements logiciels, notamment en termes d'innovation, de réactivité et d'adaptabilité aux besoins spécifiques des utilisateurs et des utilisatrices. C'est un mécanisme qui répond aux besoins du marché informatique, afin de permettre des sorties régulières de versions dites « majeures ».

Une vaste majorité des entreprises du logiciel (libre) s'appuient sur ce mécanisme. Elles le font de manière rigoureuse, avec sérieux. Pour cause, elles engagent leur responsabilité, leur trésorerie, leur réputation.

Ces mêmes entreprises ne pourraient pas, ou alors très difficilement, absorber la pression financière et réglementaire créée par ces amendements qui leur imposeraient de passer à un modèle fondé sur la certification. Certains modèles de développement et d'intégration de logiciels libres de caisse pourraient même, par leur nature, être impossibles à concilier avec les exigences des organismes de certification. Critères qui ne sont par ailleurs pas publics, ce qui rend l’adaptation au modèle de la certification d'autant plus difficile.

Redisons-le : le modèle de l'« attestation individuelle » n'est pas synonyme de fraude.

Si certaines entreprises délictueuses utilisent ce mécanisme pour proposer de manière frauduleuse des systèmes de caisse non conformes, en délivrant un faux document d'attestation, cela doit-il invalider complètement un mécanisme dont dépendent des écosystèmes entiers de logiciels libres pour prospérer ?

Le problème n'est-il pas « juste » celui des moyens consacrés aux contrôles ?

L'administration fiscale n'aurait-elle pas plus à gagner à travailler de concert avec les communautés des logiciels libres proposant des fonctionnalités d'encaissement ?

L'auditabilité du code par des tiers est au cœur des modèles de développement des logiciels libres. Les logiciels libres sont des projets collectifs. L'ensemble de leurs contributeurs et contributrices, en particulier celles qui ont développé un modèle économique autour du logiciel, partagent un même intérêt : la pérennité du projet, notamment en termes de cybersécurité. Dans le même sens, cet intérêt partagé, commun, dans un projet ouvert, est une garantie très forte contre toute aventure individuelle visant à introduire des failles de sécurité ou des fonctionnalités frauduleuses.

C'est cette confiance mutuelle dans un projet commun qui permet aussi à des entreprises d'engager leur responsabilité en « attestant » de la conformité de leur solution : justement, car le code est auditable par d'autres. « Autres » qui, peut-être à la différence d'une autorité certifiante, peuvent partager une connaissance fine de la réalité du terrain et des pratiques.

Un risque important, des retombées positives très incertaines…

Quel impact aurait la restriction à la seule possibilité de certification ? Rien ne semble pouvoir le dire, aucune étude d'impact n'ayant été conduite ou, du moins, communiquée. Et si l'INSEE chiffre, en effet, comme le rappellent certains amendements, la fraude à la TVA entre 20 et 25 milliards d’euros par an, rien ne semble indiquer quelle part relève de l'usage de systèmes de caisse frauduleux.

Comme nous le décrivons dans notre communiqué du 5 novembre 2024 : comment la suppression de l'« attestation individuelle » est-elle censée participer à la lutte contre la fraude à la TVA ?

Une chose est sûre, cette réforme risque de mettre en péril tout un écosystème autour des logiciels libres intégrant des fonctionnalités de caisse. Non seulement pour les entreprises qui contribuent à ces logiciels, mais aussi pour les utilisateurs et utilisatrices.

Car, au-delà de la question – par ailleurs réelle – du coût financier pour les personnes qui utilisent des logiciels de caisse sous licences libres, se pose la question de leurs libertés informatiques et de leur possibilité matérielle de ne pas dépendre de systèmes privateurs pour leurs besoins d'encaissement.

En résumé, nous considérons que la réforme proposée fait porter un risque disproportionné pour tout l'écosystème des logiciels de caisse sous licence libre, pour les libertés d'usage de leurs utilisateurs et utilisatrices, sans pour autant démontrer l'utilité de la règle de droit prévue par apport à l'objectif de lutte contre la fraude à la TVA.

L'April appelle à rejeter les amendements I-35, I-705, I-852, I-1001 et I-1754.

Signataires :

  • CNLL, l'union des entreprises du logiciel libre et du numérique ouvert
  • Ploss-RA, association des professionnels du logiciel libre en Auvergne Rhône-Alpes
  • Paheko.cloud, logiciel de gestion d'association, représentant 10 000 associations
  • Association Dolibarr représentant plus de 100 000 entreprises utilisatrices du logiciel de gestion d'entreprise Dolibarr
  • Association Pastèque, accompagne 50 structures et gère la suite logicielle libre Pastèque
  • Majerti et Kilya : SCOPs qui développent et hébergent le logiciel libre de gestion de Coopérative d'Activité et d'Emploi enDI/Moogli (70 entreprises utilisatrices, plus de 4 000 utilisateurs)
  • OpenConcerto, logiciel opensource de gestion d'entreprise, téléchargé 6 000 fois par mois
  • NOALYSS Serveur de comptabilité et ERP , plus de 6 000 téléchargements par mois
  • TiBillet.org : Coopérative en Tiers-Lieux "Fabriques de territoire". Lauréat France 2030 soutien aux transitions numérique et écologique de la culture
  • Coopérer Pour Entreprendre éditeur du logiciel enDI], ERP dédié aux CAEs.
  • Baptiste Lemoine - Dirigeant de CipherBliss.com entreprise développant Caisse Bliss
  • Aunéor Conseil, intégrateur Odoo
  • Webelys, intégrateur Dolibarr
  • Altairis, intégrateur Dolibarr, au nom de ses salariés et de ses clients utilisateurs de Dolibarr
  • Philippe SCOFFONI président de Easya Solutions, intégrateur Dolibarr et de ses 400 clients
  • Marie Siegler, co-gérante, Nicolas ZABOURI, co-gérant, et William Mead, chef de projet Dolibarr, pour Inovea Conseil : intégrateur Dolibarr. Pour la protection des intérêts de nos clients et également au nom de nos salariés.
  • Nicolas Silobre pour NS INFO, développeur de module Dolibarr
  • Jean-Michel Boulet pour2i2L, organisme de formation LL ; utilisateurs, formateurs Dolibarr
  • Nicolas Barrouillet et Stéphanie Barrouillet, gérants de la société Pragma-tech : Intégrateur Dolibarr
  • Maxime Kohlhaas, dirigeant fondateur d'ATM Consulting, intégrateur Dolibarr ERP-CRM, et président de l'association Dolibarr
  • Wild Turtles, ESN spécialisé dans le logiciel libre (intégration) et développement sur mesure
  • ERALOG, logiciels et systèmes ouvert
  • Scopen, intégrateur Dolibarr et ERPNext
  • Nomagic, association utilisant Dolibarr et proposant des instances du logiciel libre Paheko à ses associations adhérentes
  • Octopuce, entreprise utilisant Dolibarr
  • DXND, entreprise utilisant Dolibarr
  • Dokos, plateforme open source de gestion d'entreprises
  • DoliCloud, plus de 500 entreprises utilisatrices en France.
  • À Livr'ouvert, petite librairie parisienne, utilisatrice du logiciel libre Odoo
  • Parinux, association utilisatrice de Dolibarr
  • Voltaire-Léon, l'association des commerçants du quartier Voltaire Paris 11, inscrite sur Paheko
  • Alka France Électronique industrielle, utilisatrice de Noalyss
  • BaraTi'Pain, boulangerie utilisant le logiciel de caisse libre Pastèque
  • En Vente Libre, association qui vend des goodies et récupère des dons, utilise les logiciels Odoo et Prestashop
  • Sébastien BAYLE pour La Roue Tourne, société de réparation de vélos à domicile qui utilise Dolibarr.
  • Tetaneutral.net, fournisseur d'accès à Internet et hébergeur associatif
  • Les éditions D-BookeR
  • CoopCircuits, plateforme coopérative opensource pour vendre et acheter en circuit court
  • L'épicerie équitable, Lyon et Lille
  • Neuronnexion, société coopérative utilisant Dolibarr.
  • DEPANDEVI (association loi 1901)
  • Place Au Vélo en Saumurois, association utilisant Paheko
  • Kaopa Café, torréfacteur, utilisateur de logiciel de caisse sous libre libre depuis 2012.
  • MickaëlDELAPORTE - Gérant – Responsable commercial - Biscuithé
  • Nicolas Vivier, utilisateur de Dolibarr
  • Eric RAYBAUDI, consultant en informatique, utilisateur et prescripteur de Dolibarr – ERP/CRM libre
  • Sébastien Chateau-Dutier, utilisateur Dolibarr et WordPress+WooCommerce pour ma société
  • Demain Supermarche, magasin participatif
  • Maelic Philippot, au nom de Quai numérique
  • Joël Petitpas, au nom de la SAS coopérative la mouette
  • Suzel Bernier, au nom de La Mouette !
  • Fabien GSELL, au nom de COOP14, magasin coopératif et citoyen, Paris 75014
  • French Data Network (FDN)
  • Antoine & Marion Guerre, au nom de l'épicerie Meloco
  • Alain Figuet, au nom de La Mouette
  • Pâquerette (Collectif d'entrepreneur de la CAE Optéos) : membre du collectif CHATONS et propose (entre autres) de l'hébergement de solution collaborative avec Nextcloud et Collabora Office
  • Vergers de Lozère, association utilisatrice du logiciel Paheko pour sa comptabilité
  • Stéphanie Leleux, secrétaire - trésorière d'une association loi 1901 utilisant Paheko
  • L'Harmonie l'Espérance représentée par son Président - Philippe BROSSEAU
  • L'OMCMontluel
  • Association La Casa Bicicleta (Perpignan)
  • Daniel Guiraud, Président ARALEC 41
  • Olivier Grandjean, Administrateur Système et DBA chez Coopaname / Timon-Ethics
  • Jean-Christophe Becquet, ingénieur conseil expert en informatique libre, directeur d'APITUX
  • Arts en Scène, école de théâtre à Lyon, association à but non lucratif
  • Restouble Marnic, pour la société Restouble Voyages
  • Rémi Vincent pourPostHack
  • FONDRAS Denis, gérant de la société LIOPEN
  • Nathanaël Leprette, au nom d'ACCOLADES
  • Nicolas Dorigny, gérant de la société datætic, développement de logiciel libre
  • Matthieu VEROVE, au nom deELICLA Numérique, intégrateur de solutions informatiques
  • Stéphane Paillet, Président d'Ethicsys SAS
  • Déborah Adoh, Journaliste et fondatrice d'Endémik
  • Cécile Robin, cheffe de projet informatique chez Alpilink
  • Magali Garnero, présidente de l'April, utilisant les logiciels Odoo, Dolibarr et Paheko
  • Renaud Zigmann, président de la société ARMONIKA
  • Marie-Jo KOPP CASTINEL, directrice d'OpenGO
  • Élise Henrot, nom de l'entreprise Géoscope et en nom propre
  • Julien Dubois, intégrateur de logiciels libres
  • Manuel Pintor, intégrateur de logiciels libres
  • Julien Palard, développeur de logiciels libres
  • Sylvain Boissel, développeur de logiciels libres
  • Antoine Bardelli, utilisateur de Dolibarr
  • Thibault Drevet, utilisateur de Dolibarr
  • Romain Raballand, utilisateur d'Odoo
  • Yannick Voyeaud, adhérent de l'April
  • Jérôme Herbinet, semeur de logiciels libres
  • Romain DESCHAMPS - consultant fonctionnel sénior ERP/CRM libre et open source Easya Solutions
  • Thomas Negre - Développeur de l'ERP/CRM Dolibarr pour Easya Solutions
  • Clément Latzarus, mainteneur du logiciel libre Biblys.
  • Patrick Prémartin, développeur et utilisateur de logiciels libres
  • Grégory DAVID, Ingénieur logiciel sécurité télécoms
  • Margaux Mantel, salariée de l'association Paheko, logiciel libre qui intègre une fonctionnalité de caisse
  • Yann Lebas, architecte en cybersécurité
  • Arnaud Boudoul, Directeur Administratif et financier de 35 établissements et services dans le secteur ESMS.
  • Mathieu BRUNEAU, MB Informatique
  • Simon Vieille
  • Julien Henry
  • Bruno Dewailly
  • Victor Loizel
  • Alexi Carriere
  • Mathieu Clabaut
  • John Livingston
  • Mathieu Godard
  • Frédéric Roux
  • Christophe Drevet
  • Frédéric Bezies
  • Vincent Picavet
  • Denis Plotton
  • Olivier Pierret
  • Pedro CADETE
  • Stéphane Klein
  • Daniel Dehennin
  • Julien Beti
  • Vincent Jousse
  • B.Maynadier
  • Brice Lamire
  • Hugo Moubèche, informaticien
  • David Benoist
  • Yohann Decharraud
  • William SIMON
  • Pierre BRIOT
  • Hoareau Stéphane Joseph
  • Mickaël Guéret
  • Stéphane Masper, développeur
  • Jean-Pierre Pinson
  • Christophe De Natale
  • Frédéric Escallier - agriculteur
  • Konrad HINSEN
  • Jérôme Darmont
  • Gilles RENAULT
  • Suomi Ponce Heredia
  • Omar TOUROUGUI
  • Paul de Pastors
  • Cyril Coupe
  • Pierre-Henri DEBALLON
  • Marie Lancelin
  • Jacques Le Roux
  • Pierre Cros
  • Jean-Marc Briand
  • Catherine Hatinguais
  • Bernadette Bouchard
  • Nicolas TOUBLANC
  • Daniel Malgorn
  • Bailly Jean-Marie
  • Florent Tassy
  • Joël HILLION
  • Bruno Martin
  • Olivier CÉSAR
  • Pascal Heintz
  • Sandra Mallem
  • Odile vievard
  • Mathieu Caroff
  • Fenoglio Nomi
  • Jean VIÉVARD
  • Léa Dubos
  • Guillaume Bossard
  • Langlois Ségard
  • Joelle Avenel
  • Séverine Migliorini
  • Ann-lou Turlot
  • Thierry CORNUS
  • Cyrille Guet
  • Anthony Nguyen
  • Sylvain Nicoud
  • Lydia Vinot
  • Jean-Charles BIERME
  • Christophe ROBERT / LYSIS
  • Pierre LOVAT
  • Jean Galland
  • Yves CHAUSSON
  • François Grignard
  • Jacques GUYLLIERMINETTI
  • Olivier Perrin, maraîcher bio en sol vivant
  • Thierry Poissonnier
  • Morin Fabien
  • Philippe Berthemet
  • Étienne BRAUD
  • Valentine R.
  • CAZEAUDUMEC Benoît
  • Frédéric CLOSET, diplômé en expertise comptable
  • Jérémy Carrier
  • Florian HENRY
  • Claudio Ciardelli

Sursis pour les logiciels libres de caisse avec le rejet de la loi de finances pour 2025

Par : egonnu
19 novembre 2024 à 10:00

Le 12 novembre 2024, l'Assemblée nationale a rejeté le projet de loi de finances 2025. Une très bonne nouvelle pour les logiciels libres de caisse, car un des articles du texte faisait planer une menace substantielle sur leur existence… Avec l'arrivée du texte au Sénat, il faudra rester vigilant dans les jours à venir.

La loi actuelle prévoit que les entreprises qui proposent des logiciels de caisse doivent elles-mêmes attester auprès de leur clientèle de la conformité des fonctionnalités d'encaissement, sinon, elles doivent faire certifier leur solution auprès d'une autorité certifiante. L'Assemblée nationale avait adopté un amendement qui aurait supprimé la possibilité de l'« attestation », donc imposé la « certification ». Ce nouvel article aurait créé une pression financière et réglementaire très importante, qu'il aurait été particulièrement difficile, pour ne pas dire impossible, d'absorber pour nombre d'éditeurs et intégrateurs de logiciels libres de caisse. Une des conséquences probable aurait été un appauvrissement des solutions libres d'encaissement, au détriment notable des utilisateurs et utilisatrices qui dépendent de ces outils.
Pour plus de détail, nous vous invitons à lire notre communiqué du 5 novembre 2024.

En rejetant le projet de loi de finances dans son ensemble, l'Assemblée a, de fait, également fait tomber le nouvel article en question. Une excellente nouvelle. Le Sénat devra donc travailler à partir de la version initiale du texte proposé par le gouvernement.
Il faudra bien sûr rester vigilant quant à la possibilité d'amendement visant à réintroduire l'article. Et, au-delà de ce projet de loi, il nous faudra plus globalement convaincre du caractère disproportionné de la solution envisagée.

Qui veut la peau des logiciels libres de caisse ?

Par : egonnu
5 novembre 2024 à 04:05

Communiqué de presse : le 5 novembre 2024

Entre 2016 et 2018, l'April avait participé à des échanges avec l'administration fiscale pour s'assurer que les logiciels libres qui proposent une fonctionnalité de caisse soient correctement pris en compte par la réglementation. Mission accomplie…
Jusqu'au projet de loi de finances pour 2025 où l'Assemblée nationale semble avoir décidé que la lutte contre la fraude à la TVA nécessite de réduire à néant tout un pan de l'écosystème des logiciels (libres) de caisse. Le Sénat saura-t-il réagir ?

Jusque là, tout va (presque) bien

Un petit rappel historique.

Depuis janvier 2018, toute personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui enregistre les règlements de sa clientèle au moyen d'un logiciel ou d'un système de caisse, doit pouvoir fournir, en cas de contrôle, une certification ou une attestation individuelle de conformité à la loi fiscale1. Ce document lui est remis par l'« éditeur », au sens de la doctrine fiscale qui définit très largement le terme (incluant notamment les prestataires qui proposent de l'intégration et/ou du support système) 2.

L'April avait activement participé à des échanges avec l'administration fiscale afin de s'assurer que la réglementation n'interdise pas, de fait, les logiciels libres de caisse – c'était la crainte –, en rendant incompatible la liberté de modification avec le dispositif prévu. Des échanges constructifs avaient permis l'élaboration d'un texte 3 aux définitions et aux champs d'application plus clairs. Particulièrement en termes de partage des responsabilités. Les logiciels libres de caisse étaient « sauvés ».

Notons d'ailleurs que parler de logiciel (libre) de caisse est une facilité. Le dispositif vise en réalité les fonctionnalités d'encaissement. Des logiciels de planification des ressources de l'entreprise (dit ERP) ou gestion des relations client (dit CRM), par exemple, peuvent être concernés s'ils intègrent de telles fonctions.

En résumé, l'équilibre trouvé en 2018 reposait sur un point central : la responsabilité. Qui est responsable en cas de fraude ? Et, pour ce qui nous intéresse ici, qui est responsable en cas de « faux » document qui affirmerait la conformité d'un logiciel qui ne le serait pas ? Les entreprises qui émettent des « attestations individuelles » engagent leur responsabilité, donc leur réputation et leur trésorerie. Ce n'est en aucun cas leur intérêt que les systèmes qu'elles mettent en place pour leur clients et clientes permettent la fraude, bien au contraire.

Et là, c'est le drame…

Nous voilà rendus au projet de loi de finances pour 2025. Avec toujours le souci – légitime – de lutter contre la fraude à la TVA via des logiciels de caisse, l'Assemblée nationale a adopté des amendements modifiant ce dispositif. Non pas pour revenir sur la liberté de modification, mais, plus généralement, pour imposer une procédure de certification aux « éditeurs » de logiciel de caisse. Ainsi, ces derniers devraient, à chaque mise à jour « majeure »4, faire certifier à nouveau leur logiciel par un organisme agréé. Un processus très lourd et onéreux, difficilement accessible aux TPE/PME. Les logiciels libres, par la nature même de leurs modèles de développement, seraient particulièrement impactés.
La certification pourra même s'avérer impossible à réaliser lorsque l’organisme qui demande la certification doit s’assurer et faire respecter la bonne conduite des distributeurs concernant l’installation et le paramétrage des logiciels. L’organisme certifiant étant garant de la conformité de la solution dans son ensemble.

Dit simplement, supprimer la possibilité de « l'attestation individuelle » revient à soumettre toute activité économique autour des logiciels de caisse, libres ou non, à une très importante pression financière et réglementaire, et à imposer une responsabilité contractuelle auprès de l’organisme certifiant. C'est rendre aussi (très) chère « l'innovation » ainsi que tout développement logiciel spécifiquement adapté aux besoins d'un client ou d'une cliente sur qui se répercuteraient nécessairement les coûts.

Quel est le rapport entre fraude et dispositif des « attestations individuelles » ?

Trois amendements identiques avaient été déposés 5. La députée C. Pirès Beaune a présenté le sien ainsi : « l'amendement vise à mettre fin à la prolifération des logiciels de caisse dits permissifs, autocertifiés, en supprimant la possibilité de recourir à une attestation individuelle de l’éditeur du logiciel. » 6.

Elle mélange ainsi des choses très différentes :

  • l'attestation individuelle d'un « éditeur » pour son client. Ce qui constitue la norme ;
  • l'attestation pour soi-même, l'exception, uniquement accessible aux assujettis qui ont une activité réelle et corroborée d'édition de logiciels ou de systèmes de caisse. 7

Un flou très préoccupant vu les enjeux car, en fait, de quoi parle-t-on donc ici ?

Jusqu'à preuve du contraire, les fraudes ne sont constatées que sur contrôle, après coup. Trois cas de fraude semblent envisageables :

  • avec un logiciel de caisse, malgré une certification ou une attestation de conformité à jour ;
  • avec un logiciel de caisse, sans document de conformité correspond à la version du logiciel utilisé ;
  • hors logiciel de caisse, en contournant l'outil informatique.

Dans le premier cas, l'autorité certifiante ou l'« éditeur » sera responsable pour les manquements qui la concerne et devra payer une amende, comme les restaurateurs et l’éditeur cités en exemple par la députée Pirès Beaune, à Toulouse8.

Dans les deux autres cas, le dispositif de preuve de conformité n'a aucune incidence, aucune. Comment alors la suppression de l' « attestation individuelle » est-elle censée participer à la lutte contre la fraude à la TVA ?

Se pose ici la question de l'utilité de cette règle de droit : en quoi aurait-elle pu empêcher les fraudes prises en exemple pour justifier son adoption ? Une chose est sûre, cette réforme risque de mettre en péril tout un écosystème autour des logiciels libres intégrant des fonctionnalités de caisse.

On notera d'ailleurs que si l'exposé des motifs de l'amendement adopté évoque un « manque à gagner fiscal imputable à la fraude à la TVA entre 20 et 25 milliards d’euros par an », cela recouvre de nombreuses réalités et pas seulement l'utilisation de systèmes de caisse non-conformes, loin s'en faut. Pour ne prendre qu'un exemple, parmi les plus courants, le non reversement de la TVA perçue.

« On se demande quand même d'où vient cet amendement. Quel est le but ? Montrer un manque de confiance dans celles et ceux qui font vivre l'écosystème des logiciels libres? Assécher le marché des logiciels de caisse au profit d'une poignée de gros éditeurs privateurs ? Ou alors est-ce, encore, le signe d'une profonde incompréhension des réalités économiques du développement logiciel…? Quoi qu'il en soit, on voit difficilement comment une telle réforme pourrait être compatible avec le principe constitutionnel de proportionnalité » s'exaspère Étienne Gonnu, chargé de mission affaires publiques pour l'April.

Tout n'est pas perdu : prochaine étape, le Sénat

Après la fin de l'examen du texte par l'Assemblée nationale 9, le projet de loi de finances pour 2025 sera étudié et amendé par le Sénat., d'abord en commission des finances, puis en séance publique. L'April ne manquera pas de contacter les sénateurs et sénatrices pour les informer de la situation et les inviter à rétablir l'article 286 3° bis du Code général des impôts dans sa rédaction initiale. L'April appelle également toutes les personnes concernées - développeurs et développeuses, utilisatrices et utilisateurs, entreprises, associations ou fondations en charge d'un projet de logiciel libre de caisse - à faire de même.

N'hésitez pas aussi à rejoindre notre liste publique dédiée à ce sujet pour partager vos interrogations, vos réflexions et arguments, et participer à cette mobilisation.

  • 1. Voir l’article 286 3° bis du code général des impôts, issu de la loi de finances pour 2016
  • 2. Le dispositif utilise le terme d'« éditeur » pour qualifier la catégorie de personnes concernées par les obligations de certification et d'attestation. Mais la notion d'« éditeur » doit être entendue dans un sens large, englobant par exemple le prestataire qui fera de l’intégration et/ou qui s’occupera de maintenir le système à jour dès lors qu'il sera « le dernier intervenant ayant paramétré le logiciel ou système lorsque son intervention a eu pour objet ou effet de modifier un ou des paramètres permettant le respect des conditions d'inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d'archivage des données » (§310 du BOI-TVA-DECLA-30-10-30).
  • 3. La doctrine fiscale, opposable à l'administration, qui précise comment cette dernière va mettre en œuvre la loi.
  • 4. Le §340 du BOI-TVA-DECLA-30-10-30 définit une mise à jour « majeure » comme toute mise à jour concernant les conditions d'inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d'archivage des données en vue du contrôle de l'administration fiscale. Toutefois, toute modification autre (dite « mineure »), doit faire l’objet d’un suivi régulier par l’organisme certificateur, ce qui rend complexe l’adaptation du logiciel à différents contextes d’utilisation malgré une base « majeure » commune. La certification nécessite que l’organisme qui demande la certification puisse s’assurer et faire respecter la bonne conduite des distributeurs concernant l’installation et le paramétrage des logiciels, chose impossible à faire dans le cadre de logiciels libres.
  • 5. Les amendements 1548, 2078 et 2206
  • 6. Le compte-rendu des échanges et la vidéo (voir à partir de 4:46:55) sont disponibles
  • 7. Voir les point §370 et §375 du BOI-TVA-DECLA-30-10-30 pour les conditions d'attestation pour autrui et d'attestation pour soi-même
  • 8. Fraude dans les restaurants à Toulouse : condamnés, les gérants échappent à l'interdiction de gérer, La dépêche, 9 février 2022
  • 9. L'Assemblée dispose de 40 jours pour adopter le texte, donc jusqu'au 18 novembre 2024. Sinon, à l'expiration de ce délai, il sera transmis tel qu'amendé au Sénat. Pour plus de détails
❌
❌