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« Vous êtes filmé·es » : une critique documentaire de la surveillance

31 mai 2024 à 06:05

Dans la lignée des festivals organisés ces deux dernières années par nos ami·es de Technopolice Marseille, La Quadrature du Net s’associe à Tënk pour proposer une sélection de films documentaires abordant l’enjeu de la surveillance policière. Il s’agit, par le cinéma, de mieux penser les technologies et les rapports de pouvoirs qu’elles produisent, pour mieux les combattre. Voici le texte introduisant cette sélection à retrouver sur Tënk.

Sous couvert d’optimisation et de contrôle, la surveillance prolifère. À l’ère de l’informatique, nos messages privés sont traqués, nos publications constamment analysées, nos corps scrutés par les dispositifs de vidéosurveillance disséminés dans nos rues. Partout dans le monde, des data centers stockent des fichiers nous concernant qui, pris ensemble, disent tout ou presque de nos activités, de nos déplacements, de nos attachements. 

Si la surveillance est partout, si elle sature aussi l’actualité de même que les discours militants ou nos conversations intimes, elle reste largement invisible, souvent mal comprise. De grands schèmes tirés d’exemples historiques ou de science fiction – au hasard, la Stasi ou 1984 d’Orwell –, nous font généralement office de grilles de lecture. Mais on peine à en saisir avec nuance les ressorts et les ramifications, à discerner ses infrastructures, à en comprendre les effets ou les évolutions.

À La Quadrature du Net, nous travaillons depuis des années à la défense des droits humains face à la prolifération de la surveillance numérique. Et d’expérience, nous savons que produire un discours sur cet objet nécessite un effort constant de réflexion et d’élaboration.

C’est ce que nous tâchons de faire dans le cadre du projet Technopolice, en mettant l’accent sur les nouvelles technologies de surveillance policière des espaces publics urbains : vidéosurveillance algorithmique, police prédictive, drones, et bien d’autres encore. Dans ce travail d’enquête militante et d’éducation populaire qui est aussi une tentative de résistance, le cinéma documentaire apparaît comme un outil puissant. C’est pourquoi nous somme ravi·es de pouvoir faire cette escale en partenariat avec Tënk, en proposant cette sélection de films variés et complémentaires.

À travers cette sélection, il s’agit d’abord de tendre un miroir aux surveillants, de lever le voile sur ces acteurs en position de pouvoir qui produisent ou légitiment la surveillance (voir le film médiactiviste Supervision, tourné dans le centre de vidéosurveillance de Marseille ; voir aussi la super-production expérimentale All Light Everywhere, qui fait l’incroyable rencontre d’un représentant commercial d’Axon, leader du marché des bodycams policières ; voire enfin Prédire les crimes). Le documentaire permet aussi de convoquer un passé pas si lointain pour se remettre en mémoire ses méfaits par exemple en rappelant le viol de l’intimité et le contrôle qu’induit le regard policier (comme sous le régime polonais dans les années 1970 dans An Ordinary Country), ou en revenant sur la généalogie carcérale de la vidéosurveillance (Je croyais voir des prisonniers). Par la poésie, il peut enfin souligner, au-delà de l’État et de sa police, la multiplicité des formes de surveillance, la manière dont nous pouvons parfois nous en faire complices, et interroger la frontière entre surveillance et partage, domination et rencontre (L’Îlot).

Le choix des films, fait en collaboration avec le comité de programmation de Tënk, laisse évidemment de côté d’autres excellents titres. Mais l’ensemble donne bien à voir ce contre quoi nous luttons, à savoir ce vieux fantasme policier que décrivait Michel Foucault dans Surveiller et Punir (1975) : une « surveillance permanente, exhaustive, omniprésente, capable de tout rendre visible, mais à la condition de se rendre elle-même invisible », « un regard sans visage qui transforme tout le corps social en un champ de perception ».

À travers la puissance du cinéma, il s’agit aussi de remettre un tant soit peu de symétrie dans le rapport de force. Car si la surveillance peut s’interpréter comme un champ de perception au service du pouvoir, alors notre proposition éditoriale recèle aussi un espoir : l’espoir qu’en faisant collectivement l’expérience de ces films, nous puissions nous constituer ensemble en une sorte de contre-champ, en un faisceau de résistances.

Bon visionnage !

La Quadrature du Net

Pour l’interopérabilité des réseaux sociaux

Par : marne
4 décembre 2023 à 08:45

L’interopérabilité, c’est-à-dire la capacité pour différents systèmes de communiquer entre eux, est omniprésente dans notre quotidien. Partout où sont établis des standards – dans la langue et l’écriture, dans la circulation routière, dans les pièces mécaniques de nos machines, dans la connectique de nos appareils électroniques, dans les formats de nos fichiers numériques –, un certain nombre de règles permettent à deux systèmes distincts de fonctionner comme un seul, formant un écosystème.

Le monde informatique est fait de ces règles que l’on appelle « protocoles ». Certaines entreprises font le choix de concevoir plutôt des protocoles propriétaires, c’est-à-dire de poser des barrière pour bloquer la communication avec d’autres systèmes qui ne seraient pas sous leur contrôle. Cela leur permet de s’assurer que les personnes qui utilisent leurs logiciels ou leurs matériels soient dépendantes de l’entreprise. L’entreprise Apple, par exemple, est connue pour fonder l’ensemble de son modèle économique sur ces stratégies de fermeture : si la communication entre les différents appareils et logiciels Apple est possible, elle est rendue difficile voire impossible avec d’autres appareils et logiciels n’appartenant pas à la marque. Posséder un ordinateur Apple implique d’utiliser le système d’exploitation d’Apple, d’utiliser la connectique Apple et d’intégrer des logiques d’utilisation souvent très différentes, rendant les utilisateur·rices captif·ves de leur écosystème.

Schéma de l'écosystème privateur de l'entreprise Apple

Les réseaux sociaux commerciaux comme Facebook, Twitter, Instagram, Youtube, TikTok et bien d’autres reposent sur l’absence de protocole pour communiquer vers l’extérieur : ils empêchent leurs utilisateur·rices d’opter pour d’autres moyens de communiquer et d’échanger des informations. Les contenus publiés sur l’un de ces réseaux sociaux ne sont accessibles qu’en passant par celui-ci. Toute communication vers l’extérieur est volontairement bloquée et il est parfois même nécessaire de se créer un compte pour consulter un contenu via une interface imposée (interface web ou application).

La stratégie des réseaux sociaux commerciaux fonctionne sur une logique de régie publicitaire. Pour être rentables, il leur faut rassembler un public auquel exposer la publicité de leurs annonceurs. Dans un premier temps, ces entreprises s’emploient à créer un logiciel de réseau social désirable, en mettant l’accent sur des fonctionnalités innovantes pour attirer des utilisateur·rices. L’usage de protocoles fermés n’est alors pas encore une nécessité. On se rappelle par exemple de Facebook, qui, entre 2008 et 2015, supportait le protocole XMPP dans sa messagerie privée, ce qui permettait à ses utilisateur·rices d’échanger avec les personnes ayant un compte AIM, ou utilisant d’autres messageries basées sur ce protocole. Ils constituent de cette manière une grosse base d’utilisateur·rices afin de renforcer ce qu’on appelle l’« effet réseau » de leur logiciel : plus il y a des personnes présentes sur le réseau social, plus cela en attire de nouvelles.

Une fois un certain seuil d’utilisateur·rices atteint, pour avoir une stratégie publicitaire plus offensive, les réseaux sociaux commerciaux investissent l’ensemble de leurs ressources pour servir la publicité. Cela a pour effet de dégrader le service, notamment en réorganisant les contenus créés sans but commercial en les diluant dans ceux « sponsorisés ». Le réseau social commercial n’est alors plus aussi attrayant pour le service qu’il offre, mais seulement en ce qu’il permet de communiquer avec les gens qui y ont un compte. La stratégie de mise en captivité devient alors une nécessité. Les techniques utilisées pour empêcher les utilisateur·rices de partir et en attirer d’autres malgré la dégradation du service passent alors par la fermeture des protocoles – voire l’impossibilité stricte de communiquer vers l’extérieur –, la complexification de l’accès au contenu pour les personnes non connectées, et bien d’autres obstacles.

Ce fonctionnement en silos semble être la norme aujourd’hui car cette méthode de captivité est efficace : alors qu’une grande partie des utilisateur·rices d’un réseau social commercial comme Facebook sont très critiques de ses méthodes de surveillance commerciale, de ses méthodes de modération, de son volontarisme à appliquer la censure réclamée par les États, de sa manière d’afficher en priorité des contenus publicitaires, iels continuent de l’utiliser car tous·tes leurs ami·es y sont.

Table des matières

Le caractère commercial à l’origine de la nécessité de centralisation

Modération, censure, espaces d’expression

L’obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux comme outil de leur régulation

Conclusion

Schéma de l'origine de la surveillance et de la censure sur les réseaux sociaux et solutions apportées par l'interopérabilité

Le caractère commercial à l’origine de la nécessité de centralisation

Dissection d’un GAFAM, analyse technique de la logique de centralisation

Pour mieux comprendre comment les réseaux sociaux commerciaux concentrent autant de pouvoir, commençons par analyser ce qui les compose. Nous prendrons ici l’exemple de Facebook, mais il en est de même pour Youtube, Tiktok et les autres :

Schéma d'un réseaux social centralisé

Lorsque l’on parle de Facebook, on parle en réalité de plusieurs choses différentes. Premièrement, pendant longtemps, Facebook était le nom de l’entreprise qui commercialise le réseau social (depuis 2021, cette entreprise s’appelle Meta). Deuxièmement, c’est le nom du logiciel de réseau social. Ce logiciel détermine les règles applicables au service : il prévoit non seulement les fonctionnalités (l’échange de contenus privés, publics, d’images, etc.), mais aussi les conditions à respecter pour en bénéficier. Ce logiciel de réseau social détermine ainsi les restrictions, comme le fait d’empêcher de pouvoir communiquer avec d’autres logiciels que ceux de l’entreprise, via l’obligation d’utiliser des protocoles propriétaires. Ce logiciel est hébergé uniquement sur les serveurs de l’entreprise, ce qui garantit à cette dernière d’être la seule à pouvoir administrer le réseau social (c’est aussi ce qui lui confère une responsabilité juridique particulière). Troisièmement, Facebook est aussi le nom des interfaces qui permettent d’accéder au réseau social, que l’on appelle « clients ». Il s’agit à la fois de l’interface web accessible depuis un navigateur que des applications mobiles que l’internaute installe sur son smartphone.

Les stratégies de protocoles fermés sont appliquées à tous les étages techniques, ce qui confère au réseau social cette nature centralisée :

  • il n’est pas possible d’héberger les contenus que l’on poste sur le réseau social ailleurs que sur les serveurs de l’entreprise ;
  • le logiciel est construit de manière à ce qu’il ne soit pas possible d’accéder directement à des contenus publiés sur un autre réseau social ;
  • la connexion au logiciel de réseau social ne peut se faire que via des clients développés et proposés par le réseau social, il est impossible d’utiliser des clients alternatifs (ou alors de manière très difficile en raison du manque de documentation des API pour les développeurs·euses tiers·ces ou de leurs restrictions d’usages).

Le principe d’interopérabilité veut précisément briser ces stratégies de centralisation technique qui sont à l’origine de la concentration du pouvoir des réseaux sociaux sur leurs utilisateur·rices. L’interopérabilité rendrait au contraire toutes ces choses possibles : héberger ses contenus où l’on veut, employer le logiciel de réseau social que l’on veut pour communiquer avec qui on veut, ou encore utiliser un client de son choix.

Centraliser et enfermer pour mieux surveiller

Le fonctionnement en silo des réseaux sociaux commerciaux maintient leurs utilisateur·rices captif·ves et leur permet d’imposer leurs conditions. Leur modèle économique étant basé sur la publicité ciblée, ils traitent un très grand nombre d’informations. Premièrement, les réseaux sociaux collectent les données fournies directement par l’utilisateur·rice. Cela varie d’un réseau social à un autre (en fonction de la politique propre à chaque service), mais on retrouve souvent l’âge, le nom, la nationalité, les centres d’intérêts, etc. Deuxièmement, les réseaux sociaux déduisent des informations à partir de l’usage fait par l’internaute. Ils peuvent recréer le graphe social (c’est-à-dire avec qui l’internaute interagit et à quelle fréquence), mais ils peuvent également traiter les métadonnées, c’est-à-dire ce qui entoure une communication : heure, fréquence et lieu de connexion, type de matériels et de logiciels utilisés, temps passé sur un contenu, etc.

Le but de cette collecte d’information est de dresser des profils types d’utilisateur·rices afin de leur adresser la publicité la plus ciblée possible – donc la plus « efficace » possible commercialement parlant. Par exemple, si vous êtes abonné·e à une page ou un compte d’un bar LGBT et que vous « likez » des posts de la Marche des Fiertés, le réseau social pourra commencer à déduire votre orientation sexuelle. Les réseaux sociaux commerciaux investissent beaucoup d’énergie, de recherche et développement dans ce domaine car c’est ce qui leur permet de satisfaire leurs vrais clients et sources de revenus : les annonceurs.

En théorie, en Europe, le règlement général sur la protection des données (RGPD) interdit de récupérer ces données sans le consentement libre de l’utilisateur·rice. En vertu ce de texte, un consentement est « libre » s’il est donné sans la menace d’être exposé·e à des « conséquences » négatives, comme de ne pas pouvoir accéder au service ou devoir payer pour y accéder. Ce règlement n’est pas respecté par la plupart des réseaux sociaux commerciaux. La grande majorité des utilisateur·rices, s’iels avaient le choix, refuseraient de donner les informations sur lesquelles reposent l’économie entière des entreprises concernées. C’est sur cette base qu’en 2018 La Quadrature du Net a déposé, avec 12 000 utilisateur·rices, des plaintes collectives contre les réseaux sociaux commerciaux Facebook et Linkedin. La procédure est encore en cours devant la CNIL irlandaise.

Le RGPD et la nécessité du consentement individuel ne sont donc pas suffisant·es en pratique pour lutter contre la surveillance commerciale. Ce règlement est très peu appliqué et ne propose qu’une solution individuelle, qui place l’utlisateur·rice devant un choix sans liberté : consentir à la publicité ou renoncer à utiliser le réseau social (donc se couper de ses contacts). Nous pensons, à l’inverse, que les réseaux sociaux et leur politique de modération et de fonctionnement doivent être gérés collectivement par les utilisateur·rices iels-mêmes. Autrement dit, il ne sert à rien d’essayer de réparer les réseaux sociaux commerciaux, il est préférable de s’organiser directement pour reprendre le pouvoir des communautés.

Si les réseaux sociaux étaient interopérables, les internautes pourraient déménager vers des réseaux sociaux non commerciaux, qui n’imposent pas de surveillance à leurs utilisateur·rices, sans pour autant perdre le contact avec leurs proches qui ont toujours un compte sur un réseau social commercial.

Modération, censure, espaces d’expression

Centralisation : régime de modération unique

Il existe de nombreux régimes de modération qui répondent à des besoins différents. Tout le monde est confronté au quotidien, en dehors des réseaux sociaux, à une multitude de régimes. Par exemple, en présence d’enfants, il est souvent d’usage de surveiller son langage et de ne pas employer de vocabulaire grossier. En fonction du contexte professionnel ou amical dans lequel on se trouve, on adaptera son registre de mots. Cela ne représenterait donc aucun intérêt de vouloir unifier ces régimes d’expression et impliquerait même, au contraire, une perte de diversité culturelle et un blocage des perspectives d’évolution de la langue. La langue est interopérable dans le sens où elle fournit à la fois un certain nombre de standards permettant aux gens d’être compris entre eux sans empêcher pour autant que puissent exister des règles plus spécifiques dans certains groupes. Il peut s’agir de règles tacites ou de règles verbalisées par le groupe. Cette diversité de régimes d’expression coexiste sans que l’un d’entre eux soit intrinsèquement meilleur.

Nous avons expliqué plus haut comment le fonctionnement en silo des réseaux sociaux commerciaux leur permet de concentrer tous les pouvoirs et d’imposer unilatéralement un certain nombre de règles à l’ensemble de leurs utilisateur·rices. En pratique, cela revient à déposséder en partie les espaces de discussion de leur pouvoir de choisir un régime d’expression donné. Cette dépossession n’est, certes, pas entière, car un certain nombre de régimes d’expressions sont compatibles avec les règles fixées par le réseau social. En revanche, dès qu’il s’agit de vouloir publier un contenu interdit par le réseau social, même lorsque ce contenu n’est pas illégal, les utilisateur·rices se retrouvent bloqué·es dans leur expression, ou censuré·es.

Les questions de pouvoir d’expression ne sont pas spécifiques à l’usage des outils numériques mais générales à l’ensemble de la société. La liberté d’expression, la liberté d’opinion, la liberté de recevoir ou de communiquer des informations, la liberté de la presse ainsi que les limites de ces droits que sont la diffamation, l’injure ou le dénigrement entendent encadrer nos échanges. Ces droits et leurs limites sont souvent invoqués pour formuler deux critiques à l’égard de ces réseaux. La première provient d’utilisateur·rices frustré·es d’avoir vu des contenus légaux modérés, iels sont attaché·es à voir leur liberté d’expression assurée et voudraient que les réseaux sociaux commerciaux n’aient pas le droit de supprimer des contenus qui ne soient pas illégaux. La seconde provient d’utilisateur·rices sont confronté·es à des contenus qui les offensent et aimeraient ne plus l’être, même si ces contenus ne sont pas manifestement illégaux.

Ces deux critiques quant à l’excès ou au manque de censure de la part des réseaux sociaux sont caractéristiques du problème central : celui d’un régime de modération unique imposé par les plateformes.

Le choix d’une organisation centralisée, qui impose les même règles à une grande quantité de groupes et de personnes différentes, est assez absurde et insatisfaisant pour les utilisateur·rices des réseaux sociaux. Mais la centralisation engendre d’autres problèmes, que nous évoquons par la suite, davantage dus à la concentration des pouvoirs.

Censure passive due au modèle économique

La place privilégiée des contenus publicitaires

Les réseaux sociaux commerciaux ont cette particularité de ne pas seulement héberger le contenu de leurs utilisateur·rices, mais également celui de leurs clients : les annonceurs. Honneur aux payeurs, l’ensemble du réseau social est façonné dans un seul but : maximiser l’exposition au contenu publicitaire et renforcer son efficacité, c’est-à-dire conduire les utilisateur·rices à cliquer sur la publicité. Les données personnelles recueillies servent donc à dresser des profils d’utilisateur·rices pour leur adresser la publicité à laquelle iels seraient le plus sensibles, mais tout le reste du réseau social sert également cet objectif. Les algorithmes ont donc pour but de donner plus ou moins d’importance à tel ou tel contenu afin de le sur-visibiliser ou le sous-visibiliser, dans l’optique de pousser l’utilisateur·rice à rester le plus longtemps sur le réseau, et à être la ou le plus receptif·ve possible à la publicité.

Économie de l’attention, viralité boostée et censure par enterrement

L’ensemble de ces stratégies visant à pousser l’utilisateur·rice à rester longtemps sur la plateforme est couramment appelé « économie de l’attention ». En pratique, les algorithmes d’organisation des contenus repèrent ceux qui font polémique et qui provoquent un engagement spontané de la part des utilisateur·rices, afin de leur donner une place privilégiée en les faisant apparaître plus haut dans le flux de l’internaute ou dans les résultats de recherche, voire en envoyant une notification à l’utilisateur·rice. L’espace d’expression étant limité, cette mise en avant de certains contenus conduit également à sous-visibiliser les autres : les contenus plus complexes, plus étayés, nécessitant plus d’investissement de la part du public et n’obéissant pas aux critères de création de contenus valorisés par les réseaux sociaux commerciaux sont moins souvent mis en avant et proposés à la lecture. Ils subissent alors une censure invisible, dite « censure par enterrement ».

Ces mécanismes renforcent l’addiction au réseau social et sont à l’origine de la viralité mondiale de certains contenus. Ils sont également à l’origine de la grande propagation de contenus problématiques. Les contenus qui entraînent beaucoup d’engagement de la part des internautes sont souvent des contenus clivants et choquants. C’est le cas des contenus racistes, du harcèlement, des fausses informations, des images d’actes de violence.

Ces contenus suscitent de l’engagement de toute part : celleux qui les soutiennent les partagent en masse, et celleux qui s’y opposent sont offusqué·es et les partagent en masse pour les dénoncer. En 2019, la tuerie de l’église de Christchurch en Nouvelle-Zélande a été filmée et diffusée en direct par son auteur sur Facebook. Elle a été massivement partagée par des personnes d’extrême droite. Facebook n’a pas bloqué ces images et, pire, leur a donné une viralité supplémentaire car, étant choquantes, elles ont suscité beaucoup d’engagement.

Malheureusement, quand il s’agit de lutter contre les effets délétères des stratégies commerciales des réseaux sociaux, le réflexe des États n’est jamais de remonter aux causes du problème. La solution proposée est toujours d’en passer par une loi de censure, imposant aux réseaux sociaux de supprimer tel ou tel type de contenus, validant ainsi la giga-structure centralisée des réseaux sociaux commerciaux, pourtant à la base du problème.

Censure active

Les réseaux sociaux commerciaux ayant un grand pouvoir sur leurs utilisateur·rices, il est intéressant de voir et de critiquer les décisions prises par les entreprises qui les possèdent. On peut penser par exemple à la volonté de Mark Zuckerberg de mener une politique «  antisuicide » sur son réseau social (Facebook) reposant sur l’analyse automatisée des contenus et non un accompagnement humain, ou encore aux transformations qu’a subies Twitter après son rachat par Elon Musk en novembre 2022. On voit alors comment la volonté d’un seul homme ou d’une seule entreprise peut avoir des conséquences sur des millions de personnes. Mais il est plus intéressant encore de voir que la majorité des décisions qui sont prises viennent surtout d’autres forces extérieures à l’entreprise, et auxquelles les réseaux sociaux commerciaux doivent se plier pour conserver leur place hégémonique.

Le pouvoir des annonceurs

Le modèle économique basé sur la publicité motive les réseaux sociaux commerciaux à se modeler en fonction de celle-ci. Nous avons qualifié cette dynamique de « censure passive » car la censure n’en est qu’un effet secondaire. Mais il existe aussi une demande active de censure de la part des annonceurs, en particulier pour que leur publicité ne soit pas affichée à côté de certaines catégories de contenus. Récemment avec Twitter, des annonceurs se sont retirés en raison de la recrudescence de contenus d’extrême-droite. Cette pression possible des annonceurs sur les plateformes explique aussi pourquoi on retrouve souvent des règles de censure proscrivant la nudité. Cette influence n’est pas spécifique aux réseaux sociaux : partout où il y a un financement publicitaire, les annonceurs ont le pouvoir de retirer leur publicité (et donc leur financement) si leurs exigences en matière de censure ne sont pas respectées (la presse papier, également, est souvent tributaire du pouvoir de ses annonceurs).

Le pouvoir des États

Le pouvoir centralisé des réseaux sociaux commerciaux représente aussi une opportunité de pouvoir pour les États. Nous l’avons particulièrement vu durant ces cinq dernières années. Les volontés de censure des États viennent du constat d’un changement dans les dynamiques d’expression en ligne dont nous avons expliqué les causes (le caractère commercial des réseaux sociaux et leur caractère centralisé). Pour autant, le biais d’administration centralisée de l’État ou le manque de temps nécessaire à cette compréhension n’ont pas conduit les représentant·es politiques à vouloir remonter à la racine des problèmes. À chaque « problème » identifié — haine et harcèlement, contenus violents, fausses informations, etc — l’urgence les a toujours conduit à valider le pouvoir de l’instance centralisée des réseaux sociaux commerciaux en leur imposant de durcir leur modération, souvent dans des délais courts qui ne peuvent être respectés que par l’usage d’algorithmes de filtrage des contenus.

Le pouvoir de l’industrie culturelle

La création de contenus sur les réseaux sociaux est très prolifique et a apporté un renouveau dans les moyens d’expression et la production de contenus créatifs. Le vieux modèle de production d’œuvres culturelles, façonné lui aussi pour obéir à des impératifs économiques au détriment de l’écosystème créatif et des populations nécessitant un accès à la culture, n’a pas disparu pour autant. Sous la pression de l’industrie culturelle, les réseaux sociaux commerciaux — c’est particulièrement le cas de Youtube — ont mis en place des algorithmes pour censurer certains contenus qui ne respecteraient pas le droit d’auteur. L’industrie culturelle a par la suite, avec l’aide du législateur, réussi à imposer cette idée qu’il faudrait surveiller l’ensemble des contenus en ligne afin de repérer les œuvres « illégalement » partagées. Le fonctionnement de l’outil Content ID de Youtube, qui consiste à comparer les condensas (hash) de musiques et vidéos à une base de données de contenus protégés et, en cas de similitude, à bloquer le contenu a donc depuis été mis en place sur tous les grands réseaux sociaux commerciaux.

Centralisation et censure par algorithme

La très grande quantité de contenus que les réseaux sociaux commerciaux hébergent demande un lourd travail de modération. La motivation économique étant la raison première de leur existence, ils ont rapidement cherché à « rationaliser » la modération, à l’aide de la sous-traitance de ce travail à des « fermes de modérateurs » et à l’usage d’algorithmes de filtrage.

Les « fermes de modérateurs » sont des entreprises, souvent implantées dans des pays où les salaires sont très bas. Les conditions de travail y sont généralement très dures et les salarié·es sont exposé·es à une quantité phénoménale de contenus violents (aux conséquences psychiques lourdes sur les personnes) sortis de leur contexte (le contexte culturel variant d’un pays à l’autre, le contexte d’une publication serait de toute manière très difficile à appréhender). Leur travail sert à modérer les contenus des réseaux sociaux commerciaux et à entraîner des algorithmes dans le but d’automatiser la modération1Lire les travaux du sociologue Antonio Casilli sur les « travailleurs du clic » et la déconstruction du fantasme selon lequel l’intelligence artificielle remplacerait le travail humain. Casilli, Antonio. En attendant les robots – Enquête sur le travail du clic, Seuil, 2019.

Pour ces raisons, la modération par algorithme n’est pas souhaitable. Elle est en plus de cela largement fantasmée. Comme en témoigne l’exemple de la tuerie de Christchurch que nous présentions plus tôt : les algorithmes remplissent mal l’objectif de censure qui leur est donné et laissent passer des contenus qu’ils étaient censés censurer. Ces erreurs fonctionnent aussi dans l’autre sens : certains contenus qui ne devraient pas être censurés par l’algorithme le sont quand même. Diverses représentations d’œuvres d’art se sont ainsi retrouvées censurées, suscitant de vives polémique.

Le législateur, valide, encourage et va parfois jusqu’à imposer l’usage des algorithmes de filtrage en exigeant des délais très court aux retraits de contenus. La directive européenne sur le droit d’auteur et le règlement européen relatif à la prévention de la diffusion de « contenus à caractère terroriste » en ligne qui imposent l’usage de ces algorithmes semblent passer totalement à côté de la réalité de comment sont entraînés ces algorithmes et de leur soi-disant « efficacité ».

L’interopérabilité, et son objectif de décentralisation, permettrait de remettre en avant la modération humaine effectuée par des personnes concernées ayant un regard plus juste et contextualisé sur les contenus à modérer.

L’obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux comme outil de leur régulation

L’interopérabilité des réseaux sociaux consiste à permettre à un·e utilisateur·rice inscrit·e sur une plateforme A de pouvoir communiquer avec celleux inscrit·es sur une plateforme B, et inversement, sans pour autant avoir besoin de compte sur cette deuxième plateforme. Un·e utilisateur·rice pourrait écrire à des personnes qui sont sur une autre plateforme et s’abonner à leurs fils d’actualités ou pages sans avoir besoin de compte chez les autres réseaux sociaux, donc sans accepter non plus leurs conditions générales d’utilisation et leur surveillance.

L’objectif principal de La Quadrature du Net lorsqu’elle demande au législateur de contraindre les plus gros réseaux commerciaux de devenir interopérables est de briser leurs silos afin que leurs utilisateur·rices puisse échapper à leur captivité et rejoindre d’autres réseaux. Le fait de briser ces silos a de nombreuses conséquences possibles, dont certaines nous semblent particulièrement désirables.

Casser les silos : ouvrir de nouveaux possibles

Comment cela fonctionne ? L’exemple du fédivers

Le fédivers (de l’anglais fediverse, mot-valise entre « fédération » et « univers ») est un grand réseau social permettant d’échanger des informations, des photos, des vidéos, de la musique, … Il est très différent des réseaux sociaux commerciaux dans sa conception, mais s’utilise de manière similaire au quotidien. Nous prenons cet exemple car il a connu un essor ces dernières années (notamment avec le logiciel Mastodon), mais il ne s’agit pas forcément pour autant de la meilleure solution technique : plusieurs voies sont en cours de développement et les choix techniques et standards choisis ont toujours des conséquences sur l’organisation des réseaux et sur les utilisateur·rices. L’avantage des protocoles ouverts comme ActivityPub (sur lequel se fonde le fédivers), ou encore Matrix, Solid, XMPP, Diaspora, etc., est qu’ils rendent possibles de créer des ponts entre eux, de « traduire » un protocole vers un autre2Souvent la mise en place de tel « bridge » n’est pas aussi efficace et fonctionnel que si le protocole utilisé était le même, mais cela permet tout de même de maintenir un lien entre eux.. Ces protocoles ont donc l’intérêt de faire fonctionner plusieurs réseaux sociaux comme un seul.

Dans le fédivers, tous les rôles que nous avons décrit plus haut sont gérés par des acteurs différents qui ont des noms différents : le réseau social s’appelle « fédivers », le protocole « ActivityPub », et les logiciels sont très nombreux (on vous en présente quelques uns plus bas). Cela peut donner une sensation de complexité pour les utilisateur·rices, mais c’est ce qui garantit l’ouverture du réseau, la possibilité d’en créer de nouvelles parties, et permet surtout la déconcentration des pouvoirs.

Dans le fédivers, on trouve par exemple des alternatives à Twitter : Mastodon est la plus connue, mais il existe aussi GNU social, Pleroma, Misskey et d’autres. Il y a Peertube, une alternative à Youtube, Plume, une alternative à Medium, Mobilizon qui permet d’organiser des événements (et remplace les événements Facebook), Pixelfed, qui permet de partager des images et se propose comme alternative à Instagram, Lemmy, une alternative aux sites-forums d’agrégation d’actualité comme Reddit, ou encore Funkwhale qui permet d’héberger et partager des fichiers audio et se propose en alternative à Deezer ou Spotify.

Notons la place importante de nos ami·es de Framasoft dans le développement de cet écosystème de logiciels libres, notamment à travers leur travail sur Mobilizon et Peertube ainsi que le rôle des CHATONS, collectif d’hébergeurs alternatifs qui hébergent et administrent de nombreuses instances de réseaux sociaux décentralisés3Cette liste de logiciels du fédivers est loin d’être exhaustive : il en existe bien d’autres, d’autant plus si on ajoute les logiciels utilisant d’autres protocoles interopérable qu’ActivityPub. Ces logiciels libres sont plus ou moins proches des logiciels privateurs desquels ils sont l’alternative et sont dans des états de développement plus moins avancés..

Le fédivers fonctionne sur le principe de fédération : pour faire partie du réseau, il faut créer ou rejoindre une instance. Une instance est une version installée sur un serveur d’un logiciel qui communique avec ActivityPub. N’importe qui peut donc créer une instance. La Quadrature du Net a par exemple une instance Mastodon, mamot.fr.

Voici un schéma d’une instance Mastodon.
Contrairement aux réseaux sociaux commerciaux, on peut y accéder via des clients différents :
Schéma d'une instance Mastodon

Contrairement aux réseaux sociaux commerciaux, plusieurs instances Mastodon peuvent se fédérer et permettre à leurs utilisateur·rices de communiquer entre elles tout en ayant des règles de modération différentes. Mais il y a également une nouveauté supplémentaire : différents logiciels, à partir du moment où ils sont basés sur ActivityPub, peuvent communiquer entre eux même si leurs usages sont différents. Ainsi, une personne avec un compte sur une instance Mastodon (dont l’usage est du micro-blogging) peut s’abonner à un compte PixelFed (partage d’images) ou bien commenter des vidéos hébergées sur une instance Peertube (partage de vidéos).

Schéma de plusieurs instances du Fédivers utilisant différents logiciels

Nombreux·ses sont les utilisateur·rices qui souffrent de la démultiplication des comptes sur les messageries et les réseaux sociaux. L’interopérabilité pourrait devenir une solution permettant à chaque utilisateur·rices d’avoir des comptes uniquement sur les services qui l’intéressent tout en ayant la possibilité de communiquer avec quelqu’un ayant un compte sur n’importe quel autre service interopérable.

Régulation de l’expression par la décentralisation

La première étape pour transformer l’écosystème des réseaux sociaux passe donc par la possibilité pour les utilisateur·rices de se diriger vers les alternatives existantes, qui leur montreront ce que donnent des logiques de modération différentes de celles des réseaux sociaux commerciaux. Les logiciels de réseaux sociaux existants utilisant des protocoles interopérables proposent déjà des services qui permettent aux utilisateur·rices de s’extraire de la surveillance et de l’organisation des contenus au service de la publicité, de choisir parmi une multitude de régimes de modération différents, et même d’en créer de nouveaux.

On peut d’ores et déjà observer la différence, en termes de diffusion des contenus, qu’apporte le caractère décentralisé des politiques de modération, via une comparaison entre Mastodon et Twitter. Sur Mastodon, la modération est effectuée à l’échelle des instances (et donc de chaque serveur sur lequel est installée le logiciel Mastodon). Elle est faite par des personnes humaines, se référant aux règles de modération établies par l’instance en question. Les contenus problématiques ne bénéficient pas d’une viralité boostée comme sur Twitter ; au contraire, leur viralité est même plutôt freinée par les décisions de modération de chaque instance au fur et à mesure que les contenus atteignent différentes instances en étant partagés par des utilisateur·rices.

Schéma de trois instances Mastodon ayant chacune leurs règles de modération

Ce système de modération est bien plus fin que la modération par algorithmes car les personnes humaines qui modèrent chaque instance ont une meilleure compréhension du contexte et se réfèrent à des règles collectives correspondant à l’espace d’expression dont elles sont les actrices. Par ailleurs, la décision de modérer ou non un contenu est beaucoup moins lourde de conséquences car elle n’entraîne pas pour tout le monde une interdiction d’accès au contenu : seule l’instance hébergeant le compte qui a posté le contenu peut le supprimer complètement. Une instance peut donc modérer un contenu chez elle, sans que cela n’impacte la manière dont le contenu sera vu sur les autres instances. Il n’y a donc pas de censure hégémonique. De cette manière, la logique décentralisée prend bien plus en compte la complexité du monde des espaces d’expression : elle accepte que la validité d’un propos ne soit pas binaire et dépende de l’espace où il est exprimé et des règles que celui-ci s’est données.

De nouveaux usages possibles grâce à l’interopérabilité

Ces initiatives sont pour la plupart en cours de développement et beaucoup de critiques peuvent leur être faites. Pour reprendre l’exemple précédent de la comparaison entre Mastodon et Twitter, de nombreux problèmes subsistent : Mastodon étant très largement inspiré de Twitter, il en copie le fonctionnement en favorisant par défaut les contenus publics, en étant construit comme une grande arène uniquement constituée de comptes d’individus, en valorisant le sentiment de récompense rattaché aux outils de mesure de la « performance d’un contenu » (les partages et les favoris), etc. Le fonctionnement par instance maintient corrélées les décisions de modération et la question de l’hébergement : les personnes ayant la capacité technique d’héberger une instance ont plus de pouvoir que les personnes qui n’ont pas cette capacité technique puisqu’elles en seront la plupart du temps administratrices.

Les critiques et pistes d’amélioration sont nombreuses et déjà très investies par l’écosystème de développeur·euses et d’utilisateur·rices des réseaux sociaux décentralisés. Parmi les réflexions en cours, celles s’intéressant aux modes de décisions collectives sont particulièrement intéressantes. Il y a un fort enjeu pour les groupes à avoir des outils en ligne qui leur permettent de s’organiser aussi librement qu’ils le souhaitent.

Ainsi, le protocole Scuttlebut propose un fonctionnement entièrement basé sur l’auto-hébergement et le pair-à-pair : les contenus sont hébergés directement par les utilisateur·rices et circulent de manière chiffrée au sein du réseau sur la logique du bouche-à-oreilles. Comme dans des discussions entre ami·es : on ne peut savoir ce qu’a dit quelqu’un que si quelqu’un d’autre nous le répète, le tout restant privé.

De même, Bonfire est un logiciel de réseau social basé sur ActivityPub qui permet de faire du microblogging. Il permet de reproduire les usages de type « Twitter », comme les alternatives que nous avons précédemment mentionnées, mais tente aussi de proposer de nouvelles fonctionnalités comme la possibilité de faire exister des logiques de groupes ou encore d’avoir une interface adaptable à différents usages.

Enfin, on soulignera les travaux de l’association Technostructures, qui formule plusieurs critiques à l’égard du protocole ActivityPub : le lien indissociable entre hébergement de l’instance et pouvoir de modération et le caractère public par défaut des contenus. C’est sur ce constat qu’elle développe Posca, un réseau social qui n’est pas basé sur le protocole ActivityPub mais sur le protocole Matrix (tout en proposant tout de même la fédération avec le fédivers via un pont). L’usage du protocole Matrix apporte aussi l’avantage que les échanges sont chiffrés.

Un autre enjeu est celui de l’avenir des réseaux sociaux. Les vieux réseaux sociaux commerciaux semblent depuis longtemps s’être figés. Parce qu’ils n’ont plus besoin d’attirer les utilisateur·rices avec de nouveaux usages intéressants depuis qu’ils les ont rendus captif·ves, on n’y voit quasiment plus rien de nouveau. Les quelques nouveautés ne servent que l’objectif économique des entreprises, comme la mise en avant par Meta de la réalité virtuelle à travers son idée de Metaverse qui répondait à une logique de création d’un nouveau marché (sur lequel Meta aurait eu un monopole grâce à son fonctionnement en silo) et s’est écroulée car ne répondant à aucun usage des utilisateur·rices. Il y a pourtant de nombreuses pistes à explorer pour proposer des usages réellement utiles aux groupes et aux personnes qui cherchent le bon moyen de communiquer. Promouvoir l’interopérabilité, c’est aussi rouvrir la question des usages médiatiques du Web et de leur devenir.

Forcer l’interopérabilité : stratégies politiques et juridiques

Il ne faut bien évidemment pas compter sur les réseaux sociaux commerciaux pour être interopérables de leur plein gré. La Quadrature du Net demande donc, depuis 2019, que soit instaurée dans le droit une obligation d’interopérabilité des grands réseaux sociaux.

Le refus du législateur jusqu’à présent d’instaurer une obligation d’interopérabilité

En France, la députée Laetitia Avia (LREM) a fait voté en 2020 une proposition de loi qui, sous couvert de lutte contre la haine en ligne, instaurait un gigantesque dispositif de censure obligatoire et arbitraire. Lors des débats parlementaires, La Quadrature a rappelé qu’il existe une autre manière de réguler les plateformes et de lutter contre la haine en ligne, sans passer par la censure, grâce à l’obligation d’interopérabilité afin de permettre aux internautes de quitter une plateforme toxique. Ainsi, en 2019, plus soixante-dix organisations, aux côtés de La Quadrature, demandaient au législateur d’obliger les grands réseaux sociaux commerciaux à être interopérables. Le choix du législateur a été d’ignorer cet appel, de rester dans une vision de régulation par la censure, et cette loi est aujourd’hui tombée dans les oubliettes de la République depuis que le Conseil constitutionnel l’a quasiment intégralement déclarée contraire à la Constitution.

Lorsque l’Union européenne a voulu réformer son cadre juridique sur le numérique avec le Digital Services Act (règlement sur les services numériques, ou DSA) et le Digital Markets Act (règlement sur les marchés numériques, ou DMA), de nombreuses associations de défense des libertés, dont La Quadrature, EDRi, ARTICLE 19, ou encore l’Electronic Frontier Foundation ont demandé à ce qu’une obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux soit inscrite dans ces textes législatifs : l’Union européenne avait enfin l’occasion d’innover dans sa manière de réguler les géants du net. Le Parlement européen a été réceptif à cet appel : la version du DMA votée par le Parlement européen comportait une obligation d’interopérabilité des grands réseaux sociaux. Mais c’était sans compter sur les efforts de la France et de Cédric O, alors secrétaire d’État au numérique. Lors des négociations sur le DMA, la France, alors présidente du Conseil (l’autre organe législatif de l’UE à côté du Parlement européen), a obtenu, à la toute fin des négociations, le retrait de cette obligation d’interopérabilité.

Enfin, récemment, le gouvernement français a présenté en mai 2023 un projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (aussi appelé « SREN ») dont l’objectif est, entre autres, de réguler les plateformes en ligne. Là encore, de la même manière que la loi Avia, le gouvernement a préféré la solution de la censure à celle de l’interopérabilité des réseaux sociaux, grande absente. Et ici encore, alors que des député·es de gauche et du centre avaient proposé d’instaurer une forme d’obligation d’interopérabilité, le gouvernement s’y opposa. La raison de son refus ? Nous ne la connaîtrons pas : le ministre du numérique Jean-Noël Barraut n’a pas pris la parole pour s’expliquer, se contentant d’un lapidaire « Défavorable », et la majorité présidentielle suivit sagement l’avis négatif du ministre pour rejeter les amendements proposés.

Un rapport de force entre grandes plateformes et États d’une part, et société civile d’autre part

Alors que l’obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux aurait pu devenir une réalité si la France et Cédric O n’avaient pas autant bataillé contre, les déclarations de ce dernier éclairent assez bien le rapport de force qui se joue aujourd’hui.

Dès 2019 en effet, Cédric O se montrait très réticent à l’idée d’obliger les grands réseaux sociaux à être interopérables. Devant la commissions des lois de l’Assemblée nationale, il regrettait le caractère « excessivement agressif pour le modèle économique des grandes plateformes » d’une obligation d’interopérabilité. Autrement dit, le secrétaire d’État a préféré sacrifier les libertés publiques et la possibilité d’explorer de nouvelles manières de s’exprimer en ligne sur l’autel des intérêts économiques des grandes plateformes.

Il y a donc un véritable rapport de force aujourd’hui autour de la question de l’obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux, où grandes plateformes et États travaillent de concert. Meta, notamment, n’a pas hésité à critiquer l’interopérabilité pour ses risques – exagérés, nous revenons dessus plus bas – en termes de vie privée. Or, en juillet 2020, Facebook et Snapchat réussissaient à s’afficher aux côtés du Conseil national du numérique (CNNum) à l’occasion d’une table-ronde sur l’interopérabilité des réseaux sociaux et de la publication d’un rapport de l’institution très critique sur l’interopérabilité.

L’urgence à obliger les réseaux sociaux commerciaux à être interopérables

Il est particulièrement important d’agir et de faire en sorte que cette obligation d’interopérabilité des réseaux sociaux arrive vite, parce que de leur côté, les grands réseaux sociaux n’attendent pas. Reconnaissons un point à Cédric O lorsqu’il s’opposait pendant les débats sur la loi Avia à une telle obligation : elle remettra drastiquement en cause le modèle économique actuel des grands réseaux sociaux qui n’est possible, nous l’expliquions plus haut, que grâce à leur position hégémonique. Ces derniers n’investiront le champ de l’interopérabilité que s’ils y ont quelque chose à gagner.

Or, c’est précisément ce que voudrait faire Meta : lancer un réseau social interopérable sans attendre d’y être contraint par le législateur. L’entreprise a en effet annoncé à l’été 2023 que son nouveau réseau de microblogging, Threads, serait interopérable avec le reste du fédivers grâce au support du protocole ActivityPub. Bonne nouvelle ? Non, comme nous l’expliquions à l’époque. Meta profite de l’absence d’obligation d’être interopérable, donc de l’absence de régulation de ce domaine, pour devenir le plus gros acteur et ainsi, pouvoir peser sur les choix techniques du fédivers et du protocole ActivityPub.

En effet, aujourd’hui, parce qu’aucun réseau social n’a l’obligation d’être interopérable, le domaine de l’interopérabilité des réseaux sociaux n’est pas régulé. Cela fonctionne à peu près correctement lorsque l’écosystème des réseaux sociaux interopérables est composé de petits acteurs, qui ne cherchent pas le profit, donc qui ne voient pas le fédivers comme un marché à conquérir et qui ne cherchent pas à le canibaliser. Mais cet équilibre serait radicalement modifié avec l’arrivée d’une entreprise comme Meta : non seulement en raison de l’objectif commercial de Meta, mais également en raison du nombre d’utilisateur·rices qu’elles représenterait et du pouvoir d’influence que cela lui conférerait (les plus grosses instances Mastodon ont quelques centaines de milliers d’utilisateur·rices quand Facebook en a plusieurs milliards).

C’est pour cette raison qu’il est nécessaire que l’obligation d’interopérabilité s’accompagne d’une régulation de ce secteur. Aujourd’hui, même si la question de la nature de la régulation est ouverte, La Quadrature du Net estime, à défaut de meilleure solution, que celle-ci devrait prendre la forme d’un régulateur indépendant étatique, comme c’est le cas avec la régulation des télécoms et l’obligation de neutralité du net. En France, ce serait l’ARCEP, déjà chargée de réguler les télécoms. Ce régulateur aurait non seulement le pouvoir d’imposer aux géants les protocoles à implémenter (afin qu’un Meta ne puisse pas inventer son propre protocole fermé et ne l’ouvrir que partiellement pour garder le contrôle sur son évolution), mais pourrait également, avec des sanctions dissuasives, punir les réseaux sociaux commerciaux qui ne se plieraient pas à cette obligation (par exemple si un réseau social voulait se refermer après avoir capté une partie de la communauté, comme ce qu’il s’est passé avec Google et GTalk).

La proposition législative de La Quadrature

La Quadrature du Net a proposé à des député·es, à l’occasion du projet de loi SREN, d’instaurer une obligation d’interopérabilité par voie d’amendement. Deux amendements leur ont été proposés, qui peuvent être redéposés clé-en-main à l’occasion d’un futur véhicule législatif, voire être transformés en proposition de loi.

Le premier amendement vise à instaurer une véritable obligation d’interopérabilité. Il repose sur les définitions et seuils européen·nes et s’inspire de la proposition du Parlement européen d’instaurer une telle obligation dans le DMA. Lorsqu’un réseau social est un « contrôleur d’accès » (c’est-à-dire une grande plateforme) au sens de l’article 3 du DMA, il devra être interopérable. Cette obligation est contrôlée par l’ARCEP, qui voit ses pouvoirs de régulation et de sanction étendus à la question de l’interopérabilité.

Le deuxième amendement est un amendement de repli. Il n’instaure pas d’obligation d’interopérabilité, mais régule les plateformes qui, comme Meta, voudraient cannibaliser le fédivers. Cet amendement de repli repose sur les mêmes définitions du DMA, mais ne prévoit d’obligation de respecter les règles de l’ARCEP que si le réseau social commercial appartient à un « contrôleur d’accès » et est interopérable.

Prévoir les impacts de l’interopérabilité

Nous avons évoqué de nombreuses formes que peuvent prendre les réseaux sociaux grâce à l’interopérabilité, à travers les initiatives existantes : en reprenant certaines logiques des réseaux sociaux dominants dans une version décentralisée ou en proposant de nouvelles logiques de diffusion de l’information. On ne peut pas prévoir de manière certaine les dynamiques que provoqueraient une obligation d’interopérabilité. Toutefois, il est important d’envisager que cette obligation (ou la menace de la création d’une telle obligation) va provoquer des tentatives de « prise de marché » de la part du monde commercial.

Protocole ouvert = accès massif aux données ?

Pouvoir acceder aux informations et publications de nos proches sur les réseaux sociaux commerciaux, c’est aussi permettre aux personnes sur les réseaux sociaux commerciaux d’accèder aux informations et aux publications des personnes sur les réseaux sociaux non commerciaux qui ont une politique de gestions des données personnelles protectrice. Cela soulève donc la question suivante : l’interopérabilité risque-t-elle de donner une opportunité technique au réseaux sociaux commerciaux de récupérer également les informations issues des autres réseaux sociaux ? Bien sûr, cela serait parfaitement illégal, mais on ne peut pas faire confiance aux réseaux sociaux commerciaux pour respecter la loi, ils ne le font déjà pas.

Il est aujourd’hui déjà possible de collecter les informations publiquement accessibles sur un réseau social, en collectant les pages web qui contiennent les informations recherchées. Il est techniquement possible de faire une copie de toutes les pages publiques d’un réseau social pour analyser leur structure HTML et extraire le contenu (on appelle cela du scraping). Mais cette manière de faire est compliquée : il faut passer d’un contenu non-structuré (une page HTML) à un contenu structuré (l’information intéressante dans cette page HTML), ce qui n’est possible que par une analyse fine de la structure de la page HTML. Cette analyse est complexe mais les outils existent déjà ; c’est ce que fait par exemple l’administration fiscale française.

Or, l’intéropérabilité facilite la collecte par un acteur malveillant de données puisque le protocole servant à différentes instances pour communiquer entre elles (ActivityPub pour le fédivers) vise, précisément, à structurer les données. Mais cette facilitation technique de la collecte de données n’est pas le propre de l’interopérabilité : certains réseaux sociaux commerciaux proposent, parfois moyennant finances ou à des conditions strictes d’utilisation, des API (« application programming interface », ou « interface de programmation d’application ») qui permettent de structurer les données. Pour reprendre le cas de l’administration fiscale, celle-ci utilise ces API lorsqu’elle en a la possibilité et ne procède à du scraping que dans le cas où ces API ne sont pas disponibles.

Il est donc vrai que l’interopérabilité facilite le travail d’un acteur malveillant qui voudrait collecter des données. Mais il ne crée pas de nouveau risque à proprement parler, d’autant que ces outils de scraping sont largement à la portée des géants du Web.

Toutefois, ce débat – éminemment légitime – a pris de la place sur le fédivers lorsque l’entreprise Meta a annoncé la sortie de Threads, à terme basé sur le protocole ActivityPub donc pouvant communiquer avec d’autres instances du fédivers. Certain·es utilisateur·rices du fédivers ont notamment eu peur de voir leur données récupérées par Meta et de nombreuses instances ont même signé le « Fedipact », s’engageant à bloquer Threads.

En effet, une grande partie des utilisateur·rices du fédivers est particulièrement soucieuse aux questions de collecte de leur données personnelles. Nous ne pensons pas pour autant que cette crainte doive bloquer la possibilité de permettre aux personnes toujours captives des réseaux sociaux commerciaux de s’en echapper.

Décentraliser les espaces de discussions, c’est enlever du pouvoir aux États

Comme on l’a expliqué plus haut, l’interopérabilité a beaucoup d’avantages : pourquoi, alors, les États persistent-ils à vouloir maintenir des espaces de discussions centralisés au sein de quelques acteurs commerciaux ? Parce que cela répond à leur logique de recherche de pouvoir.

La régulation de l’expression en ligne est parsemé d’exemples où les États ont voulu accroître leur pouvoir. Il y a tout d’abord la question de la censure des expressions : avec le règlement européen « terroriste », il est possible pour une police de n’importe quel État de l’UE d’obliger le retrait d’un contenu, sans passer par un juge, qu’elle estimerait être à caractère terroriste. Avant les contenus terroristes, au début des années 2010, ce sont les contenus d’abus sur enfant qui ont, les premiers, été le prétexte pour ouvrir la boîte de Pandore de la censure administrative.

Or, il est beaucoup plus facile pour un État de discuter avec quelques acteurs commerciaux qui suivent des logiques de marchés et qui seront sensibles aux menaces économiques, qu’avec des collectifs informels, mouvants et difficilement palpables comme le fédivers en comporte. Les États ont donc intérêt à maintenir l’hégémonie des géants, puisqu’ils auront face à eux un petit nombre d’acteurs clairement identifiés.

Cette centralisation des réseaux sociaux permet de plus facilement faire pression sur eux pour censurer, y compris en dehors de tout cadre légal. Ainsi, à l’été 2023, lorsque des révoltes ont éclaté en France suite au meurtre par un policier d’un adolescent, la classe politique a ignoré les causes sociales de cette colère, et a préféré ressortir le vieux bouc émissaire des réseaux sociaux. Certains parlementaires et ministres, ainsi qu’Emannuel Macron, ont suggéré d’accentuer les obligations de censure s’imposant aux plateformes. Or, sans attendre une évolution législative, les réseaux sociaux commerciaux se sont s’exécuté. Ainsi, après une « convocation » par le ministère de l’intérieur, la responsable des affaires publiques de Snapchat, Sarah Bouchahoua (ancienne collaboratrice de Laetitia Avia), n’hésitait à révéler devant l’Assemblée nationale que, sur demande du gouvernement, le réseau social avait procédé au retrait de certains contenus. Une censure extralégale, qui repose sur une interprétation arbitraire et a maxima des conditions générales d’utilisation de la plateforme.

On voit bien le problème pour les États d’une généralisation des réseaux sociaux interopérables. Le ministre de l’intérieur ne pourra pas « convoquer » le fédivers. Ses décisions de censures, si elles sont illégitimes, seront d’un effet beaucoup plus réduit. Si une instance se voyait bloquée arbitrairement, ses utilisateur·rices pourraient migrer ailleurs.

Conclusion

Depuis 2019, date où nous avons commencé à expliquer aux parlementaires la nécessité de prévoir dans la loi une obligation d’interopérabilité, nos constats sur les dangers des pratiques hégémoniques des réseaux sociaux commerciaux n’ont pas bougé. Ce qui a évolué en revanche, c’est la volonté croissante des internautes de s’en libérer. Nous avons ainsi vu s’enchaîner les vagues de migration d’utilisateur·rices vers les alternatives. L’Internet libre aussi a bougé et foisonne de nouvelles initiatives porteuses d’idées à même de réellement réinventer le monde des réseaux sociaux. Nous avons également vu apparaître des stratégies d’interopérabilité adversarielle, c’est-à-dire des stratégies pour libérer de force les contenus présents sur les réseaux sociaux commerciaux et les rendre accessibles depuis d’autres services.

Malheureusement, nous avons aussi assisté à un enchaînement de lois de censure, cherchant à « réparer » les problèmes des réseaux sociaux tout en les confortant dans leur centralisation et leur hégémonie. L’interopérabilité devient une urgence.

Ce n’est pas la première fois que nos droits à communiquer et à partager des informations sont remis en question par la position hégémonique d’intermédiaires techniques à des fins commerciales. Dans les années 2010, les fournisseurs d’accès Internet ont cherché à tirer plus de profit de leur position en tentant de filtrer ou de ralentir l’accès à certains sites. Pour assurer un accès à Internet sans restriction de leur part, nous avons érigé la neutralité du net en principe fondamental d’Internet. Aujourd’hui face à la surveillance, la censure, les régimes de modération uniques et unilatéraux nous devons tous·tes ensemble pousser le principe d’interopérabilité et le rendre obligatoire pour les réseaux sociaux hégémoniques.

Nous plaçons la promotion l’interopérabilité des réseaux sociaux dans nos principaux combats pour l’année 2024. Ce principe est encore bien trop méconnu du grand public et une adhésion massives des populations faciliterait son insertion dans un texte de loi. Parlez donc de l’interopérabilité autour de vous !

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References[+]

References
1 Lire les travaux du sociologue Antonio Casilli sur les « travailleurs du clic » et la déconstruction du fantasme selon lequel l’intelligence artificielle remplacerait le travail humain. Casilli, Antonio. En attendant les robots – Enquête sur le travail du clic, Seuil, 2019
2 Souvent la mise en place de tel « bridge » n’est pas aussi efficace et fonctionnel que si le protocole utilisé était le même, mais cela permet tout de même de maintenir un lien entre eux.
3 Cette liste de logiciels du fédivers est loin d’être exhaustive : il en existe bien d’autres, d’autant plus si on ajoute les logiciels utilisant d’autres protocoles interopérable qu’ActivityPub. Ces logiciels libres sont plus ou moins proches des logiciels privateurs desquels ils sont l’alternative et sont dans des états de développement plus moins avancés.

Veesion, la start-up illégale qui surveille les supermarchés 

Par : martin
4 juillet 2023 à 05:53

Nous en parlions déjà il y a deux ans : au-delà de la surveillance de nos rues, la surveillance biométrique se déploie aussi dans nos supermarchés pour tenter de détecter les vols en rayons des magasins. À la tête de ce business, la start-up française Veesion dont tout le monde, même le gouvernement, s’accorde sur l’illégalité du logiciel mais qui continue à récolter des fonds et des clients en profitant de la détresse sociale

La surveillance biométrique de l’espace public ne cesse de s’accroître. Dernier exemple en date : la loi sur les Jeux Olympiques de 2024 qui vient légaliser officiellement la surveillance algorithmique dans l’espace public pour certains événements sportifs, récréatifs et culturels (on en parlait ici). En parallèle, des start-up cherchent à se faire de l’argent sur la surveillance d’autres espaces, notamment les supermarchés. L’idée est la suivante : utiliser des algorithmiques de surveillance biométrique sur les caméras déjà déployées pour détecter des vols dans les grandes surfaces et alerter directement les agents de sécurité.

L’une des entreprises les plus en vue sur le sujet, c’est Veesion, une start-up française dont on parlait déjà il y a deux ans (ici) et qui vient de faire l’objet d’un article de Streetpress. L’article vient rappeler ce que LQDN dénonce depuis plusieurs années : le logiciel déjà déployé dans des centaines de magasins est illégal, non seulement selon l’avis de la CNIL, mais aussi, selon nos informations, pour le gouvernement.

Le business illégal de la détresse sociale

Nous avions déjà souligné plusieurs aspects hautement problématiques de l’entreprise. En premier lieu, un billet publié par son créateur, soulignant que la crise économique créée par la pandémie allait provoquer une augmentation des vols, ce qui rendait nécessaire pour les magasins de s’équiper de son logiciel. Ce billet avait été retiré aussitôt notre premier article publié.

D’autres déclarations de Veesion continuent pourtant de soutenir cette idée. Ici, c’est pour rappeler que l’inflation des prix, en particulier sur les prix des aliments, alimenteraient le vol à l’étalage, ce qui rend encore une fois nécessaire l’achat de son logiciel de surveillance. Un business s’affichant donc sans gêne comme fondé sur la détresse sociale.

Au-delà du discours marketing sordide, le dispositif est clairement illégal. Il s’agit bien ici de données biométriques, c’est-à-dire de données personnelles relatives notamment à des caractéristiques « physiques ou « comportementales » (au sens de l’article 4, par. 14 du RGPD) traitées pour « identifier une personne physique de manière unique » (ici, repérer une personne en train de voler à cause de gestes « suspects » afin de l’appréhender individuellement, et pour cela analyser le comportement de l’ensemble des client·es d’un magasin).

Un tel traitement est par principe interdit par l’article 9 du RGPD, et légal seulement de manière exceptionnelle et sous conditions strictes. Aucune de ces conditions n’est applicable au dispositif de Veesion.

La Quadrature du Net n’est d’ailleurs pas la seule à souligner l’illégalité du système. La CNIL le redit clairement (à sa façon) dans l’article de Streetpress quand elle souligne que les caméras de Veesion « devraient être encadrées par un texte » . Or ce texte n’existe pas. Elle avait exprimé le même malaise au Monde il y a quelques mois, quand son directeur technique reconnaissait que cette technologie était dans un « flou juridique  » .

Veesion est d’ailleurs tout à fait au courant de cette illégalité. Cela ressort explicitement de sa réponse à une consultation de la CNIL obtenu par LQDN où Veesion s’alarme de l’interprétation du RGPD par la CNIL qui pourrait menacer « 500 emplois en France  » .

Plus surprenant, le gouvernement a lui aussi reconnu l’illégalité du dispositif. Selon nos informations, dans le cadre d’une réunion avec des professionnels du secteur, une personne représentant le ministère de l’Intérieur a explicitement reconnu que la vidéosurveillance algorithmique dans les supermarchés était interdite.

La Technopolice rapporte toujours autant d’argent

Tout cela ne semble pas gêner l’entreprise. Sur leur site , ils annoncent équiper plus de 2500 commerçants, dans 25 pays. Et selon les informations de Streetpress, les clients en France sont notamment Leclerc, Carrefour, G20, Système U, Biocoop, Kiabi ou encore la Fnac. Des enseignes régulièrement fréquentées donc par plusieurs milliers de personnes chaque jour.

Autre point : les financements affluent. En mars, la start-up a levé plus de 10 millions d’euros auprès de multiples fonds d’investissement. Sur le site Welcome to the Jungle, la start-up annonce plus de 100 salariés et plus de 5 millions de chiffre d’affaires.

La question que cela pose est la même que celle que nous rappelons sur ce type de sujets depuis 3 ans : que fait la CNIL ? Pourquoi n’a-t-elle pas fait la moindre communication explicite sur ce sujet ? Nous avions fait il y a deux ans une demande de documents administratifs à cette dernière, elle nous avait répondu qu’il s’agissait d’un dossier en cours d’analyse et qu’elle ne pouvait donc pas nous transmettre les documents demandés. Rien depuis.

Une telle inaction a des conséquences lourdes : outre la surveillance illégale imposée sur plusieurs milliers de personnes, la CNIL vient ici normaliser le non-respect du RGPD et faciliter la création d’une industrie de la Technopolice en laissant les investissements affluer.

Comment encore considérer la CNIL comme une autorité de « protection » de nos libertés quand la communication qui en émane sur ce sujet est qu’elle veut « fédérer et accompagner les acteurs innovants de l’écosystème IA en France et en Europe » ?

Surveillance illégale, détresse sociale, financement massif… Toutes les Technopolices se ressemblent, qu’elles soient en supermarché ou sur notre espace public. Mais pour une fois que tout le monde est d’accord sur l’illégalité d’une de ses représentantes, espérons que Veesion soit arrêtée au plus vite.

Loi J.O. : refusons la surveillance biométrique 

Par : marne
13 février 2023 à 06:48

Courant mars, l’Assemblée nationale va se prononcer sur le projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques, déjà adopté par le Sénat. En son sein, l’article 7 vise à autoriser la vidéosurveillance automatisée (VSA), cet outil de surveillance biométrique qui, à travers des algorithmes couplés aux caméras de surveillance, détecte, analyse et classe nos corps et comportements dans l’espace public. Il s’agit d’un changement d’échelle sans précédent dans les capacités de surveillance et de répression de l’État et de sa police.

Sur cette page, vous retrouverez un ensemble de ressources et d’outils pour vous permettre de vous engager contre la VSA et contre l’article 7 du projet de loi Jeux olympiques.

Une frise chronologique des passages à l’Assemblée indiquant les meilleurs jours pour téléphoner aux député·es
Un « Piphone » : un outil qui fournit les numéros des député·es
Un argumentaire pour convaincre les député·es

1 · Frise législative : quel est le meilleur moment pour appeler ?

2 · Piphone : choisir quel·le député·e appeler

Stratégiquement, nous vous conseillons d’appeler les député·es de la majorité (Renaissance, Horizons et Modem) et du PS (qui s’est abstenu au Sénat). Vous pouvez les contacter toute la semaine et si possible les lundi, jeudi et vendredi, lorsqu’ils ne sont pas dans l’hémicycle. C’est probable que vous ayez un·e assistant·e au téléphone et ce n’est pas grave ! N’hésitez surtout pas à lui parler, en lui demandant ensuite de relayer votre opinion auprès de son ou de sa députée.

3 · Argumentaire : convaincre le·a député·e de rejeter l’article 7

Appelons sans relâche les député·es afin de faire pression sur la majorité présidentielle et les élu·es qui pourraient changer le cours du vote.
Pour les convaincre, nous avons préparé quelques arguments phares que vous pouvez sélectionner, utiliser, remanier à votre sauce lorsque vous appelez les parlementaires. D’abord, cinq points d’alarme sur les dangers de la vidéosurveillance algorithmique. Ensuite deux « débunkages » d’arguments que l’on retrouve souvent dans la bouche des adeptes de la surveillance.
La VSA est par essence un outil de surveillance totale :

La VSA n’est pas un simple logiciel : elle analyse des milliers d’heures de vidéos pour catégoriser les comportements suivant ce que les autorités auront qualifié de « suspect » ou « anormal » pour l’appliquer en temps réel sur les caméras de surveillance. Cela crée un gigantesque système de ciblage « d’anomalies » afin d’automatiser le travail de la police. Il s’agit d’un réel changement de dimension de la surveillance et d’industrialisation du travail d’image pour démultiplier les notifications et interpellations, guidées par cette intelligence artificielle.
La VSA existe déjà et est déployée dans l’opacité

Déployée ces dernières années en toute opacité, la VSA est une technologie quasiment inconnue de la population. Développée et vendue discrètement par des entreprises, elle est implantée sans information par les collectivités, empêchant les habitant·es d’avoir facilement accès à ce qui est installé dans leur ville. Ce déploiement ne répond pas à un besoin démocratique mais à des logiques économiques alors qu’aucune preuve d’efficacité n’existe.
Par exemple, le logiciel de l’entreprise Briefcam, déployé en catimini dans plus de 200 municipalités en France, permet de réaliser des recherches par attributs (couleur des vêtements, couvre-chef, sac, type de vêtement et supposé genre de la personne), de faire du suivi de personne à travers toutes les caméras de la ville et possède même l’option « comparaison faciale » qui permet de faire une recherche parmi les flux vidéos du visage identifié. C’est grâce à un long travail de documentation de notre part et d’investigation de journalistes qu’il a été possible de comprendre ce que peut réellement faire ce fameux logiciel de VSA le plus vendu en France.
Cette opacité rend totalement impossible l’expression d’un choix démocratique sur la question.
La VSA n’est pas moins dangereuse que la reconnaissance faciale.

La VSA et la reconnaissance faciale reposent sur les mêmes algorithmes d’analyse d’images et de surveillance biométrique. La seule différence est que la première isole et reconnaît des corps, des mouvements ou des objets, lorsque la seconde détecte un visage. Ce sont généralement les mêmes entreprises qui développent ces deux technologies. Par exemple, la start-up française Two-I s’est d’abord lancé dans la détection d’émotion, a voulu la tester dans les tramways niçois, avant d’expérimenter la reconnaissance faciale sur des supporters de football à Metz. Finalement, l’entreprise semble se concentrer sur la VSA et en vendre à plusieurs communes de France. La VSA est une technologie biométrique intrinsèquement dangereuse, l’accepter c’est ouvrir la voie aux pires outils de surveillance.
La France est la cheffe de file de l’Europe en terme de surveillance

Avec cette loi, la France sera le premier État membre de l’Union européenne à légaliser et autoriser la surveillance biométrique, à l’opposée d’autres positionnements au sein de l’UE. Les discussions actuellement en cours sur le règlement européen sur l’intelligence artificielle envisagent même son interdiction formelle. La France confirmerait sa place de cheffe de file de la surveillance en Europe, s’éloignant toujours plus des idéaux de respect des droits fondamentaux et se rapprochant de la culture de la surveillance d’autres pays plus autoritaires. Les pays qui ont profité d’évènements sportifs pour tester et rendre acceptables des technologies de surveillance sont la Russie, la Chine et le Qatar.
Aucun garde-fous possible pour la VSA

Pour faire des traitements d’images pointus et reconnaître des formes avec précision, les algorithmes de VSA doivent être basés sur une technologie complexe dite de « deep learning » qui fonctionne grâce à des calculs si sophistiqués qu’ils dépassent l’entendement humain. L’algorithme décide lui-même quels paramètres sont pertinents pour détecter un évènement, sans qu’il soit possible de savoir lesquels ont été retenus pour donner le résultat. Il est impossible de garantir que le logiciel n’exploitera pas de données sensibles et de caractéristiques biométriques. Même les concepteurs de ces algorithmes n’ont pas de visibilité sur les données qu’ils exploitent. Ces technologies sont intrinsèquement dangereuses et ne pourront jamais être limitées efficacement sur le plan légal ou technique. Le seul garde-fou envisageable est l’interdiction de leur usage sur des activités humaines filmées dans l’espace public.
Réponses aux contre-arguments
« La VSA sera expérimentée uniquement pour les Jeux Olympiques »

FAUX, les Jeux Olympiques ne sont pas une expérimentation : la VSA est déjà déployée en toute opacité et illégalité et continuera à l’être après. On a retrouvé des traces de contrat entre la ville de Toulouse et IBM pour détecter des comportements anormaux dès 2017, on compte au bas mot deux cent villes en France qui l’emploient et elle s’installe aussi dans les magasins. Il y a donc un projet politique de long terme et les JO ne sont donc qu’un prétexte pour tenter de légaliser cette technologie. Après les Jeux, la vidéosurveillance algorithmique sera généralisée : une fois que des dizaines de milliers d’agents de sécurité et de police sont formés, que la technologie est achetée et mise au point grâce à des fonds publics, il faudra bien la rentabiliser. Son abandon après cette soi-disant expérimentation est donc illusoire.
« La VSA est seulement une aide à la décision »

Faux, la VSA n’est pas une simple aide technique : pour la concevoir, les entreprises doivent prendre une série de décisions morales et subjectives (qu’est-ce qu’un comportement « suspect » ?). Son application est également politique puisque la VSA est un instrument de pouvoir donné à des services coercitifs. La VSA n’est pas un outil neutre mais analyse en permanence les corps et les déplacements, en particulier de celles et ceux qui passent le plus de temps dans la rue. Se cacher derrière une machine, c’est déresponsabiliser les choix des agents de sécurité : « c’est pas nous qui avons ciblé cette personne, c’est l’algorithme ». C’est aussi accepter la déshumanisation du rapport des citoyens avec l’État, qui finira par ne prendre que des décisions automatisées sur sa population comme cela commence à être le cas avec la vidéoverbalisation. La VSA n’est pas une « aide à la décision » mais constitue bien un changement d’échelle dans les capacités de surveillance de l’État.

Khrys’presso du lundi 19 décembre 2022

Par : Khrys
19 décembre 2022 à 01:42

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


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Spécial femmes dans le monde

Spécial France

Spécial femmes en France

Spécial médias et pouvoir

Spécial emmerdeurs irresponsables gérant comme des pieds (et à la néolibérale)

Spécial recul des droits et libertés, violences policières, montée de l’extrême-droite…

Spécial résistances

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Spécial GAFAM et cie

  • Rapport GAFAM Nation – La toile d’influence des géants du web en France (multinationales.org)

    Dépenses de lobbying en augmentation rapide, débauchage de hauts fonctionnaires, contacts à l’Élysée, partenariats financiers avec des médias, des thinks tanks et des institutions de recherche… Plongée dans la redoutable machinerie de lobbying et d’influence déployée en France par les géants du web Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft.

    Voir aussi Ces accès privilégiés des Gafam au pouvoir français (humanite.fr)

    L’Observatoire des multinationales a publié, ce mardi, une étude sur les mille et un vecteurs d’influence dont se servent les géants du numérique pour obtenir des décisions en leur faveur. Entre 2017 et 2021, les dépenses de lobbying de leurs filiales françaises […] sont passées de 1,35 million d’euros à 4,075 millions. Soit une multiplication par trois. « Elles ont également déclaré un total de 72 activités de lobbying (rendez-vous avec des décideurs publics, échanges téléphoniques…) en 2021, contre 15 en 2017. Ces ordres de grandeur situent les Gafam au même niveau que les plus actifs des groupes du CAC 40 en matière de lobbying en France »

  • La Cnil pourrait infliger à Apple une amende de 6 millions d’euros en France (developpez.com)

Spécial Musk et Twitter

Les autres lectures de la semaine

  • Un modeste avis sur ChatGPT (bortzmeyer.org)

    ce que révèle ChatGPT, ce ne sont pas tellement les progrès de l’IA que le creux et l’absence de contenu de beaucoup de textes produits par des humains. ChatGPT sait faire des devoirs d’étudiants de première année, écrire des communiqués de presse, du reporting et produire les discours des ministres.

  • Les algorithmes contre la Sociale (hubertguillaud.wordpress.com)
  • The Autocrat in Your iPhone (foreignaffairs.com)
  • La 5G, un gouffre sans futur (reporterre.net)

    Avec une 6G qui se met doucement en préparation, l’industrie des télécoms spécule à bon train sur les futurs usages révolutionnaires. En plus de ceux, probablement nombreux, que la 5G n’aura pas fait émerger, il faudra compter sur plus de réalité augmentée ou virtuelle à l’heure où la sobriété est nécessaire pour répondre à la crise énergétique et au changement climatique en cours.

  • Utilité publique : « On fonctionne avec un logiciel très vieux qui dit que tous les grands projets sont bons » (basta.media)

    Mégabassines, centres commerciaux, parcs éoliens… Ces grands projets sont souvent réalisés après avoir été déclarés d’utilité publique au terme d’une enquête. Dans son livre Inutilité publique, l’historien Frédéric Graber décrypte ce mécanisme.

  • Les conséquences politiques de l’austérité (blogs.alternatives-economiques.fr)
  • Le capitalisme écocidaire (laviedesidees.fr)

    Karl Marx a souvent été considéré par les mouvements écologistes comme un productiviste, fasciné par le progrès technique et insensible à la nature. Pour J. B. Foster et B. Clark, il est au contraire urgent de réconcilier l’écologie politique avec sa critique du capitalisme.

  • Une revue à un carrefour (terrestres.org)

    En novembre, la revue Écologie et politique publiait un numéro sur les relations entre corps, sexualité et technologie. Intitulé « Les enfants de la machine », ce numéro contient certains articles qui ont suscité de très vifs remous au sein du comité de rédaction. Cette tribune nous explique pourquoi.

  • Comment je n’ai pas tué mon père et combien je le regrette (legrandcontinent.eu)
  • Voyage en uchronie, ou les possibles du passé (theconversation.com)

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Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).

Notation des allocataires: fébrile, la CAF s’enferme dans l’opacité

Par : henri
23 décembre 2022 à 10:59

Extrait du code source de l’algorithme de notation transmis par la CAF.

Alors que la contestation monte (voir ici, ici, ici ou ici) concernant son algorithme de notation des allocataires à des fins de contrôle social, la CAF choisit de se réfugier dans l’opacité tout en adaptant, maladroitement, sa politique de communication. Suite à son refus de communiquer le code source de son algorithme, nous avons saisi la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA).

Comme nous l’expliquions ici, la CAF utilise depuis 2012 un algorithme de profilage attribuant à chaque allocataire une note ou «score de risque». Construite à partir des centaines de données dont la CAF dispose sur chaque allocataire, cette note est ensuite utilisée pour sélectionner celles et ceux qui seront contrôlé·es.

Cet algorithme symbolise l’étendue des dérives de l’utilisation des outils numériques au service de politiques de contrôle social portées par des logiques policières de suspicion généralisée, de tri et d’évaluation continue de chacun de nos faits et gestes.

Ici, comme c’est généralement le cas par ailleurs, ce tri cible les plus précaires. Les rares informations disponibles à ce sujet laissent apparaître que parmi les critères dégradant la note d’un·e allocataire, et augmentant ses chances d’être contrôlé·e, on trouve pêle-mêle : le fait de disposer de faibles revenus, d’habiter dans un quartier défavorisé, d’être une mère célibataire ou encore d’être né·e hors de France.

Pour en avoir le coeur net, nous avons donc demandé à la CAF de nous communiquer le code source de son algorithme1Voir notre demande CADA ici. Et sa réponse est affligeante2Voir la réponse de la CAF ici et le code source caviardé ici..

Sortir de la précarité pour “tromper l’algorithme”

Si la CAF a bien accepté de nous communiquer le code de l’algorithme… ce n’est qu’après avoir masqué la quasi-totalité des noms des variables comme on peut le voir sur l’illustration de cet article, qui est une photo de ce que la CAF nous a répondu.

En d’autres termes, le fichier fourni nous permet simplement d’apprendre combien de critères sont utilisés pour le calcul de la note des allocataires. Rien de plus. Ce qui n’empêche pas la CAF de préciser dans son courrier qu’elle espère que sa communication nous « permettra de comprendre le modèle »3Voir la réponse de la CAF ici et le code source caviardé ici..

Les responsables de la CAF ont toutefois tenu à justifier le caviardage du fichier. Ces dernier·es précisent que le code source a été « expurgé des mentions qui, si elles étaient communiquées, pourraient donner des indications aux fraudeurs pour tromper l’algorithme»4Voir la réponse de la CAF ici et le code source caviardé ici.. Et pour être tout à fait honnête, nous n’étions pas préparé·es à cette réponse.

La CAF croit-elle vraiment que les critères liés à la précarité (situation professionnelle instable, faibles revenus, logement situé dans un quartier défavorisé…) pourraient être modifiés par la seule volonté de l’allocataire? Qu’afin d’augmenter leur note et de « flouer » l’algorithme, des millions d’allocataires pourraient décider, d’un coup, de sortir de la pauvreté?

Ce raisonnement frise l’absurdité. A vrai dire, il est méprisant et insultant pour celles et ceux vivant des situations difficiles.

Pire, le secrétaire général de la CAF entretient publiquement la confusion entre fraudes et erreurs de déclarations involontaires, prenant ainsi le risque de stigmatiser les personnes ciblées par l’algorithme, et ce, dans le seul but de justifier l’opacité de son institution.

En réponse à un journaliste de Radio France5Voir l’émission de Radio France « Secrets d’info » portant sur l’algorithme disponible ici et l’article l’accompagant ici. Sur les déclarations de son secrétaire général, voir notamment à 28:00 pour la justification du refus de communiquer l’algorithme. Voir aussi à 13:40 sur l’aspect “pédagogique” de l’algorithme. Voir 12:30 pour les remarques de Vincent Dubois sur la lutte contre le non-recours. l’interrogeant sur la réponse de la CAF à notre demande, il l’expliquait en disant qu’« il y a un certain nombre de données dont on pense que, si elles sont connues, peuvent nourrir des stratégies de contournement de personnes dont le but c’est de frauder le système ». Et d’ajouter: « Il faut que l’on ait un coup d’avance ».

Faut-il donc lui rappeler que l’algorithme de la CAF n’est pas entraîné à détecter les fraudes mais les erreurs de déclaration, par définition involontaires6Voir notre article présentant l’algorithme de notation des allocataires de la CAF disponible ici.. Et que sa réponse pourrait donc être reformulée ainsi : « Nous ne communiquerons pas le code de l’algorithme de peur que les allocataires arrêtent de faire des erreurs ».

De notre point de vue, cette réponse révèle l’ampleur de l’embarras des responsables de la CAF vis-à-vis de leur algorithme. Ils et elles ont peut-être en tête le scandale entourant un algorithme, en tout point similaire, de notation des allocataires ayant été utilisé aux Pays-Bas et dont les suites ont amené à la démission du gouvernement7Un algorithme similaire a fait l’object d’un scandale retentissant aux Pays-Bas. Discrimantn. Sur ce sujet, voir notamment le rapport “Xenophobic machines: Discrimination through unregulated use of algorithms in the Dutch childcare benefits scandal” publié en 2021 par Amnesty International et disponible ici.?

Déni de justice

Pire, cette opacité est aussi appliquée, à l’échelle individuelle, aux allocataires ayant été séléctionné·es par l’algorithme pour être controlé·es et qui chercheraient à obtenir des informations sur la raison de ce contrôle. Et ce, alors même que la loi prévoit que tout individu ayant fait l’objet d’une décision prise sur le fondement d’un traitement algorithmique (ici le fait d’être contrôlé) a le droit de connaître les données utilisées ainsi que les paramètres de cet algorithme8Voir l’article R-311-3-1-2 du CRPA disponible ici. . Ce qui signifie que les personnes ayant fait l’objet d’un contrôle9En tout état de cause, le fait de ne pas avoir été contrôlé est aussi une décision administrative. Le CRPA donne donc des droits étendus à toute personne ayant été notée, qu’elle ait été contrôlée, ou non. sont censées avoir un droit d’accès plus étendu qu’une association comme la Quadrature.

Nous avons pu consulter la réponse à la demande d’informations réalisée par une personne ayant été contrôlée sur la base de sa note. Le courrier, signé par le délégué à la protection des données de la CNAF, se contente de renvoyer l’allocataire à la page “Internet et Libertés” de la CAF.

Sur cette page sont présents deux documents relatifs à l’algorithme de notation : un communiqué de la CAF et l’avis de la CNIL associé10Le communiqué de la CNAF daté du 27 janvier 2022 et intitulé « Aide à la détermination des dossiers allocataires nécessitant une vérification à l’aide d’un procédé de datamining » est disponible ici. La délibération de la CNIL du 24 mars 2010 est disponible ici. Il est à noter que l’algorithme a à priori grandement évolué depuis la délibération de la CNIL datant de plus de 12 ans. Comme nous l’expliquions ici, la délibération de la CNIl fait notamment référence à un modèle de lutte contre la fraude, alors que l’algorithme est aujourd’hui entraîné pour détecter les erreurs.. Aucun ne fournit d’informations sur les paramètres utilisés par l’algorithme, ni sur leur impact sur le score de risque.

Cette réponse est un déni de justice pour celles et ceux ayant fait l’objet d’un contrôle déclenché algorithmiquement, l’opacité entretenue par la CAF les empếchant de contester juridiquement le bien-fondé du contrôle dont ielles ont fait l’objet.

La discrimination : un savoir-faire à protéger

Nous avions aussi demandé la liste des variables utilisées pour l’entraînement du modèle, c’est à dire sa phase de création. Cette question est importante car elle permet de comprendre l’étendue des données utilisées par l’algorithme. Et donc le degré d’intrusion dans la vie privée des allocataires que la construction d’un tel modèle nécessite.

En effet, en mettant régulièrement en avant dans sa communication que son algorithme n’utilise « que » quelques dizaines de variables11Voir le (faux) Vrai/Faux dans ce document., la CAF fait mine d’ignorer qu’elles sont le fruit d’une sélection qui nécessite l’analyse d’un nombre bien plus grand de variables au préalable12Voir l’article de Pierre Collinet “Focus – Le data mining dans les Caf : une réalité, des perspectives” publié en 2013 et disponible ici. Il est expliqué que l’entraînement de l’algorithme mobilise une base contenant plus de 1000 informations par allocataire. Le modèle final, après entraînement et sélection des variables les plus « intéressantes », se base sur quelques dizaines de variables. Y est aussi expliqué le fait que l’algorithme est entraîné pour détecter les indus et non les cas de fraude. Il est aussi précisé que les techniques de data-mining pourraient être utilisées à des fins de lutte contre le non recours..

Et la justification apportée par les responsables de la CAF est, là aussi, déconcertante. Ces dernier·es avancent que la communication de ces variables n’est pas possible car elles constituent un « savoir-faire »13Voir la réponse de la CAF ici et le code source caviardé ici.. La CAF souhaiterait-elle monétiser son algorithme et le revendre à d’autres administrations ? Penserait-elle pouvoir équiper les équipes de contrôleurs.ses des institutions sociales du monde entier de son algorithme assimilant les plus précaires à de potentiel·le·s fraudeurs ou fraudeuses?

A défaut de réponse, nous nous en remettons à ce que, techniquement, tout·e data-scientist ferait pour entraîner un modèle le plus « précis » possible. Il suffirait de partir de l’intégralité des variables à sa disposition et, par itérations successives, décider lesquelles garder pour le modèle final. Dans cette hypothèse, ce serait alors la quasi-totalité des variables détenues par la CAF sur chaque allocataire qui serait utilisée pour l’entraînement de son modèle.

Ceci serait cohérent avec un document publié en 2013 dans lequel un statisticien de la CAF que « les statisticiens chargés de la modélisation disposaient d’environ un millier d’informations par allocataire contrôlé » et que « la base d’apprentissage contient toutes les données habituelles des fichiers statistiques »14Voir l’article de Pierre Collinet “Focus – Le data mining dans les Caf : une réalité, des perspectives” publié en 2013 et disponible ici. Il est expliqué que l’entraînement de l’algorithme mobilise une base contenant plus de 1000 informations par allocataire. Le modèle final, après entraînement et sélection des variables les plus « intéressantes », se base sur quelques dizaines de variables. Y est aussi expliqué le fait que l’algorithme est entraîné pour détecter les indus et non les cas de fraude. Il est aussi précisé que les techniques de data-mining pourraient être utilisées à des fins de lutte contre le non recours..

Vingt ans de développement… et aucun compte-rendu de réunions

Quant à notre demande relative aux documents internes (notes, comptes-rendus, échanges…) concernant le développement de l’algorithme, la CAF nous a tout simplement répondu qu’en presque 20 ans de travail aucune réunion technique n’a fait l’objet de compte-rendu…15Voir la réponse de la CAF ici et le code source caviardé ici.

Pour être tout à fait honnête, c’est une première dans l’histoire de nos demandes CADA.

Le retour de l’alibi technique

A ceci s’ajoute, depuis le début de l’année, la mise en place de ce qui apparaît comme une véritable communication de crise par l’institution autour de son algorithme. En juin 2022, la CAF a notamment publié un communiqué intitulé « Contrôle et datamining » dans lequel elle tente de répondre aux critiques soulevées par son algorithme16Le document, publié sur le site de la CAF, est disponible ici..

A sa lecture, on prend toute la mesure du rôle d’alibi technique à une politique de contrôle discriminatoire que joue l’algorithme, ce que nous dénoncions déjà ici.

L’algorithme y est décrit comme étant un objet purement scientifique dont le caractère politique est nié. Il est ainsi expliqué que la note des allocataires est le fruit d’une « démarche scientifique d’étude statistique […] menée par des experts » se fondant sur des critères « scientifiquement pondérés » ayant été sélectionnés « sur seuls critères statistiques ». Le secrétaire général de la CAF ajoute17Voir l’émission de Radio France « Secrets d’info » portant sur l’algorithme disponible ici et l’article l’accompagant ici. Sur les déclarations de son secrétaire général, voir notamment à 28:00 pour la justification du refus de communiquer l’algorithme. Voir aussi à 13:40 sur l’aspect “pédagogique” de l’algorithme. Voir 12:30 pour les remarques de Vincent Dubois sur la lutte contre le non-recours. de son côté que cet outil serait un « miroir des situations statistiques » servant à identifier des « environnements de risques ».

Ce faisant, les responsables de la CAF cherchent à nier leur responsabilité (politique) dans la conduite, et la validation, d’une politique de contrôle discriminatoire. Nul part n’apparaît que que si les erreurs se concentrent sur les plus précaires, c’est tout simplement parce qu’au fil des ans se sont multipliées les règles et contraintes encadrant l’accès aux minima sociaux, et ce, dans le seul but de restreindre leur accessibilité18Vincent Dubois, 2021. « Contrôler les assistés. Genèses et usage d’un mot d’ordre ». Sur le sur-contrôle des populations les plus précaires, voir chapitre 10. Sur l’histoire politique de la ‘lutte contre l’assistanat’, et le rôle majeur que joua en France Nicolas Sarkozy, voir le chapitre 2. Sur l’évolution des politiques de contrôles, leur centralisation suite à l’introduction de l’algorithme et la définition des cibles, voir pages 177 et 258. Sur la contestation des plans nationaux de ciblages par les directeurs de CAF locales, voir page 250. Voir aussi le rapport « Politique de contrôle et lutte contre la fraude dans la branche Famille » publié en 2016 et écrit par Vincent Dubois, Morgane Paris et Pierre Edouard Weil, disponible ici..

On mesure enfin l’impact des logiques gestionnaires appliquées aux institutions sociales. Logiques réduisant des millions de vies et d’histoires, à de simples notions statistiques, déshumanisantes, froides et vides de sens.

Communication mensongère

La deuxième partie du document est consacrée à un « Vrai/Faux » portant sur l’algorithme où transpire la malhonnêteté intellectuelle.

A l’affirmation « Les scores de risques les plus élevés concernent toujours les plus pauvres », la CAF répond Faux car « les scores de risques sont calculés pour tous les allocataires ». Ce qui n’a tout simplement aucun sens…

A la question « Les contrôleurs sont payés aux résultats », la CAF répond que ce serait faux, bien qu’elle admette que l’Etat lui fixe bien un objectif à atteindre en termes de détection de fraude. Ici encore, l’institution joue avec les mots. S’il est vrai que les contrôleurs.ses n’ont pas de «prime sur leurs résultats», ils et elles touchent un intéressement, tout comme l’ensemble du personnel de la CAF, dont le montant dépend bien de l’atteinte de ces objectifs de contrôle19Voir par exemple l’annexe d’intéressement 2021 (ici) de la CAF spécifiant un objectif de fraudes détectées et un objectif de taux de recouvrement des indus non frauduleux. La tenue de ces objectifs impacte directement la prime d’intéressement des employé.e.s de la CAF..

A la question « Plus de 1000 données concernant les allocataires sont utilisées dans le modèle de datamining des CAF », la CAF répond que seules une quarantaine seraient utilisées. Elle détourne ainsi la question puisque – comme expliqué ci-dessus – elle omet de dire que ces quarante variables sont sélectionnées après une phase d’entraînement du modèle qui nécessite l’utilisation, et le traitement, de plus de mille variables par allocataire20Voir l’article de Pierre Collinet “Focus – Le data mining dans les Caf : une réalité, des perspectives” publié en 2013 et disponible ici. Il est expliqué que l’entraînement de l’algorithme mobilise une base contenant plus de 1000 informations par allocataire. Le modèle final, après entraînement et sélection des variables les plus « intéressantes », se base sur quelques dizaines de variables. Y est aussi expliqué le fait que l’algorithme est entraîné pour détecter les indus et non les cas de fraude. Il est aussi précisé que les techniques de data-mining pourraient être utilisées à des fins de lutte contre le non recours..

Enfin, aux questions « Les contrôleurs de la Caf ont accès à toutes les infos qu’ils souhaitent à l’insu des allocataires », et « Les allocations sont suspendues pendant le contrôle », la CAF répond que non car « aucune demande n’est faite à d’autres administrations, sans en avoir averti auparavant l’allocataire, aucune procédure vis-à-vis d’un tiers n’est engagée à l’insu de celui-ci.» Et ajoute que, lors d’un contrôle, « les allocations ne sont pas suspendues ».

Sur ces deux derniers points, nous vous invitons à lire les témoignages collectés par le Défenseur des Droits, les collectifs « Stop Contrôles », « Changer de Cap » et différentes associations de lutte contre la précarité21Voir à ce sujet l’article de Lucie Inland disponible ici, cet article du Monde et le rapport du Défenseur des Droits «La lutte contre la fraude aux prestations sociales» disponible ici. La fondation Abbé Pierre, le Défenseur des droits et le collectif Changer de Cap ont par ailleurs collecté de nombreux témoignages décrivant la violence vécue par les allocataires lors des contrôles. Difficulté de recours, contrôles répétés, suspension automatique des prestations sociales, intrusion sans précédent dans les moindres recoins de la vie privée. Nous vous invitons à lire l’ensemble de ces témoignages disponibles ici. Voir aussi l’émission de Radio France « Secrets d’info » revenant sur ces questions et disponible ici et l’article l’accompagant ici. qui alertent depuis des années sur les suspensions abusives d’allocations pendant les contrôles et les pratiques invasives (consultation des comptes bancaires, relevés d’électricité, analyse de l’adresse IP etc…) des contrôleurs·ses de la CAF à l’insu des allocataires.

Fraude à enjeux et lutte contre le non-recours : des contre-feux médiatiques

A ceci s’ajoute diverses annonces de la CAF participant à nourrir une stratégie de diversion médiatique autour de son algorithme de notation.

Dans son dernier rapport annuel sur la « lutte contre la fraude », nulle référence n’est faite à l’algorithme alors que celui-ci était mis à l’honneur, en première page, l’année précédente. La CAF précisant au passage qu’il était loué par la Cour des Comptes et l’Assemblée Nationale.

A sa place, la CAF a préféré cette année mettre en avant son équipe de contrôleur.ses dédiée à la « lutte contre la fraude à enjeux »22Voir notamment ici, ici et ici., c’est à dire des fraudes organisées (usurpation d’identités, faux documents, fraude au RIB) à grande échelle. Soit 30 agentes et agents qui d’après les dires de la CAF sont, ni plus ni moins, chargé·es de « protéger le système de sécurité sociale français des risques de pillage » et qui font rentrer la CAF dans « une nouvelle dimension de la lutte contre la fraude »23Voir notamment ici, ici et ici..

A titre de comparaison, nous tenons à rappeler que ce sont pas moins de 700 contrôleuses et contrôleurs qui, guidé·es par son algorithme discriminatoire, sont chargé·es de traquer les moindre erreurs de déclaration faites par les plus précaires.

Deuxième angle d’attaque : la mise en avant de l’utilisation d’algorithmes de profilage à des fins de lutte contre le non-recours24Voir notamment ce tweet.. Comme si l’application des techniques de profilage à des fins «positives» pouvait justifier leur application à des fins répressives. Sur ce sujet, la CAF omet pourtant de dire le plus important : depuis maintenant plus de 10 ans, elle a systématiquement favorisé l’application de ces techniques à des fins de contrôle plutôt que de lutte contre le non-recours.

Ses équipes de « data-scientist » regrettaient dès 2013 que les techniques de profilage des allocataires soient uniquement utilisées à des fins de contrôle et non de lutte contre le non recours25Voir l’article de Pierre Collinet “Focus – Le data mining dans les Caf : une réalité, des perspectives” publié en 2013 et disponible ici. Il est expliqué que l’entraînement de l’algorithme mobilise une base contenant plus de 1000 informations par allocataire. Le modèle final, après entraînement et sélection des variables les plus « intéressantes », se base sur quelques dizaines de variables. Y est aussi expliqué le fait que l’algorithme est entraîné pour détecter les indus et non les cas de fraude. Il est aussi précisé que les techniques de data-mining pourraient être utilisées à des fins de lutte contre le non recours.. Cette réalité est rappelée dans un rapport de l’Assemblée Nationale daté de 2016 qui précise que « l’extension explicite de l’usage du data mining à d’autres fins, notamment celle de lutte contre le non-recours, était envisageable dès l’origine, mais cette possibilité a été écartée, au moins dans les premières années d’utilisation de cet outil »26Rapport d’information de l’Assemblée Nationale sur l’évaluation des politiques publiques en faveur de l’accès aux droits sociaux, 2016. Disponible ici. Il aura fallu attendre 2017 pour que la CAF commence à mener des expérimentations, et il semblerait qu’aujourd’hui le profilage contre le non-recours est limité à la prime d’activité et l’allocation de soutien familial27Voir le tome 1 du rapport « Garantir un numérique inclusif : les réponses apportées par les opérateurs de la protection sociale » de l’ Inspection Générale des Affaires Sociales écrit en 2019 et disponible ici. Voir aussi le rapport de la DREES « Le non-recours aux prestations sociales » écrit en 2020 et disponibstyle= »pointer-events: none; » le ici et l’émission de Radio France ici ou ici pour l’article correspondant..

Le sociologue Vincent Dubois ajoute que cette situation « interroge sur la réalité des slogans institutionnels “tous les droits rien que les droits” qui en fait est beaucoup plus tournée vers l’identification des indus, frauduleux ou non, que vers les cas de non-recours qui sont en fait beaucoup plus nombreux »28Voir l’émission de Radio France « Secrets d’info » portant sur l’algorithme disponible ici et l’article l’accompagant ici. Sur les déclarations de son secrétaire général, voir notamment à 28:00 pour la justification du refus de communiquer l’algorithme. Voir aussi à 13:40 sur l’aspect “pédagogique” de l’algorithme. Voir 12:30 pour les remarques de Vincent Dubois sur la lutte contre le non-recours..

En tout état de cause, l’histoire politique de l’utilisation par la CAF des techniques de profilage à des fins de lutte contre le non-recours ne semble pas très glorieuse.

Ce dernier point interroge aussi sur le fantasme entretenu autour de l’automatisation de l’état social pour répondre aux problèmes sociaux. A l’heure où le gouvernement lance l’expérimentation d’un « RSA sous conditions », la mise en avant de solutions techniques pour lutter contre le non-recours dépolitise la question de l’accès aux droits. Tout en taisant les problèmes que génèrent, pour des millions de personnes, la dématérialisation des services publics.

Enfin, la CAF a annoncé en grande pompe la nomination d’une médiatrice nationale chargée, entre autres, des questions de données personnelles à la CNAF29Voir le communiqué de nomination de la médiatrice nationale de la CNAF ici. en juin 2022. Parmi ses missions: «la protection des données et de la sécurité des usagers dans le cadre des systèmes d’information.» Et le communiqué accompagnant sa nomination ajoute qu’elle «sera également la référente nationale déontologie». Nous serions plus que ravi·es d’entendre son avis sur l’algorithme de notation de la CAF.

Lutter au-delà de la transparence

La transparence que nous exigeons auprès de la CAF ne doit pas masquer le fond du problème. En un sens, ce que nous savons déjà de l’algorithme de cette institution, sans même avoir eu accès à son code, nous suffit à nous y opposer.

La transparence n’est donc pas une fin en soi : c’est un moyen que nous souhaitons mobiliser pour mettre en lumière, et critiquer, un discours politique cherchant à légitimer la volonté de contrôle d’un appareil étatique via l’entretien d’un discours de suspicion généralisée et la stigmatisation de certaines catégories de la population.

Volonté de contrôle qui, hélas, profite aujourd’hui de la puissance des outils numériques et de l’exploitation de nos données personnelles afin de toujours plus nous évaluer et, ainsi, nous trier.

A l’heure où un nombre toujours plus grand d’institutions, sociales et policières, mettent en place de telles solutions de surveillance algorithmique, nous continuerons de les documenter et de faire ce que nous pouvons, à notre niveau, pour les contrer.

Au côté des collectifs Stop Contrôles, Changer de Cap et de toutes les associations et collectifs de lutte contre la précarité qui font face, depuis des années, aux dérives du tout numérique et au développement sans limite des politiques de contrôle social, nous espérons que vous serez nombreux.ses à nous rejoindre.

Enfin, nous ne doutons pas que ce sentiment d’injustice est partagé par la plupart des employé·es de la CAF. C’est pourquoi nous tenons à encourager celles et ceux qui, révolté·es par ces pratiques, pourraient nous aider à les documenter. Vous pouvez nous contacter par mail, téléphone, en venant nous rendre visite ou déposer de manière anonyme des documents sur notre SecureDrop. A l’heure où les responsables de la CAF font le choix de l’opacité, nous avons plus que jamais besoin de vous.

References[+]

References
1 Voir notre demande CADA ici
2, 3, 4, 13, 15 Voir la réponse de la CAF ici et le code source caviardé ici.
5, 17, 28 Voir l’émission de Radio France « Secrets d’info » portant sur l’algorithme disponible ici et l’article l’accompagant ici. Sur les déclarations de son secrétaire général, voir notamment à 28:00 pour la justification du refus de communiquer l’algorithme. Voir aussi à 13:40 sur l’aspect “pédagogique” de l’algorithme. Voir 12:30 pour les remarques de Vincent Dubois sur la lutte contre le non-recours.
6 Voir notre article présentant l’algorithme de notation des allocataires de la CAF disponible ici.
7 Un algorithme similaire a fait l’object d’un scandale retentissant aux Pays-Bas. Discrimantn. Sur ce sujet, voir notamment le rapport “Xenophobic machines: Discrimination through unregulated use of algorithms in the Dutch childcare benefits scandal” publié en 2021 par Amnesty International et disponible ici.
8 Voir l’article R-311-3-1-2 du CRPA disponible ici.
9 En tout état de cause, le fait de ne pas avoir été contrôlé est aussi une décision administrative. Le CRPA donne donc des droits étendus à toute personne ayant été notée, qu’elle ait été contrôlée, ou non.
10 Le communiqué de la CNAF daté du 27 janvier 2022 et intitulé « Aide à la détermination des dossiers allocataires nécessitant une vérification à l’aide d’un procédé de datamining » est disponible ici. La délibération de la CNIL du 24 mars 2010 est disponible ici. Il est à noter que l’algorithme a à priori grandement évolué depuis la délibération de la CNIL datant de plus de 12 ans. Comme nous l’expliquions ici, la délibération de la CNIl fait notamment référence à un modèle de lutte contre la fraude, alors que l’algorithme est aujourd’hui entraîné pour détecter les erreurs.
11 Voir le (faux) Vrai/Faux dans ce document.
12, 14, 20, 25 Voir l’article de Pierre Collinet “Focus – Le data mining dans les Caf : une réalité, des perspectives” publié en 2013 et disponible ici. Il est expliqué que l’entraînement de l’algorithme mobilise une base contenant plus de 1000 informations par allocataire. Le modèle final, après entraînement et sélection des variables les plus « intéressantes », se base sur quelques dizaines de variables. Y est aussi expliqué le fait que l’algorithme est entraîné pour détecter les indus et non les cas de fraude. Il est aussi précisé que les techniques de data-mining pourraient être utilisées à des fins de lutte contre le non recours.
16 Le document, publié sur le site de la CAF, est disponible ici.
18 Vincent Dubois, 2021. « Contrôler les assistés. Genèses et usage d’un mot d’ordre ». Sur le sur-contrôle des populations les plus précaires, voir chapitre 10. Sur l’histoire politique de la ‘lutte contre l’assistanat’, et le rôle majeur que joua en France Nicolas Sarkozy, voir le chapitre 2. Sur l’évolution des politiques de contrôles, leur centralisation suite à l’introduction de l’algorithme et la définition des cibles, voir pages 177 et 258. Sur la contestation des plans nationaux de ciblages par les directeurs de CAF locales, voir page 250. Voir aussi le rapport « Politique de contrôle et lutte contre la fraude dans la branche Famille » publié en 2016 et écrit par Vincent Dubois, Morgane Paris et Pierre Edouard Weil, disponible ici.
19 Voir par exemple l’annexe d’intéressement 2021 (ici) de la CAF spécifiant un objectif de fraudes détectées et un objectif de taux de recouvrement des indus non frauduleux. La tenue de ces objectifs impacte directement la prime d’intéressement des employé.e.s de la CAF.
21 Voir à ce sujet l’article de Lucie Inland disponible ici, cet article du Monde et le rapport du Défenseur des Droits «La lutte contre la fraude aux prestations sociales» disponible ici. La fondation Abbé Pierre, le Défenseur des droits et le collectif Changer de Cap ont par ailleurs collecté de nombreux témoignages décrivant la violence vécue par les allocataires lors des contrôles. Difficulté de recours, contrôles répétés, suspension automatique des prestations sociales, intrusion sans précédent dans les moindres recoins de la vie privée. Nous vous invitons à lire l’ensemble de ces témoignages disponibles ici. Voir aussi l’émission de Radio France « Secrets d’info » revenant sur ces questions et disponible ici et l’article l’accompagant ici.
22, 23 Voir notamment ici, ici et ici.
24 Voir notamment ce tweet.
26 Rapport d’information de l’Assemblée Nationale sur l’évaluation des politiques publiques en faveur de l’accès aux droits sociaux, 2016. Disponible ici
27 Voir le tome 1 du rapport « Garantir un numérique inclusif : les réponses apportées par les opérateurs de la protection sociale » de l’ Inspection Générale des Affaires Sociales écrit en 2019 et disponible ici. Voir aussi le rapport de la DREES « Le non-recours aux prestations sociales » écrit en 2020 et disponibstyle= »pointer-events: none; » le ici et l’émission de Radio France ici ou ici pour l’article correspondant.
29 Voir le communiqué de nomination de la médiatrice nationale de la CNAF ici.

Khrys’presso du lundi 12 décembre 2022

Par : Khrys
12 décembre 2022 à 01:42

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Spécial Annie Ernaux et le prix Nobel de Littérature

  • Prix Nobel : Écrire pour “Venger ma race et venger mon sexe”, le discours poignant d’Annie Ernaux (telerama.fr)

    Aucun choix d’écriture ne va de soi. Mais ceux qui, immigrés, ne parlent plus la langue de leurs parents, et ceux qui, transfuges de classe sociale, n’ont plus tout à fait la même, se pensent et s’expriment avec d’autres mots, tous sont mis devant des obstacles supplémentaires. […] j’ai adopté, à partir de mon quatrième livre, une écriture neutre, objective, “plate” en ce sens qu’elle ne comportait ni métaphores, ni signes d’émotion. La violence n’était plus exhibée, elle venait des faits eux-mêmes et non de l’écriture. Trouver les mots qui contiennent à la fois la réalité et la sensation procurée par la réalité allait devenir, jusqu’à aujourd’hui, mon souci constant en écrivant, quel que soit l’objet. […] C’est ainsi que j’ai conçu mon engagement dans l’écriture, lequel ne consiste pas à écrire “pour” une catégorie de lecteurs, mais “depuis” mon expérience de femme et d’immigrée de l’intérieur, depuis ma mémoire désormais de plus en plus longue des années traversées, depuis le présent, sans cesse pourvoyeur d’images et de paroles des autres. Cet engagement comme mise en gage de moi-même dans l’écriture est soutenu par la croyance, devenue certitude, qu’un livre peut contribuer à changer la vie personnelle, à briser la solitude des choses subies et enfouies, à se penser différemment. Quand l’indicible vient au jour, c’est politique.

  • Annie Ernaux : un engagement qui dérange (en-attendant-nadeau.fr)

    Le 10 décembre prochain, Annie Ernaux recevra le prix Nobel de littérature et prononcera à cette occasion son discours de réception. Mais d’ores et déjà, la première écrivaine française récompensée est la cible d’attaques injustifiées concernant ses engagements politiques, qu’il est urgent de dénoncer mais dont il faut aussi comprendre la signification plus profonde.

  • « Le prix Nobel de littérature est devenu le prix Nobel de l’idéologie », estime Alain Finkielkraut (lefigaro.fr)
  • Ernaux à Stockholm, Houellebecq, Finkielkraut et Bruckner en PLS (radiofrance.fr)

Spécial médias et pouvoir

Spécial emmerdeurs irresponsables gérant comme des pieds (et à la néolibérale)

Spécial recul des droits et libertés, violences policières, montée de l’extrême-droite…

Spécial résistances

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Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

  • La neutralité du Net face à l’évolution des réseaux (interstices.info)
  • Internet sera-t-il quantique ? (theconversation.com)
  • Antonio Casilli : « De sujets coloniaux à des “data subjects” » (humanite.fr)
  • Si c’est cher, c’est (aussi) vous le produit (zdnet.fr)

    La gratuité n’a plus l’apanage de la captation de données. Et si les robots ménagers peuvent nous faciliter la vie, ils ne sont pas forcément sans risque pour notre vie privée.

  • L’intelligence artificielle, une précarisation de l’emploi plus qu’une destruction (liberation.fr)
  • From Mars to metaverse : How Elon Musk is building a sci-fi world (economictimes.indiatimes.com – article de 2021)

    The metaverse is at once an illustration of and a distraction from a broader and more troubling turn in the history of capitalism. The world’s techno-billionaires are forging a new kind of capitalism : Muskism. […] Much of Muskism is descended from the technocracy movement that flourished in North America in the 1930s and that had as a leader Mr. Musk’s grandfather Joshua N. Haldeman, an ardent anti-communist. Like Muskism, technocracy took its inspiration from science fiction and rested on the conviction that technology and engineering can solve all political, social and economic problems.

  • Imprinting the economy : The structural power of venture capital (journals.sagepub.com)

    To link the digital economy to its financiers, I propose the term imprinting, which is based on an—as I argue, so far underexploited—aspect of structural power, namely the power to structure. Imprinting describes how based on their role as capital’s gatekeepers, financial actors shape businesses according to their logic, manifesting in, amongst others, the business model, valuation, organization, or choice of technology of a company.

  • Trains (grisebouille.net)

    On n’a pas besoin d’un nouveau réseau RER : on a besoin d’un financement conséquent pour rénover l’existant et augmenter la cadence et la capacité des trains. […] en pratique, un train, ça devrait jamais être complet. Ça devrait être plein à 95 % dans les cas extrêmes, et à moitié vide en général. Oui, c’est pas optimal. Ça devrait pas l’être. Comme les lits dans les hôpitaux, quelque part : l’optimisation, elle se fait toujours au détriment des gens. […] Est-ce que les cadres de la SNCF sont au courant qu’on s’en bat les reins de leur segmentation de l’offre et de leurs différentes marques de mes deux ? Je sais, ça prépare l’ouverture à la concurrence, tout ça. Dont on se tape aussi, en fait. Qui est-ce que ça fait rêver, à part les trois excités du marché libre qui continuent de mouiller leurs slips en sabordant nos services publics pour un dogme qui n’a jamais marché ?

  • Mines de lithium : faut-il préserver la France et continuer à détruire le Chili ou la Bolivie ? (basta.media)
  • On ne va pas y aller avec des fleurs – Violence politique : des femmes témoignent (lundi.am)

    Dans un système qui exploite et qui détruit, c’est normal d’être combattant. Contre la destruction, il faut se battre.

  • Dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, la mort de Malik Oussekine et d’Abdel Benyahia (contre-attaque.net)

    C’était il y a 36 ans, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986. Malik Oussekine, jeune étudiant parisien âgé de 22 ans, est froidement assassiné par trois voltigeurs, des policiers à moto, matraqué jusqu’à la mort dans l’ombre d’un hall d’immeuble. Le même jour, Abdel Benyahia est lui aussi victime du tir mortel d’un policier hors service.

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Khrys’presso du lundi 5 décembre 2022

Par : Khrys
5 décembre 2022 à 01:42

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Spécial médias et pouvoir

  • Violences faites aux femmes (humanite.fr)

    Vendredi dernier, c’était la journée contre les violences faites aux femmes. Elle commence mal. J’écoute la radio et j’entends toujours les mêmes éditorialistes, chroniqueurs qui parlent, parlent… Dans la matinale de France Inter entre 5 heures et 9 heures du matin, 17 chroniqueurs hommes, 6 femmes. Les éditorialistes géopolitiques, économiques, hommes, hommes, hommes… En filigrane, la même façon de pensée : compétition mais surtout acceptation de l’ordre établi. Le respect du pouvoir et de la force. L’État, la guerre, ils ne les remettent jamais en question. « Pour des siècles et des siècles » semble être leur devise. Dominique Seux, Thomas Piketty, Pierre Haski, open bar. Tous les jours, des hommes ont la parole pendant des heures. Je me sens accablée, je ne pense pas comme eux. Où sont les femmes spécialistes de ces sujets ?

  • Mâles à droite (humanite.fr)

    Voilà une belle une du Figaro Magazine, avec six mâles blancs dominants en costume bleu et avec cette interrogation dont il faut supposer qu’elle trouble le sommeil de ses lectrices et lecteurs. « Y a-t-il quel­qu’un pour sauver la droite ?  […] Mais pourquoi, diable, se dit-on, faudrait-il sauver la droite, et laquelle, alors même qu’elle est au pouvoir ? Il manque quelqu’un sur la photo, qui est « en même temps » de droite et de droite. Eh oui, mais c’est bien ça le problème des mâles à droite.

  • Plans sociaux, Annie Ernaux vilipendée sur France Culture, désinformation et compagnie : revue de presse de la semaine (acrimed.org)

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Spécial Antifa vs FNAC

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Khrys’presso du lundi 28 novembre 2022

Par : Khrys
28 novembre 2022 à 01:42

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  • Cinquième recours au 49.3 en 6 mois – Macron champion du passage en force (contre-attaque.net)
  • Chômage : le gouvernement a menti, passe en force et punit les chômeurs (rapportsdeforce.fr)

    Un mois et demi de concertation pour passer en force. Malgré l’opposition de l’ensemble des syndicats de salariés à la modulation des allocations chômage, le gouvernement n’a rien écouté et présente un projet de réforme plus dur qu’annoncé initialement et particulièrement punitif pour les demandeurs d’emploi de plus de 50 ans.

  • Valentin, privé arbitrairement de RSA (humanite.fr)

    Faute du minimum de ressources auxquelles il a droit, le jeune photographe s’enfonce dans la spirale de la précarité. Indigné, il a décidé de se battre et de prendre la parole au nom de ceux qui n’ont pas la possibilité de le faire.« Apparemment, le nouveau logiciel des CAF n’y est pas pour rien. L’État fait des économies sur le dos des plus fragiles qui ne peuvent pas se défendre. Il faut agir collectivement »

  • En France, les expulsions augmentent (reporterre.net)

    Les expulsions augmentent en France, selon le dernier rapport annuel de l’Observatoire des expulsions. L’organisme a recensé 2 078 expulsions en métropole entre le 1er novembre 2021 et le 31 octobre 2022, veille de la trêve hivernale. Ce chiffre, obtenu grâce à une veille médiatique et aux signalements effectués par les associations partenaires de l’Observatoire, a augmenté de plus de 50 % en un an.

  • Comment la loi « Séparatisme » permet aux préfectures de frapper les associations au porte-monnaie (basta.media)

    La loi séparatisme votée en 2021 dans un contexte de lutte contre l’islamisme radical permet aussi au ministère de l’Intérieur de s’attaquer à des associations qui prônent la désobéissance civile ou mènent des actions de contestation.

  • Le gouvernement rêve de policiers « cyborgs » (reporterre.net)

    Dans un communiqué publié fin octobre, lors des tractations sur le projet de loi, l’Observatoire des libertés et du numérique a décrié une projection « délirante », faisant la promotion d’une vision « fantasmée » du métier de policier, réduit à l’état « d’agent-cyborg ».

  • Les salariés de Sanofi veulent négocier, ils sont accueillis par les CRS (humanite.fr)

    Salaires, embauches : la direction du géant pharmaceutique ne semble plus vouloir en entendre parler. Et elle le signifie à coups de matraque et de gaz lacrymogène…

  • Chronique de la sauvagerie policière (contre-attaque.net)

    Samedi 19 novembre à Paris : les Gilets Jaunes fêtent leur 4 ans. […] Ce 19 novembre, le cortège est cadenassé par un énorme dispositif policier.Il ne se passe absolument rien, mais cela n’empêche pas les miliciens de se défouler. Un coup est donné en plein visage à un homme par un agent, suivi d’une charge aussi brutale que gratuite.

  • Violences policières sur Arthur Naciri : la justice marque le coup à Lyon (rue89lyon.fr)

    Ce jeudi 24 novembre, la présidente du tribunal correctionnel est allée au delà des réquisitions du procureur dans l’affaire Arthur Naciri. Dans ce dossier emblématique des violences policières à Lyon, elle a condamné les deux agents ayant frappé le jeune homme, en décembre 2019, à douze mois de prison avec sursis. L’avocat des deux policiers a annoncé vouloir faire appel.

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Khrys’presso du lundi 21 novembre 2022

Par : Khrys
21 novembre 2022 à 01:42

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  • Parce que le monde numérisé grandit chaque jour en étendue et en complexité, parce que les dispositifs de contrôle et de surveillance entrent chaque année plus loin dans l’intimité de nos vies, soutenez l’association qui défend « nos droits et nos libertés à l’ère du numérique » : faites un don à La Quadrature du Net ! (laquadrature.net)

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Khrys’presso du lundi 14 novembre 2022

Par : Khrys
14 novembre 2022 à 01:42

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Spécial femmes dans le monde

  • Abortion Rights Win in Several Statewide Ballot Initiative Contests (truthout.org)

    Three states — Michigan, Vermont and California — had pro-abortion measures on the ballot alongside regular midterm election contests. Montana and Kentucky had anti-abortion measures on the ballot, which voters appear to have rejected. […] The Michigan amendment faced obstacles at almost every turn — even after enough ballot drive signatures had been attained, GOP officials on the Board of State Canvassers mounted legal challenges against the measure in an attempt to exclude it from the ballot. The Michigan Supreme Court ultimately intervened, ruling in September that residents should be able to vote on the amendment.

  • The First Female Crash Dummy Has Arrived (smithsonianmag.com)

Spécial France

Spécial femmes en France

  • Le 93 en avance contre les violences faites aux femmes (humanite.fr)

    L’Observatoire des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis, structure pionnière en France, souffle ses vingt bougies d’existence. « Ce que nous expérimentons en Seine-Saint-Denis se généralise », […] « Nous avons voulu montrer l’ampleur des violences faites aux femmes, qui touchent tous les milieux sociaux, et alerter de la dangerosité des hommes violents »

  • Humanitaire : Saint-Denis pousse l’association MaMaMa dehors (politis.fr)

    L’association d’aide aux mères précaires basée à Saint-Denis risque d’être expulsée de ses locaux dans deux mois. Le résultat d’une longue séquence de tensions avec la mairie socialiste.

  • La belle saison des autrices françaises (humanite.fr)

    Après Brigitte Giraud, lauréate du Goncourt la semaine dernière, Claudie Hunzinger et Emmanuelle Bayamack-Tam ont obtenu le Femina et le Médicis.

  • Sociologie : tout ce que le suivi gynécologique dit de notre société (humanite.fr)

    Comment se construit la « norme gynécologique », le contrôle du corps des femmes ? Pourquoi l’andrologie est-elle si peu développée ? Qu’est-ce qui fait que la charge de la contraception repose encore très nettement seulement sur les femmes ?

  • La constitutionnalisation de l’IVG franchit une première étape (humanite.fr)

    Déposée par le groupe Renaissance, et défendue par la députée macroniste, Aurore Bergé, la proposition de loi constitutionnelle sur le droit à l’IVG a été adoptée par la commission des Lois de l’Assemblée nationale ce mercredi. Une première victoire pour cette mesure de longue date défendue par la gauche et rejetée à plusieurs reprises par la majorité lors du précédent mandat.

  • Pourquoi il faut revoir « Histoires d’A » (politis.fr)
  • Femme voilée dans un calendrier des Armées : « C’est un honneur d’avoir été sélectionnée » (liberation.fr)

    Accusé par l’extrême droite d’avoir présenté une femme portant le voile sur un calendrier, le ministère des Armées a dénoncé une fake news, avant de rétropédaler. La femme est une employée djiboutienne récompensée en 2021 pour ses nombreuses années de travail pour les forces françaises.

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De la friture sur le Fediverse ?

Par : Framalang
13 novembre 2022 à 04:06

Nous vous avons proposé déjà trois articles qui font écho à l’actualité récente autour de Mastodon en voici un 4e, celui d’Aral Balkan, traduit pour vous par Framalang. Le héraut du SmallWeb insiste avec humour sur un point en effet crucial : la taille géante de certaines instances, due à la conception technique même du Fédiverse, risque d’être problématique…

Donc, après :

Voici Is the fediverse about to get Fryed ?

Traduction Framalang :  Claire, Fabrice, goofy, Henri-Paul, jums

Le Fédiverse va-t-il stephenfrire ?

(Ou « Pourquoi chaque pouet est aussi potentiellement une attaque par déni de service »)

par Aral Balkan

bandeau du compte mastodon de Fry, avec sa tête (homme âgé barbu souriant) en médaillon. le compte annonce (au moment de sa capture 5 pouets, 0 abonnements 27 000 abonnés"

Stephen Fry est une célébrité outre-Manche  : écrivain, humoriste, acteur et vedette de la TV (sa page Wikipédia)

 

Stephen est un gros poisson dans une petite mare (oui, j’en ai d’autres en réserve).

Attention : le Fédivers est sur le point de frire. Stephen Fry(re) bien sûr.

À la suite du récent rachat de Twitter par un milliardaire proto-fasciste immature, des gens ont fui1 vers le Fédiverse2. Parmi eux, certains avaient, au moins sur Twitter, des millions de followers, comme Greta Thunberg et, plus récemment, Stephen Fry3

— Eh bien, c’est sûrement une bonne chose, non ? Tout le monde va parler du Fédiverse, de la décentralisation, et peut-être même de ce Small Web dont tu parles tout le temps, Aral, non ?

Eh bien, oui et non… Trop de bonnes choses tue les bonnes choses. Et, dans le Fédiverse actuel, les bonnes choses seraient les « comptes populaires ». En fait, cela pourrait bien être fatal (pour les instances Mastodon). Je vais essayer de détailler dans cet article ce que je veux dire en prenant mon propre compte comme exemple.

Comment tuer un Mastodon(te)

(indice : en étant bavard quand vous êtes populaire)

Inutile de le préciser, je ne suis pas une célébrité.
Et pourtant, dans le Fédiverse, je me retrouve dans une situation un peu unique dans laquelle :

1. J’ai ma propre instance Mastodon, juste pour moi4.
2. Je suis suivi par pas mal de personnes. Plus de 22 000, pour être précis5.
3. Je suis beaucoup de personnes, et j’aime vraiment avoir des conversations avec elles (je pense que c’est ce que les jeunes branchés appellent « l’engagement »).

Malheureusement, la combinaison de ces trois facteurs a créé la tempête parfaite6, ce qui veut dire que désormais, chaque fois que je poste quelque chose qui suscite beaucoup d’engagement, je finis par conduire une attaque par déni de service contre moi-même.

Mastodon : déni de service en tant que service ?

Hier, c’était mon anniversaire.
Et, bien sûr, j’ai posté sur ce sujet depuis mon instance Mastodon.

tête d'Aral qui fait l'andouille sur un pouet de mastodon et demande en anglais : "qui a deux pouces et 46 ans aujourd'hui ?"

J’ai eu pas mal de réponses. Et, pour être poli, j’ai commencé à répondre à tout le monde avec des messages de remerciements. Oh non, mon pauvre naïf ! Qu’est-ce que tu n’avais pas fait ?

Je vais laisser mon ami Hugo Gameiro, qui gère masto.host et héberge mon instance, expliquer ce qui s’est passé ensuite7 :

Vous avez beaucoup d’engagement et cela sollicite beaucoup Sidekiq8.

Prenez, par exemple, votre message d’anniversaire. En plus de demander à des milliers de serveurs de traiter votre demande de réalisation (on appelle ça des « jobs ») pour propager votre message (pour 23 000 abonnés, disons 3 000 serveurs), votre serveur au moment de la création de votre message va créer 3 000 jobs Sidekiq. Et comme votre Sidekiq n’a que 12 threads, traiter 3 000 jobs va prendre du temps puisqu’il ne peut en traiter que 12 à la fois.
Ensuite, pour chaque réponse à ce message, 3 000 jobs sont à nouveau créés, afin que vos abonnés puissent voir votre réponse sans avoir à changer de serveur ou aller sur votre profil. Et puis, si vous répondez à votre réponse, 3 000 jobs supplémentaires sont créés, etc.
Si vous répondez aux 100 réponses que vous avez reçues en 10 minutes (en supposant que l’estimation de mon nombre de serveurs est correcte), vous créez 300 000 jobs Sidekiq. C’est pour cela que ça bouchonne.

Mais qu’est-ce que tout cela veut bien dire, si on omet le jargon technique ?
Eh bien, que je parlais trop en étant trop connu de tous.

tableau de bord de sidekiq avec plusieurs graphiques et des chiffres qui montrent un pic de fréquentation que le logiciel a du mal à traiter
Voilà à quoi ressemble un embouteillage sur Mastodon.

Alors, quelle est la solution ?
Eh bien, il n’y a qu’une chose à faire quand vous vous retrouvez dans ce pétrin : agrandir votre instance Mastodon9. Le problème ? Ça commence à coûter cher.
Avant la dernière migration de Twitter10, je payais environ 280 €/an (un peu plus de 20 €/mois) pour mon instance Mastodon grâce à un partenariat que j’avais avec Hugo depuis le début. Cette semaine, je l’ai agrandie avec un plan à 50 €/mois. Et ce n’est toujours pas assez, comme le montre mon message d’anniversaire, donc Hugo a gentiment suggéré de me proposer un plan sur mesure.
Le problème n’est pas résolu pour autant, il est juste repoussé (sauf si cet article énerve tout le monde, bien sûr).
Heureusement, comme j’ai ma propre instance, la seule personne pénalisée par cette dépense supplémentaire, c’est moi. Mais que se serait-il passé si j’étais sur une instance publique gérée par quelqu’un d’autre ?

Tu déconnes, Elon ?

tweet iroique d'Aral en anglais ; Silicon Vallée : on va rendre les gens dépendants en leur filan des sucreries gratuites pour qu'ils ne se rendent pas compte qu'on les trait comme des vaches à lait / Elon Musk : faisons-les payer 8 dollars par moi pour les sucreries

Si Elon Musk voulait détruire mastodon.social, l’instance phare de Mastodon, il lui suffirait de s’y inscrire11.
Heureusement, Elon n’est pas assez intelligent pour ça.

Je plaisante, bien sûr… Eugen bannirait très probablement son compte dès qu’il le verrait. Mais ça illustre un problème : Elon est facile à bannir. Stephen Fry l’est beaucoup moins. C’est un véritable trésor national pour nous tous. On ne le bannit pas comme ça.
Et pourtant, Stephen peut lui aussi (bien qu’involontairement) coûter très cher aux gens qui gèrent des instances Mastodon, simplement en rejoignant l’une d’elles12..
La solution, pour Stephen tout du moins, est simple : il devrait gérer sa propre instance personnelle.
Ou demander à quelqu’un de le faire à sa place, comme je le fais13.
Gérer sa propre instance apporterait aussi à Stephen un autre bénéfice : il serait automatiquement vérifié. Après tout, si vous parlez à, mettons, @stephen@social.stephenfry.com, vous pouvez être certain que c’est bien lui parce que vous savez qu’il gère son propre domaine.

Des instances personnelles à la rescousse

Mon discours au Parlement européen sur les problèmes avec la Big Tech et les approches différentes que proposent Mastodon, le Fédiverse, et le Small Web.

— Attends, je suis largué… Tu ne viens pas de dire que les instances personnelles étaient une partie du problème ?
— Oui et non : elles le sont et elles ne devraient pas l’être.

Si ActivityPub (le protocole) et Mastodon (un serveur qui adhère à ce protocole) avaient été conçus pour promouvoir la décentralisation, alors avoir plus d’instances sur le réseau ne serait pas un problème. En fait, ça serait même le signe d’un réseau décentralisé sain.
Cependant, ActivityPub et Mastodon ont été conçus de la même manière que la Big Tech / Big Web : pour encourager des services qui hébergent le plus d’utilisateurs14 possible.
Cette architecture est à la fois complexe (ce qui la rend difficile et coûteuse à héberger) et très efficace pour la Big Tech (où les choses sont centralisées et passent à l’échelle verticalement, et où le but est d’avoir / de contrôler / d’exploiter autant d’utilisateurs que possible).
Dans la Big Tech, le coût initial pour passer à l’échelle est subventionné par de nombreuses sociétés de capital-risque (des personnes riches investissant dans de nouveaux business d’extraction et d’exploitation – ce que la Silicon Valley appelle des startups – dans le but de devenir encore plus riches), et ça mène à ces silos géants15 que sont aujourd’hui les Google, Facebook et Twitter.
Toutefois, à la différence de la Big Tech, le but avoué du Fédiverse est de décentraliser les choses, pas de les centraliser. Du coup, comment pourrions-nous atteindre l’opposé des buts de la Big Tech en adoptant leurs architectures de base ?
Lorsque vous adoptez le design de quelque chose, vous héritez aussi des critères de réussite qui ont mené à ce design. Si ces critères de réussite ne correspondent pas à vos objectifs, vous avez un sacré problème.
Pour le dire plus simplement :
N’adoptez pas les critères de réussite de la Big Tech, sinon vous deviendrez la Big Tech.

Ce n’est pas la taille qui compte

Aujourd’hui, il y a une équivalence entre la taille de mastodon.social (l’instance gérée par Eugen) et le succès de Mastodon (le logiciel créé par Eugen). C’est très dangereux. Plus mastodon.social grossit, plus il va ressembler à Twitter.
Je peux presque vous entendre crier : « Mais Aral, c’est fédéré ! Au moins, il n’y a pas de verrous sur mastodon.social ! ».
Et c’est vrai.
Vous savez ce qui est également fédéré ? L’e-mail.
Avez-vous déjà entendu parler de cette petite et vieille instance appelée Gmail ? (Ou peut-être les termes « adopte, étend, étouffe » ?)
Savez-vous ce qui arrive à votre e-mail si Google déclare (à tort ou à raison) que vous êtes un spam ? Personne ne voit votre e-mail.
Vous savez ce qui se passe si mastodon.social bloque votre instance ? Des centaines de milliers de gens (bientôt des millions ?) ne pourront plus décider d’afficher ou non vos messages.
Que se passe-t-il quand votre instance bloque mastodon.social ? Absolument rien.
C’est un réel déséquilibre des puissances.

La décentralisation commence par soi-même

Mastodon est non-lucratif, et je n’ai pas de raison de croire qu’Eugen n’ait pas les meilleures intentions du monde. Et pourtant, la décentralisation commence par se décentraliser soi-même.
C’est dans l’intérêt du Fédiverse que mastodon.social donne le bon exemple en limitant sa taille volontairement.
En fait, ça devrait même être intégré au logiciel. Les instances Mastodon devraient être empêchées de croître au-delà d’une certaine taille. Les instances qui sont déjà trop grosses devraient avoir des moyens d’encourager les gens à migrer vers des plus petites.
En tant que communauté, nous devrions aborder les grandes instances comme des tumeurs : comment pouvons-nous les détruire pour qu’elles ne soient plus un danger pour l’organisme ?
En poussant ce raisonnement, on arrive au concept du Small Web, un internet où nous possédons et maîtrisons notre propre lieu (ou nos propres lieux).

Cliquez sur l’image pour voir une vidéo (sur aperi.tube, une instance PeerTube) : Aral expliquant ce qu’est pour lui le Small Web


Small is beautiful ! (Petit c’est mieux) (octobre 2022) : Qu’est-ce que le Small Web et pourquoi en avons-nous besoin ?

 

Cui-cui ?

Je ne dis pas que les protocoles et applications actuels du Fédiverse peuvent, vont, ou même devraient évoluer vers le Small Web16. Pour l’instant, le Fédiverse est un palliatif inestimable qui fournit un lieu plus sûr que les fosses septiques centralisées de la Silicon Valley.

Le temps que durera le palliatif dépendra de notre capacité à résister à la centralisation. Les designs des serveurs et des protocoles qui incitent au passage à l’échelle vertical ne rendront pas forcément cette tâche plus facile. Et pourtant, il y a des moyens de pression sociaux que nous pouvons utiliser pour contrer leurs effets.

La dernière chose qu’on souhaite, c’est qu’une poignée de Zuckerbergs au petit pied gouvernent le Fédiverse. Ou pire encore, que vous deveniez vous-même un de ces mini-Zuckerbergs.

J’aime le fait que le Fédiverse existe. Et j’ai le plus grand respect pour les efforts gargantuesques qui lui sont dédiés. Mais je suis aussi très préoccupé par les décisions prises en termes d’architecture qui incitent à la centralisation, et non à la décentralisation. Je nous implore de reconnaître cela, pour limiter les risques du mieux que nous le pouvons, pour nous efforcer d’apprendre de nos erreurs, et pour faire encore mieux demain.
Gens d’ActivityPub et de Mastodon :
Considérez-moi comme votre canari dans une mine de charbon
« Cui-cui ! Cui-cui ! Cui-cui ! »

 

*Si vous souhaitez soutenir la Small Technology Foundation, qui est sans but lucratif : https://small-tech.org/fund-us

Khrys’presso du lundi 7 novembre 2022

Par : Khrys
7 novembre 2022 à 01:42

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  • Nos Oignons ont besoin de nos sous (nos-oignons.net)
  • ll nous manque 80.000 euros pour boucler l’année (streetpress.com)

    90 % des médias privés sont aux mains d’une dizaine de milliardaires. Ce n’est pas le cas de StreetPress. C’est un gage d’indépendance pour notre média. Nous sommes libres de proposer un journalisme qui dérange : nous devons faire face à 8 procès venant d’hommes politiques, de militants d’extrême droite, d’agresseurs sexuels… Et nos journalistes font pour certains l’objet de menaces.

  • Siné Mensuel lance un SOS (acrimed.org)

    « Siné Mensuel, c’est de la mauvaise herbe, de la tenace, de l’imbouffable. Une espèce rare, absolument pas protégée. À nous de la défendre bec et ongles »

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Khrys’presso du lundi 31 octobre 2022

Par : Khrys
31 octobre 2022 à 02:42

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  • L’héritière de BASF, multimillionnaire à 30 ans, milite pour qu’on taxe 90 % de son héritage (lareleveetlapeste.fr)

    “On oublie que le self-made man est une exception. Quand tu es très riche c’est parce que tu es né comme ça, et c’est généralement de l’argent sale, il n’y a pas une fortune qui soit propre.” À 30 ans, Marlene Engelhorn est l’arrière petite-fille de Friedrich Engelhorn, fondateur de la firme BASF il y a 150 ans, et aujourd’hui le plus grand groupe chimique au monde. Cette autrichienne vient d’hériter de plusieurs dizaines de millions d’euros du fait de son lignage familial, et souhaite distribuer de la façon la plus intelligente possible 90 % de son héritage.

  • Diplomatie féministe : déjà la fin (lesnouvellesnews.fr)

    À peine évoquée sur la scène internationale, la diplomatie féministe s’efface sous la poussée de l’extrême droite. La Suède fait un bond en arrière, d’autres pays, qui n’ont jamais effleuré le concept, s’en éloignent encore.

  • Insultes, menaces, montages pornos : le ras-le-bol des streameuses sur Internet (liberation.fr)

    « On est toutes épuisées de tout ça. […] Être une femme c’est “devoir” se préparer à être sexualisées et menacées durant notre vie » […] Tous ces contenus sont toujours en ligne, comme a pu le constater CheckNews en quelques clics. […] Interrogées sur la présence de la persistance et le foisonnement de ces contenus sur leurs plateformes respectives, Reddit et Discord n’ont pas répondu. […] une vidéaste déplore cependant avoir « déjà porté plainte, à de nombreuses reprises » mais qu’aucune procédure « n’a jamais rien donné »

  • Vers une “réhabilitation” des sorcières ? (axellemag.be)

    “Je suis en colère quand je vois des fêtes comme Halloween, par exemple. Les sorcières ne devraient pas faire l’objet de fête, on ne devrait pas en rire. On parle de tortures et d’exécutions.” […] L’accusation de “sorcellerie” est d’ailleurs toujours utilisée contre les femmes dans le monde […] En juin dernier, au Pérou, plusieurs femmes, âgées de 43 à 70 ans, ont été séquestrées et torturées par des milices paysannes qui les tenaient responsables d’une vague de décès dans leur village. Le 22 juillet, quatre femmes ont été assassinées après avoir été torturées en Papouasie-Nouvelle-Guinée : elles étaient accusées d’avoir pratiqué la sorcellerie sur un homme d’affaires local. Derrière les “sorcières”, ce n’est pas le visage du diable que l’on découvre, mais l’une des multiples manifestations violentes du patriarcat.

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  • Sexisme : un président de chambre des métiers se la joue « gros beauf » (humanite.fr)

    Un président de Chambre départementale des métiers a publié sur les réseaux sociaux un montage confondant de sexisme et de vulgarité. Ceci au moment où la filière des travaux publics tente d’ouvrir certains métiers jugés trop masculins aux jeunes femmes futures apprenties ou diplômées.

  • Comment la réforme du lycée a détourné les filles des maths (humanite.fr)
  • Avorter en France : oui, mais discrètement (theconversation.com)

    Malgré sa grande banalité statistique, puisqu’une femme sur trois en moyenne interrompt volontairement une ou plusieurs grossesse(s) au cours de sa vie féconde, l’IVG reste socialement perçue comme illégitime.[…]Concrètement, avorter demeure moins un droit qu’une concession faites aux femmes, dont on attend, outre l’expression d’une tristesse, voire d’une culpabilité, un minimum de discrétion.

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Khrys’presso du lundi 24 octobre 2022

Par : Khrys
24 octobre 2022 à 01:42

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  • Une femme de 33 ans crée plus de 1000 biographies Wikipédia de femmes scientifiques inconnues (developpez.com)

    « les gens pensent que les filles ne choisissent pas les sciences parce qu’elles ne sont pas inspirées » […] Plusieurs de ses articles ont été supprimés par d’autres wikimédiens […] Elle a expliqué qu’ils ont dit qu’une poignée des femmes qu’elle a décrites n’étaient pas si connues que ça.Wade a répondu que c’est vrai, c’est le problème : elles devraient être plus connues.

  • « Vous avez Tchernobyl dans le bide » : des femmes se battent face à Bayer pour faire reconnaitre leur calvaire (basta.media) – voir aussi « Leur implant de contraception, c’est de la mort aux rats » : un rapport met en cause Bayer et les autorités (basta.media)

    « L’assemblage des matériaux est un cas typique de corrosion galvanique » engendrant des « produits de corrosion » qui vont provoquer des « réactions inflammatoires différentes face à ces produits ». […] « La crainte de l’ANSM c’est que toutes les femmes implantées aillent se faire explanter – avec le risque anesthésique et opératoire associé –, si on affirme qu’il y a un problème avec l’implant […] Les termes de risque qu’on a employés [dans le rapport, NDLR] étaient systématiquement en dessous des définitions admises en médecine » […] plus de 200 000 femmes en France sont porteuses du dispositif Essure et, au moment de la pose, les médecins ne les ont pas informées des risques liés à leur implantation. […] Pour retrouver un semblant de vie « normale », environ 30 000 femmes ont été explantées à ce jour en France. […] Sans technique de retrait homogénéisée dans un premier temps, la « casse » a été catastrophique, rapportent les associations de victimes. Certains chirurgiens auraient tenté de retirer l’implant en tirant dessus, engendrant une rupture de celui-ci. D’autres opéraient à l’aveugle sans vérifier si l’implant était toujours en place. […] Bayer n’a été condamné qu’une fois à indemniser une femme pour les effets secondaires causés par les implants Essure, en Espagne. Aux États-Unis, face à 39 000 plaintes déposées, la multinationale a préféré débourser plus d’un milliard de dollars en lieu et place du procès. En France, l’association Resist a tenté une action de groupe pour faire condamner le groupe. Leur action a été déboutée en mai 2022.

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  • Jane Roe et Gillian Brockell. (affordance.framasoft.org)

    Au lendemain de la décision de la Cour Suprême on semble redécouvrir que les promesses des applications de grossesses et de […] la “MenstruTech” ne sont que l’incarnation d’un cauchemar dans lequel chaque donnée rattachée au cycle menstruel devient un stigmate faisant du corps de chaque femme, une cible. […] Le projet de cette société numérique de la (dé)monstration permanente et des Gorgones politiques qu’elle fabrique, agite et ressuscite, est le projet d’une société de l’assignation. […] Et dans ce cauchemar conscient, c’est nous qui fournissons les données nécessaires aux obtenus, aux attendus. […] ce qui compte c’est que nous devenions nous-mêmes une notification dans un système techno-holistique qui traite les corps comme autant de signaux à disposition du projet politique le plus immédiatement viable et objectivable économiquement, c’est à dire celui d’une oppression. Une oppression presque joyeuse, presque consentie, presqu’insouciante. Mais une oppression incontestablement. […] il n’est aucune entreprise du numérique qui ne conçoive ses produits et services autrement que par le déploiement d’une infrastructure de la surveillance. Or une technostructure, fut-elle celle de la bienveillance, reposant sur une infrastructure de la surveillance, ne sera ni ne deviendra jamais rien d’autre qu’un projet politique autoritaire créant les conditions du maintien de son emprise totale sur nos vies. […] Nous vivons dans des démocraties où les droits des femmes, puis des minorités, au prix de luttes incessantes, apparaissaient enfin et au moins en partie garantis et protégés comme jamais ils ne l’avaient été jusqu’ici dans l’histoire des sociétés développées. C’est précisément ce moment que l’histoire choisit pour nous rappeler que ces droits n’ont jamais été aussi fragiles et dépendants de la décision de quelques êtres obsessionnels qui ne calculent le devenir de l’humanité qu’à l’aune de leurs propres névroses. Ce qui est en soi, la meilleure définition possible d’un algorithme.

  • The Internet Is Not Facebook : Why Infrastructure Providers Should Stay Out of Content Policing (eff.org)

    There are many services, mechanisms, and protocols that make up the internet as we know it. The most essential of these are what we call infrastructural, or infrastructure providers. We might think of infrastructural services as belonging to two camps : physical and logical. […] The logical layer of internet infrastructure is where things get a little tricky.

  • Scanning phones to detect child abuse evidence is harmful, ‘magical’ thinking (theregister.com)

    Security expert challenges claim that bypassing encryption is essential to protecting kids

  • Privacy and freedom should be the legacy we leave, not the opposite (fsf.org)
  • Il y a des cas où la chaine de blocs n’est pas utile (bortzmeyer.org)
  • Post Collapse Computing Part 1 : The Crisis is HerePart 2 : What if we Fail ?Part 3 : Building Resilience (blogs.gnome.org)
  • Recap du thème du mois sur le capitalisme de plateforme (renverse.co)
  • Starting over (maisouvaleweb.fr)

    La chute est […] une perspective avant tout mise en avant par des populations qui en réalité, ont peu de chance de s’y retrouver confrontées. Des populations privilégiées, blanches, occidentales et sans problèmes financiers notables […] les citoyens des pays les plus touchés par le dérèglement climatique […] n’ont pas le luxe d’attendre la fin du monde. Ils sont besoin que des actions soient mises en place immédiatement […] « Starting over », c’est donc assumer la rupture entre l’ancien et le nouveau, mais aussi entre l’ennuyeux et le passionnant. L’apocalypse climatique – si tant est que l’on appartienne aux populations privilégiées […] est plus exaltante qu’une adaptation fastidieuse et monotone aux conditions de vie qu’imposerait réellement un nouveau régime climatique.

  • « Notre dernière chance d’éviter l’effondrement consiste à sortir de cette idéologie suicidaire » (basta.media)
  • Agriculture et alimentation : comment mangera-t-on en 2050 (liberation.fr)

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Khrys’presso du lundi 17 octobre 2022

Par : Khrys
17 octobre 2022 à 01:42

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Spécial France

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  • Heureusement, Annie Ernaux n’est pas un « Grand écrivain » (diacritik.com)

    Une violence inouïe, aux allures de cabale calomnieuse, commença dès lors à se déchaîner. On entendit tout et surtout, comme toujours sur les réseaux sociaux, absolument n’importe quoi : Annie Ernaux, antisémite. Annie Ernaux, racialiste. Annie Ernaux, séparatiste. Annie Ernaux, islamiste. Et même, surprise suprême, Annie Ernaux, pédophile. C’était le grand chelem de la Réaction qui se dévidait là : le débat public convertissait alors le discours positivement épidictique attendu autour de l’écrivaine en négativité polémique terrassante. […] Ce qu’ils ne supportent pas, c’est combien ce Nobel d’Ernaux les défait mais surtout les dédit et les déjuge. […] c’est l’épreuve terrible de la déconsidération morale et critique, eux qui passaient leur temps à vomir ce qu’ils désignaient comme le prétendu « wokisme » d’Annie Ernaux, voilà que des étrangers – peut-on imaginer pire scénario pour ces gens-là ? – consacrent Ernaux comme l’incarnation contemporaine de la France contre leur avis.

  • Laurence Faron et les écrivaines oubliées (humanite.fr)

    La fondatrice de la maison d’édition Talents hauts, qui déconstruit les stéréotypes dans des livres pour enfants comme pour adultes, a lancé la collection « les Plumées », qui réhabilite des autrices injustement effacées. […] « C’était très déroutant pour moi, qui suis féministe, lectrice et éditrice, de réaliser que j’étais en peine de citer des grands classiques écrits par des femmes avant une période assez récente » […] « Dès qu’on a tiré le fil, on a trouvé des centaines de textes de femmes qui méritaient d’être réédités. On avait l’embarras du choix. »

  • La commission des Lois de la chambre haute, dominée par la droite, rejette la proposition du groupe EE-LV pour inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution (liberation.fr)
  • Retraites : inégales jusqu’à la mort ? (humanite.fr)

    Alors que la réforme des retraites est de nouveau sur la table, les débats qui y sont consacrés incluent peu la problématique des inégalités professionnelles qui touchent les femmes. Pourtant, une fois à la retraite, nous percevons en moyenne 42 % de moins que les hommes. Cet écart est directement corrélé à celui des salaires, qui demeurent de 24 % inférieurs, malgré notre arrivée massive sur le marché de l’emploi.

  • Les femmes consacrent jusqu’à 200 heures de plus par an à des tâches “non promouvables” par rapport à leurs collègues masculins, soit l’équivalent d’un mois de travail, d’après une étude (developpez.com)
  • Il la tue après cinquante années de vie commune (humanite.fr)

    « Dans les pays où les femmes ont la possibilité concrète de ­divorcer et de vivre de manière autonome, la plupart de celles qui sont assassinées par un partenaire le sont autour de la période de séparation. En Australie, par exemple, la moitié des femmes tuées par un partenaire le sont dans les trois mois qui suivent celle-ci »

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Khrys’presso du lundi 10 octobre 2022

Par : Khrys
10 octobre 2022 à 01:42

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  • Lycée : Pour les filles, un retour en arrière de 20 ans (cafepedagogique.net)

    “Depuis la réforme, quel que soit le parcours scientifique suivi, le nombre de filles chute massivement et la part des filles régresse brutalement au profit des garçons”.

  • À l’Assemblée, la majorité et la Nupes s’étrillent sur les violences sexuelles (liberation.fr)

    Pour le gouvernement, cette attaque est habile. Elle aura eu le mérite d’étouffer (pour combien de temps ?) les critiques lancées par les oppositions et ciblant les propres affaires politiques de l’exécutif.[…] « Ce n’est plus Jupiter, c’est Le Parrain ! »

  • Interdire le porno ? (humanite.fr)

    J’entends déjà : « C’est pas comme ça tout le temps. Elles nous font chier ces féministes, c’est le retour de l’ordre moral. » Pourtant, d’après la procureure de Paris, ce sont 90 % des films pornographiques qui pourraient être incriminés pour viols, agressions sexuelles ou traite des êtres humains. Il y a donc bien une exploitation des femmes par un système, et pas quelques cas isolés.

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Khrys’presso du lundi 3 octobre 2022

Par : Khrys
3 octobre 2022 à 03:29

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  • Drahi vs Reflets : Le secret des affaires ou le journalisme (blast-info.fr)
  • Next INpact attaqué en justice par Avisa Partners (nextinpact.com)

    Arrêt sur Image, Mediapart, l’ADN ou encore Reflets sont également attaqués par cette société.Nous allons engager un avocat pour nous défendre contre cette plainte insensée et infondée, mais également défendre la liberté de la presse indépendante. Nous ne céderons à aucune pression.

  • De quoi la mort du Ravi est le nom (acrimed.org)

    Dans un pays où ce sont des initiatives privées qui viennent pallier les défaillances étatiques en matière de défense du pluralisme, le « projet pour une presse libre » de Pierre Rimbert du Monde diplomatique est on ne peut plus d’actualité. Comme la création d’un Syndicat de la Presse Pas Pareille. Et tout cas, si tout cela se mettait en place, on en serait… Ravi !

  • Classement de l’insécurité : Brest passe devant Caracas en quelques heures (contre-attaque.net)

    « Insécurité : Nantes pire que Bogota », « La France plus dangereuse que le Mexique ». Voici les énormités que nous servent les médias dominants depuis une semaine. Des intox grotesque et même indécentes, basées sur un « classement » sur un site internet à partir de votes anonymes.

  • Valérie Rey-Robert : « Le problème, ce n’est pas la télé-réalité, c’est ceux qui la font » (bondyblog.fr)

    À gauche, on a un défaut immense, c’est de considérer que le camp d’en face est débile, qu’il n’a aucun projet politique. Force est de constater que, tant pour TPMP que pour la télé-réalité, ce sont des programmes qui véhiculent des idées hyper-réactionnaires.

RIP

Spécial emmerdeurs irresponsables gérant comme des pieds (et à la néolibérale)

Spécial recul des droits et libertés, violences policières, montée de l’extrême-droite…

Spécial résistances

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

  • Le pouvoir des infrastructures – Comprendre la mégamachine électrique (lundi.am)
  • A Rant About “Technology” (ursulakleguinarchive.com)

    Technology is the active human interface with the material world.But the word is consistently misused to mean only the enormously complex and specialised technologies of the past few decades, supported by massive exploitation both of natural and human resources.This is not an acceptable use of the word. “Technology” and “hi tech” are not synonymous, and a technology that isn’t “hi,” isn’t necessarily “low” in any meaningful sense. […] Anybody who ever lighted a fire without matches has probably gained some proper respect for “low” or “primitive” or “simple” technologies ; anybody who ever lighted a fire with matches should have the wits to respect that notable hi-tech invention.

  • On entend trop le mot « algorithme » (framablog.org)
  • Turning Every Rooftop into Content (logicmag.io)

    Zillow is more than just a real-estate website : It’s a window into the American dream.

  • Réflexion critique pour survivre à la Collapsologie (lenumerozero.info)
  • Lire- Federico Tarragoni « Émancipation » (unioncommunistelibertaire.org)

    L’émancipation, cette fragilité héroïque, est un véritable saut dans le vide. Elle apparaît chaque fois que les individus résistent à des rapports de domination. […] « En s’émancipant, l’individu se relie à de nouveaux collectifs. Pour refuser sa place de dominé et accepter l’incertitude des lendemains, il a besoin d’un collectif protecteur et sécurisant. » […] Aujourd’hui, « nous nous trouvons à un carrefour. Plus nous banaliserons les états d’urgence démocratiques, plus nous assimilerons la liberté à la consommation, plus nous trouverons confortable l’état de léthargie civique engendré par la gestion gouvernementale des risques sociaux (sanitaires, financiers, sécuritaires, climatiques…), plus l’émancipation s’effacera. »

  • « Non ti schiantare » : en route vers Rome et le fascisme qui vient (lundi.am)
  • « Il serait beau de témoigner que nous avons conscience de notre nuit » (lundi.am)

    C’est donc assez déconcertant de constater que les « nouvelles mesures » décrétées dans le monde entier afin de contrer le COVID-19, existent en fait depuis plus de quarante ans en Iran. Ici, temporaires. Là-bas, institutionnelles. Seulement, ces mesures, imposées par la force, ne sont pas là pour protéger ou préserver la vie humaine. Loin de là, elles servent les intérêts d’un régime fasciste. […] Autre exemple de décalage : la distanciation sociale, un terme nouveau pour notre inconscient. Notre inconscient collectif. Mais ailleurs ça a toujours existé. C’est la règle de base en Iran : les hommes gardent une distance vis à vis des femmes. Ne pas serrer la main des femmes. Ne pas toucher. Aucun contact physique. La distanciation, là-bas, c’est la ségrégation des sexes. […] Là-bas il n’y a pas besoin de masque. Il y a le voile, le tchador.

  • « La religion : opium du peuple et alliée du patriarcat » (humanite.fr)

    Les manifestations continuent en mémoire de Mahsa Amini, morte pour avoir mal porté son voile, au paroxysme inqualifiable de l’oppression des femmes. Dans les sociétés où nos droits sont les plus mis à mal, comme en Iran ou en Afghanistan, on ne prend même plus la peine de tenter de dissimuler les inégalités, on les revendique comme un mode de vie. […] Prétendre avoir une approche féministe d’une religion, n’importe laquelle, c’est devoir remonter une pente à 90 degrés. […] À l’échelle de l’humanité, notre asservissement a toujours existé dans les pratiques et dogmes religieux. Il est impossible d’attribuer la cause de notre oppression à une religion déterminée. En synthèse, l’islam n’est pas plus con qu’une autre.

  • Décoloniser les imaginaires de la révolte (lundi.am)

    « Femmes, Vies, Libertés, sauvons-nous de nos sauveurs »

  • Cher Jean-Luc (blogs.mediapart.fr)
  • Eric la Blanche : « Être un mec, un « vrai », c’est (un peu) être un connard » (lesnouvellesnews.fr)
  • Ces salariés de Lubrizol ont empêché des milliers de morts à Rouen, il y a trois ans (actu.fr)
  • Richard Nixon exposed to radiation on Moscow trip in 1959, documents reveal (theguardian.com)

    Vice-president and wife exposed to ‘massive dosages’ of ionising radiation at US ambassador’s residence, declassified files show

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les trucs chouettes de la semaine


Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).

Khrys’presso du lundi 26 septembre 2022

Par : Khrys
26 septembre 2022 à 01:42

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


Tous les liens listés ci-dessous sont a priori accessibles librement. Si ce n’est pas le cas, pensez à activer votre bloqueur de javascript favori ou à passer en “mode lecture” (Firefox) ;-)

Brave New World

Spécial femmes dans le monde

Spécial France

Spécial femmes en France

Spécial médias et pouvoir

  • Reflets poursuivi par Altice : la liberté d’informer menacée (reflets.info)

    Le groupe de Patrick Drahi tente de contourner le droit de la presseNotre journal est assigné devant le tribunal de commerce en référé. Altice souhaite le retrait des articles déjà publiés et l’interdiction pour Reflets, et donc pour toute la presse, de pouvoir consulter les documents publiés sur Internet par le groupe de ransomware HIVE. […] Un procès, même gagné coûte cher. Les frais engagés pour notre défense ne nous seront pas remboursés (au mieux une infime partie). Nous avons pour l’instant fait face à un premier procès en diffamation sur les fonds de Rebuild.sh mais nous ne pourrons pas assurer le coût de trois procès. Nous lançons donc un crowdfunding pour nous permettre de contrer ceux qui veulent nous faire taire par des procès bâillon.

  • Censure ministérielle : vers un retour de l’ORTF en Lorraine ? (snjcgt.fr)

Le facepalm de la semaine

Spécial emmerdeurs irresponsables gérant comme des pieds (et à la néolibérale)

Spécial recul des droits et libertés, violences policières, montée de l’extrême-droite…

Spécial résistances

Spécial GAFAM et cie

Les autres lectures de la semaine

Les BDs/graphiques/photos de la semaine

Les vidéos/podcasts de la semaine

Les trucs chouettes de la semaine


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Khrys’presso du lundi 19 septembre 2022

Par : Khrys
19 septembre 2022 à 01:42

Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.


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Spécial femmes dans le monde

  • IVG en Hongrie : l’extrême droite veut faire « écouter les battements de cœurs du fœtus » (lesnouvellesnews.fr)

    L’extrême droite au pouvoir en Hongrie vient de durcir, par décret, les conditions d’accès à l’avortement. Les femmes doivent désormais prouver aux médecins, avant l’intervention, qu’elles ont écouté les « battements de cœur de leur fœtus ».

  • Le sénateur républicain Lindsey Graham propose d’interdire l’avortement après 15 semaines de grossesse (liberation.fr)

    Lindsey Graham, proche de Donald Trump, a présenté mardi un projet de loi qui interdirait l’avortement dans l’ensemble des Etats-Unis après 15 semaines de grossesse.

  • Droit à l’IVG : les républicains sur le reculoir (humanite.fr)

    Depuis la décision de la cour suprême mettant fin à la protection constitutionnelle de l’avortement, un vent de fronde parcourt l’électorat, notamment féminin, obligeant le parti « pro-life » à faire profil bas.

  • US : Being a victim of rape costs an average of $3,500 in medical bills (arstechnica.com)

    The bills can discourage rape reporting and compound victims’ trauma. […] On average, hospital emergency departments charged $3,551 for urgent medical care coded as caused by sexual violence. People who were sexually assaulted while pregnant faced even steeper bills, with an average of $4,553. Uninsured victims or those who chose to pay themselves were served bills that averaged $3,673. Even those with private insurance faced burdensome bills ; the study found that insured victims paid an average of 14 percent of their bills out-of-pocket, which for the average bill would work out to nearly $500.

  • Jair Bolsonaro, A Perfect Example Of Why Autocrats Hate Women (worldcrunch.com)

    Vladimir Putin, Xi Jinping and Jair Bolsonaro all share what seems a natural antipathy toward women — yet it is ultimately because they fear them. And with good reason : When women participate in political movements, they are more likely to succeed — which is bad news for authoritarianism.

Spécial France

Spécial femmes en France

  • Être une femme en ligne est un métier dangereux (funambuline.blogspot.com)
  • Affaire Hulot : l’enquête pour viol classée sans suite pour prescription (liberation.fr)

    L’ancien ministre de l’Environnement était accusé par au moins six femmes, dont une mineure au moment des faits, de viols ou d’agressions sexuelles commis entre 1989 et 2001.

  • Travail dissimulé. Une société de nettoyage reconnue coupable de traite d’êtres humains aggravée (humanite.fr)

    L’entreprise VIP services et ses dirigeantes ont été condamnées jeudi par le Tribunal judiciaire de Paris à de peines d’emprisonnement et d’amende pour avoir exploité 26 femmes de ménage ukrainiennes sans-papiers dans des conditions indignes.

  • Qui veut la peau de MaMaMa ? (humanite.fr)

    Créée en mars 2020, en plein confinement, pour subvenir aux besoins spécifiques des mères isolées et des nourrissons, l’association MaMaMa, dont l’action a été unanimement saluée, se voit désormais privée de financements et chassée du hangar mis à sa disposition à Saint-Denis.

  • Des Journées du matrimoine pour mettre en lumière l’apport culturel de femmes oubliées (liberation.fr)
  • « L’Histoire est sexiste » : le patrimoine oublie les femmes artistes (reporterre.net)

    Comment ce mot a-t-il disparu de nos dictionnaires ? Au XVIIe siècle, le matrimoine a été banni de la langue française par les académiciens, qui jugeaient le terme obsolète et même « burlesque ».

  • Pour une alliance féministe et trans (blogs.mediapart.fr)

    La période politique actuelle voit un violent retour de bâton s’abattre sur les droits des femmes, alors que le gouvernement français maintient en poste des ministres accusés de viols. Ailleurs dans le monde, le droit à l’avortement est bafoué, en Pologne et aux États-Unis notamment. Avec 89 député·es RN à l’Assemblée nationale, nous ne sommes pas exempts d’une attaque d’une telle ampleur. Il est plus que jamais important de ne pas se tromper de combat. Aux États-Unis, l’attaque sur le droit à l’avortement a été précédée par de nombreuses lois anti-trans : dans l’Ohio, la loi Save Women’s Sports Act prévoit qu’en cas de doute sur le sexe d’une élève, celle-ci doit subir un examen intrusif pour prouver son sexe. Dans tous ces cas, il s’agit d’une attaque sur le droit des personnes à disposer de leur corps. L’arrivée d’attaques similaires contre les personnes trans en France nous laisse présager un sort semblable à celui des États-Unis.

RIP

Spécial médias et pouvoir

Spécial emmerdeurs irresponsables gérant comme des pieds (et à la néolibérale)

  • La France a autorisé des livraisons d’armements à la Russie en 2021 (disclose.ngo)

    L’État français a validé la livraison d’équipements militaires à la Russie pour près de 7 millions d’euros. C’est ce que révèle un rapport du ministère des armées dont le gouvernement retarde la publication depuis juin dernier.

  • Réforme des retraites : le coup d’accélérateur c’est maintenant (rapportsdeforce.fr)

    Alors que le rapport du COR sort officiellement ce jeudi, Emmanuel Macron a affirmé lundi, vouloir réformer les retraites le plus vite possible. Et ce, sans exclure de l’intégrer dans le budget de la Sécurité sociale à l’automne ni d’utiliser le 49,3 pour contourner les oppositions. Des déclarations qui pourraient remplir les mobilisations syndicales du 29 septembre.

  • Comment Emmanuel Macron divise sa majorité entre envie d’“accélération” et crainte d’un “passage en force” (francetvinfo.fr)
  • Retraites : un Président ne devrait pas faire ça (blogs.mediapart.fr)

    Un Président réélu par défaut, sans campagne, sans enthousiasme, ne devrait pas, dans un pays exténué, déprimé, bricoler une retraite à 64 ans avec une ambition de comptable.

  • Retraites : le choix de l’injustice (attac.org)

    Le rapport du Conseil d’orientation des retraites conteste le lien mécanique établi entre déficit et réforme des retraites. Ce rapport montre une fois de plus que l’existence du déficit est fondé sur des conventions et des hypothèses discutables et qu’en tout état de cause son ampleur reste minime (0,4 % du PIB dans les années à venir). […] La conclusion du COR est importante : « Au regard de ces résultats, il ne revient pas au COR de se positionner sur le choix du dimensionnement du système de retraite. Selon les préférences politiques, il est parfaitement légitime de défendre que ces niveaux sont trop ou pas assez élevés, et qu’il faut ou non mettre en œuvre une réforme du système de retraite » Et d’ajouter « les résultats de ce rapport ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite ». L’avertissement est clair : réformer le système de retraite n’est pas une nécessité économique ou démographique, c’est un choix politique.

  • Un proche d’Emmanuel Macron nommé à la tête de l’Agence des participations de l’État (ouest-france.fr)
  • Énergie. Matignon invente le « payer plus et consommer moins » (humanite.fr)

    Élisabeth Borne a annoncé, mercredi, une augmentation de 15 % des factures d’électricité et de gaz. Alors que l’hiver s’annonce compliqué, selon RTE, le gouvernement mise sur la sobriété, sans jamais remettre en cause la loi du marché.

  • Salaires : moins d’un·e enseignant·e sur trois concerné·e par la revalorisation ! (sudeducation.org)
  • “J’ai été refusée partout” : alors que la phase ultime de Parcoursup se termine, des milliers de jeunes restent encore sur le carreau (france.tv)
  • Le CNED : laboratoire du management néolibéral dans l’Éducation nationale (regards.fr)

    Au Centre National d’Enseignement à Distance, les élèves sont des clients, le savoir une marchandise et les profs des employés maltraités. Enquête au cœur de la machine à casser l’école. […] Voilà donc qui sont les « profs rêvés de Blanquer » : des enseignants qui ne comptent pas leurs heures, qui passent leur temps à corriger sans avoir le droit de connaître leurs élèves, obéissent aveuglément à des protocoles conçus sans eux, tremblent devant leur hiérarchie et privilégient une relation de clientèle à la pédagogie. […] Nous assistons à la transformation d’une institution préalablement conçue pour compenser les impossibilités de l’école publique dans des cas très spécifiques et exceptionnels, en une institution soumise aux logiques de rentabilité et mobilisée pour préparer la néolibéralisation de l’école. Un projet qui se fait en silence sur le dos des enseignants les plus fragilisés mais aussi sur celui des élèves et étudiants privés de toute relation humaine et de la sociabilité qu’apporte l’école publique.

Spécial recul des droits et libertés, violences policières, montée de l’extrême-droite…

Spécial résistances

Spécial GAFAM et cie

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