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Les nouvelles du samedi 20:42

Par : Goofy
27 janvier 2024 Ă  14:42

Pour achever cette semaine, deux nouvelles de 2042 concoctĂ©es avec amour par les participant⋅es des ateliers #solarpunk #UPLOAD de l’UniversitĂ© Technologique de CompiĂšgne (UTC).

En 2042, on rĂ©nove et on en profite pour faire autrement, que ce soit Ă  la ville ou Ă  la ferme !

Renaissance urbaine

Le soleil matinal traversait les grandes fenĂȘtres du cours d’urbanisme de Monsieur Marcel, plongeant la salle dans une lumiĂšre dorĂ©e. L’UniversitĂ© Upload, pionniĂšre dans l’éducation post-effondrement mondial, incarnait en 2042 un esprit de rĂ©silience et d’innovation. Ici, les Ă©tudiants apprenaient Ă  reconstruire un monde dĂ©chirĂ©, avec des principes de durabilitĂ© et d’indĂ©pendance.
Dans l’amphithĂ©Ăątre, Apu, un jeune homme au regard pensif originaire de Mumbai, Ă©tait scotchĂ© Ă  son cahier. Les pages racontaient son voyage depuis les rues de sa ville natale, oĂč il avait Ă©tĂ© tĂ©moin des impacts dĂ©vastateurs du changement climatique et de la surpopulation. Ces expĂ©riences l’avaient poussĂ© vers la quĂȘte de solutions Ă©cologiques simples mais efficaces.
À l’autre bout de la salle, Stella, une Ă©tudiante venant de The Line en Arabie Saoudite, analysait les schĂ©mas urbains projetĂ©s sur l’écran. Issue d’une rĂ©gion marquĂ©e par des avancĂ©es technologiques, elle croyait en la puissance des solutions high-tech pour façonner l’avenir.

La voix de Monsieur Marcel brisa le silence.
« Bienvenue dans notre cours d’urbanisme durable ! Aujourd’hui, nous explorerons les dĂ©fis de crĂ©er des espaces urbains indĂ©pendants et novateurs. Â»

Les regards d’Apu et Stella se croisĂšrent, marquant le dĂ©but d’une collaboration improbable.
Le cours de Marcel, mélangeant théorie et pratique, encourageait les étudiants à penser au-delà des limites conventionnelles.
« Dans un monde oĂč les ressources sont rares, nous devons ĂȘtre ingĂ©nieux Â» expliquait-il.
Son enseignement reflĂ©tait une philosophie qui valorisait l’équilibre entre la haute technologie et les approches low-tech.

Apu et Stella furent bientĂŽt amenĂ©s Ă  travailler ensemble sur un projet de rĂ©novation Ă©cologique pour les dortoirs dĂ©labrĂ©s de l’universitĂ©. Alors qu’ils s’asseyaient autour d’une table, Apu, animĂ© par la conviction que des solutions simples pouvaient avoir un impact majeur, commença Ă  partager son histoire.

« Stella, tu sais, Ă  Mumbai, j’ai vu comment des matĂ©riaux locaux simples peuvent faire une diffĂ©rence dans la vie quotidienne. Les briques en terre crue, par exemple, sont abondantes et peuvent ĂȘtre produites localement, rĂ©duisant ainsi notre empreinte carbone. Â»
Stella, initialement sceptique, Ă©couta attentivement les explications d’Apu tout en esquissant quelques notes sur son propre cahier.
« Les briques en terre crue peuvent ĂȘtre une alternative aux matĂ©riaux de construction conventionnels, Â» suggĂ©ra Apu, esquissant un plan sur son cahier. « Elles peuvent ĂȘtre produites localement, rĂ©duisant ainsi notre empreinte carbone. Â»
Stella rĂ©pondit :
« C’est intĂ©ressant, Apu, mais il faut voir au-delĂ  de la simplicitĂ©. Moi je verrais bien des panneaux solaire, des Ă©oliennes qui se fondent dans l’architecture, et l’utilisation de l’énergie hydraulique par exemple avec un barrage. J’ai mĂȘme pensĂ© Ă  utiliser le logiciel Heliodon pour simuler et visualiser le mouvement du soleil, et optimiser l’utilisation de la lumiĂšre solaire dans la conception des bĂątiments. On pourrait mĂȘme faire tourner le bĂątiment avec le soleil, cela pourrait le rendre presque auto-suffisant. Â»

« Refurbished with passive house components, kindergarten in Estonia Valga Â» by TĂ”nu Mauring is licensed under CC BY 2.0.

 

Apu, intrigué par la vision audacieuse de Stella, sourit tout en continuant à dessiner sur son cahier.
« Je vois oĂč tu veux en venir, Stella. Cependant, nous devons nous assurer que nos solutions sont rĂ©alistes et accessibles. Comment pouvons-nous intĂ©grer ces technologies de maniĂšre Ă  ce qu’elles soient durables et Ă  la portĂ©e de tous ? Â»

Stella réfléchit un moment avant de répondre.
« Imaginons un bĂątiment oĂč l’architecture et la technologie solaire s’entremĂȘlent. Des panneaux photovoltaĂŻques ne sont plus simplement installĂ©s sur les toits, mais font partie intĂ©grante des murs eux-mĂȘmes. Â»

Apu, leva les yeux de son cahier : « Tu veux dire, transformer littĂ©ralement les murs en sources d’énergie ? Â»

« Exactement ! Les façades des bĂątiments pourraient non seulement crĂ©er leur propre Ă©lectricitĂ© mais aussi devenir des Ă©lĂ©ments esthĂ©tiques. Cela pourrait redĂ©finir notre approche de l’architecture durable. Â»

« Je comprends. Les murs pourraient absorber l’énergie solaire tout au long de la journĂ©e, rĂ©duisant la dĂ©pendance aux Ă©nergies traditionnelles. Ça pourrait vraiment changer la donne. Â»

Stella acquiesça. « Et il y a plus. Si on intĂšgre intelligemment ces panneaux, on pourrait non seulement produire de l’énergie, mais aussi contrĂŽler l’éclairage naturel et la tempĂ©rature Ă  l’intĂ©rieur des bĂątiments. C’est comme donner vie aux murs ! Â»

À travers leur Ă©change Abu et Stella dĂ©couvraient le concept de bĂątiment passif. Une construction Ă©conome en Ă©nergie minimisant ses consommations.

Au fil du temps, les tensions entre Apu et Stella s’étaient apaisĂ©es, laissant place Ă  une amitiĂ© mutuelle et Ă  une comprĂ©hension commune. Leur projet prenait forme, et devenait un exemple de coexistence entre technologie avancĂ©e et mĂ©thodes traditionnelles. Stella et Apu, aprĂšs des heures de dĂ©bat passionnĂ© dans la salle de classe, dĂ©cidĂšrent qu’il Ă©tait temps de partager leur vision avec le reste de l’UniversitĂ© Upload.

En entrant dans l’Agora, ils furent accueillis par une mosaĂŻque de sons et de couleurs. Ce lieu, conçu comme un amphithĂ©Ăątre, Ă©tait un espace oĂč se mĂȘlaient tradition et innovation. Les piĂšces Ă©taient bondĂ©es d’étudiants issus de plusieurs horizons, dĂ©battant entre eux et partageant leur sondages d’opinion, tandis que le centre Ă©tait dominĂ© par une scĂšne circulaire.

Des groupes d’étudiants et de professeurs s’y rencontraient, discutant et partageant des idĂ©es. Au plafond, une structure de verre laissait filtrer la lumiĂšre naturelle, illuminant des jardins suspendus qui ajoutaient une touche de verdure Ă  l’environnement technologique.

Stella et Apu, impressionnĂ©s mais dĂ©terminĂ©s, se frayĂšrent un chemin Ă  travers la foule jusqu’à la scĂšne. Ils montĂšrent sur la scĂšne, sous les yeux curieux de leurs camarades. Apu prit la parole en premier, sa voix rĂ©sonnant dans l’amphithĂ©Ăątre :

« Chers amis, nous sommes ici pour partager une vision qui combine le meilleur de deux mondes
 Â»

Alors qu’ils prĂ©sentaient leur projet de rĂ©novation des dortoirs, combinant les briques en terre crue et les panneaux photovoltaĂŻques, un projecteur derriĂšre eux affichait des simulations 3D de leurs concepts. Leurs mots Ă©taient ponctuĂ©s par des images de dortoirs transformĂ©s, de murs qui captaient l’énergie solaire et de jardins verts sur les toits.

Leurs idĂ©es furent accueillies avec un mĂ©lange d’étonnement et d’admiration. Les Ă©tudiants autour d’eux commencĂšrent Ă  discuter, Ă  poser des questions, Ă  offrir des suggestions.

Ce jour-lĂ , Stella et Apu ne furent pas seulement des Ă©tudiants prĂ©sentant un projet. Ils Ă©taient les porte-paroles d’une nouvelle Ăšre, oĂč la technologie et la tradition pouvaient coexister pour crĂ©er un avenir durable.

Monsieur Marcel, dans sa derniÚre leçon, regarda ses étudiants avec fierté.
« Vous avez dĂ©montrĂ© que, mĂȘme dans un monde fragmentĂ©, l’unitĂ© des idĂ©es et le respect mutuel peuvent crĂ©er des espaces qui non seulement survivent mais prospĂšrent. Â»
Apu et Stella, autrefois aux idĂ©es opposĂ©es, avaient appris la valeur de l’écoute et de l’adaptation. Leurs efforts avaient non seulement rĂ©novĂ© les dortoirs, mais avaient aussi Ă©clairĂ© la voie vers un avenir urbain plus durable et inclusif.

Ce texte a Ă©tĂ© Ă©crit par : Vilela Noah, Diker Amin et Kechid Lyam. et co-Ă©crit par Numa Hell

Contenu soumis Ă  la licence CC-BY-SA 4.0

 

Bibliographie

Passoire thermique

DPE

 

BĂątiments passifs

Un bĂątiment passif est une construction Ă©conome en Ă©nergie, conçue pour minimiser la consommation de chauffage, de climatisation et de ventilation. Il intĂšgre une isolation thermique Ă©levĂ©e, une Ă©tanchĂ©itĂ© Ă  l’air, une ventilation contrĂŽlĂ©e, des sources d’énergie renouvelable, une orientation optimale, des fenĂȘtres Ă  haute performance et des matĂ©riaux Ă  faible empreinte carbone. L’objectif est de rĂ©duire la dĂ©pendance aux systĂšmes Ă©nergĂ©tiques conventionnels, contribuant ainsi Ă  la durabilitĂ© environnementale.

GUILLEMOT, Olivier. « Le bĂątiment passif, sans chauffage ou presque Â». XPair, 4 juillet 2019, https://conseils.xpair.com/actualite_experts/batiment-passif-sans-chauffage.htm

 

Conductivité thermique

Les caractéristiques physiques clés pour une bonne isolation thermique sont principalement une faible conductivité thermique et, dans certains cas, une bonne masse thermique.
Les matĂ©riaux traditionnels de façade comme la pierre et le bĂ©ton ont une bonne inertie thermique mais ne sont pas les meilleurs isolants thermiques. Ainsi, des systĂšmes d’isolation additionnels sont souvent utilisĂ©s en conjonction avec ces matĂ©riaux ( Exemple : Façade VentilĂ©e)

 

Logiciel Heliodon

C’est un logiciel qui permet d’étudier les trajets solaires en tout lieu de la surface terrestre et d’analyser l’incidence de la lumiĂšre solaire directe, ainsi que de la lumiĂšre diffuse du ciel, sur n’importe quelle construction ou zone urbaine, en tenant compte des obstructions produites par d’autres Ă©difices ou obstacles naturels. Heliodon 2 – UTeam. https://uteam.fr/offres/heliodon-2. ConsultĂ© le 16 janvier 2024.

 

Albédo

C’est le pouvoir rĂ©flĂ©chissant d’une surface, c’est-Ă -dire le rapport du flux d’énergie lumineuse rĂ©flĂ©chie au flux d’énergie lumineuse incidente. C’est une grandeur sans dimension.

« AlbĂ©do Â». WikipĂ©dia, 18 novembre 2023, https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=AlbĂ©do&oldid=209733578.

 

Lowtechisation

La low-tech désigne tout type de produits, de services, de procédés ou autres systÚmes permettant, via une transformation technique, organisationnelle et culturelle, le développement de nouveaux modÚles de société intégrant, dans leurs principes fondamentaux, les exigences de durabilité forte et de résilience collective

« Low-tech Â». WikipĂ©dia, 12 janvier 2024, https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Low-tech&oldid=211451282.

 

Technosolutionnisme

C’est la confiance dans la technologie pour rĂ©soudre un problĂšme souvent crĂ©Ă© par des technologies antĂ©rieures. « Technosolutionnisme Â». WikipĂ©dia, 3 dĂ©cembre 2023, https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Technosolutionnisme&oldid=210223957.

Earth 2050 : A glimpse into the future | Kaspersky. https://2050.earth/users/artem-khorchev. ConsultĂ© le 19 janvier 2024.


La réno pour les rollots

Pierrette, femme Ă©nergique et engagĂ©e, jongle entre son rĂŽle de mĂšre, son poste Ă  l’UPLOAD de CompiĂšgne et son engagement pour un mode de vie durable. RĂ©sidant dans un Ă©coquartier, elle apprĂ©cie chaque jour la nature environnante, se dĂ©plaçant en vĂ©lo cargo pour rĂ©duire son empreinte Ă©cologique. Chaque matin, Ă  8h20, elle dĂ©pose ses enfants, LĂ©o et LĂ©a, Ă  la Maison d’Assistantes Maternelles (MAM) de l’écoquartier, avant de se rendre Ă  son travail.

Son bureau Ă  l’UniversitĂ©, un espace ouvert vĂ©gĂ©talisĂ©, reflĂšte ses convictions Ă©cologiques profondes. Responsable de projets depuis 14 ans, Pierrette est au cƓur de l’innovation en matiĂšre de dĂ©veloppement durable. Elle doit sĂ©lectionner des sujets d’étude qui permettent aux Ă©tudiants d’acquĂ©rir des connaissances tout en rendant service Ă  la communautĂ© locale. Ces projets gĂ©nĂšrent Ă©galement des fonds pour le fonctionnement de l’universitĂ©.

Le 2 octobre 2042, aprĂšs son arrivĂ©e au bureau, Pierrette consulte la plateforme Viv’Compi, une instance locale de Mastodon qui hĂ©berge les appels d’offres des habitants de CompiĂšgne. Parmi eux, l’appel de JoĂ«l Dumasil, exploitant agricole spĂ©cialisĂ© dans l’élevage de bovins, retient son attention. Il souhaite rĂ©nover un vieux corps de ferme pour crĂ©er un espace de stockage et de vente, promouvant ainsi le circuit court pour ses produits. IntriguĂ©e par cette initiative locale et Ă©cologique, Pierrette dĂ©cide de le contacter.

— AllĂŽ, bonjour. Ici Pierrette ChĂ©nier, responsable projet Ă  l’universitĂ© UPLOAD. Je vous contacte suite au message que vous avez postĂ© pour la rĂ©novation de votre corps de ferme. Pouvez-vous m’en dire un peu plus ?

— Bonjour M’dame. Ouais je suis fermier. J’veux refaire mon vieux corps de ferme. Comme la nouvelle boutique de vente de produit laitier à Creil là.

— Oui
 je vois
 mais quel genre de produits laitiers envisagez-vous de vendre ?

— Euh ben, je suis dans l’élevage bovin et la production de lait. Mais ça devient dur et j’aimerais bien transformer une partie de mon vieux corps de ferme en un endroit sympa oĂč les gens pourront acheter du fromage, du lait frais et du maroilles ou d’la tome au cidre.

En plus de tout cas, j’prĂ©vois aussi d’avoir un coin pour avoir du stock Tout ça, pour mettre en place du circuit court. Ça m’permettrait aussi de vendre les rollots que j’fais Ă  plus juste prix.

— TrĂšs bien, c’est un projet qui conviendra bien Ă  nos Ă©tudiants en derniĂšre annĂ©e, ils pourront voir ça avec vous dĂšs le


Joël coupe la parole brutalement à Pierrette.

— Je t’arrĂȘte tout de suite m’dame, j’pense pas que ce genre de projet puisse ĂȘtre confiĂ© Ă  des gamins Ă©tudiants. Faut des tĂȘtes bien pleines, des gens qui savent faire des calculs de structure, thermique et autres. J’ai pas envie que mon bĂątiment tombe sur la tĂȘte des clients ou que mes fromages tournent.

— Je comprends que vous soyez rĂ©ticent, mais je vous assure que nos Ă©tudiants sont encadrĂ©s par des enseignants compĂ©tents et professionnels. Nous avons ici Ă  l’universitĂ© des experts en conception de bĂątiments, au fait des derniĂšres normes de sĂ©curitĂ© alimentaire. Le mieux c’est que vous les rencontriez pour leur expliquer ce que vous souhaitez exactement, d’accord ?

— J’suis pas totalement convaincu, mais ça coĂ»te rien de se rencontrer. Quand est—ce qu’on pourrait avoir un rendez-vous ?

— Je vous propose de se rencontrer demain Ă  9h sur le site de l’universitĂ©.

— Trùs bien. À d’main.

Rollot de MarchĂ©lepot (Somme) Par Bycro — Travail personnel, CC BY-SA 4.0

 

Pierrette convoque ensuite Maxime dans son bureau pour prĂ©parer cette entrevue. C’est un Ă©lĂšve de cinquiĂšme annĂ©e, chef des projets de sa promo. TrĂšs apprĂ©ciĂ© par ses professeurs et ses camarades, il s’investit beaucoup dans la vie de son Ă©cole. Adepte de la course Ă  pied, il organise dĂšs qu’il le peut des courses caritatives pour venir en aide aux plus dĂ©munis.

— Bonjour Maxime, Dis-moi, nous avons un Ă©leveur qui veut transformer un vieux corps de ferme en espace de stockage et de vente en circuit court. Ce monsieur
 euh JoĂ«l Dumasil
 a de belles ambitions, mais ça nĂ©cessiterait une rĂ©novation complĂšte. C’est typiquement la taille de projet que tu peux encadrer, et ce serait une bonne initiative pour la certification de ton groupe.

— Merci ! Mais tout d’abord, je vĂ©rifierai la prĂ©sence d’amiante. Dans les constructions des annĂ©es 80, c’est frĂ©quent. Je suggĂšre de poser des questions spĂ©cifiques Ă  JoĂ«l sur ce point pour Ă©viter des complications coĂ»teuses.

— Bonne idĂ©e. Tu vois d’autres points importants Ă  Ă©tudier ?

— L’accessibilitĂ© est souvent nĂ©gligĂ©e, mais cela peut changer un projet. je vais voir ça avec des Ă©tudiants de 4e annĂ©e qui ont bossĂ© lĂ -dessus. On pourrait aussi dĂ©lĂ©guer certaines tĂąches aux Ă©tudiants de premiĂšre annĂ©e pour les impliquer davantage, et les heures supplĂ©mentaires compteront comme des TVO1 pour eux, ça devrait les motiver.

—  Parfait, s’exclame Pierrette. Alors rĂ©union ici demain avec notre Ă©leveur.

 

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Le lendemain, Pierrette a demandĂ© a dĂ©posĂ© LĂ©o et LĂ©a Ă  la MAM avant de se rendre dans la salle de rĂ©union. Au RER2 elle rĂ©cupĂšre du cafĂ© et quelques parts de moelleux aux pommes cuisinĂ© sur place pour le petit dĂ©jeuner des Ă©tudiants et de l’administration. Eh oui, Ă  l’UPLOAD, il y a des Ă©lĂšves qui savent pĂątisser en plus de cuisiner de succulentes ratatouilles avec les bons lĂ©gumes frais qu’ils cultivent.

Maxime arrive, il a eu un réveil un peu difficile et il apprécie le petit déjeuner.

— Eh bien hier soir Ă  l’internat, j’ai discutĂ© tard dans la nuit avec Kevin et on a parlĂ© de l’accessibilitĂ© du point de vente pour les personnes Ă  mobilitĂ© rĂ©duite (PMR). Sa petite sƓur s’est retrouvĂ©e en fauteuil roulant pendant une courte pĂ©riode. Il m’a expliquĂ© qu’avant il n’en avait pas conscience, mais que beaucoup d’endroits ne sont pas encore accessibles aux PMR. Je savais que les bĂątiments accueillant du public doivent se mettre « aux normes Â», mais je n’avais pas vraiment conscience de toutes les difficultĂ©s que ça entraĂźnait. Alors j’ai fait quelques recherches avec Solar’IA. C’est chouette cette intelligence artificielle une fois qu’on l’a en main ! J’ai gagnĂ© pas mal de temps pour pointer les trucs essentiels.

— J’ai par exemple dĂ©couvert que cette histoire d’accessibilitĂ© aux PMR Ă©tait rĂ©gi par une norme prĂ©cise, l’AFNOR NF P98-351. J’ai rĂ©ussi Ă  y accĂ©der depuis le portail de l’UPLOAD et j’ai pu la survoler pour me faire une petite idĂ©e de l’ampleur des exigences Ă  respecter. Heureusement pour moi qu’internet fonctionne entre 22h et 6h !

Bon, je vais aborder ce point en prioritĂ© avec lui, car ça peut changer toute la mobilitĂ© au sein des espaces. Par exemple, il faut, selon la norme, a minima des portes d’une largeur de 1,20m et ainsi qu’une rampe d’accĂšs inclinĂ©e Ă  5 % de cette mĂȘme largeur.

À cet instant, JoĂ«l, apprĂȘtĂ© pour l’occasion, franchit l’entrĂ©e de l’UPLOAD et Pierrette l’accueille.
— Vous ĂȘtes monsieur Dumasil ? C’est moi que vous avez eu au tĂ©lĂ©phone,
— EnchantĂ© M’dame, vous pouvez m’appeler JoĂ«l et me tutoyer.
— TrĂšs bien, j’essayerai d’y veiller. Je te prĂ©sente Maxime, un Ă©lĂšve de cinquiĂšme annĂ©e, il encadrera le projet.
Maxime lui tend une main qu’il espĂšre ferme et assurĂ©e :
— Bonjour monsieur, ravi de vous rencontrer !
JoĂ«l, lui rend une poignĂ©e de main vigoureuse :
— EnchantĂ© !
Pierrette les conduit dans un bureau et la discussion s’engage assez vite. MĂ©fiant, JoĂ«l ne peut se retenir de lancer Ă  Maxime :
— T’as pensĂ© Ă  l’amiante qu’il y a dans mon corps de ferme ?
Avec un sourire, Maxime le rassure :
— DĂšs la rĂ©ception de votre appel d’offre, nous avons pensĂ© Ă  sa potentielle prĂ©sence d’amiante dans votre bĂątiment, des Ă©tudiant⋅es de l’UPLOAD ont dĂ©jĂ  dĂ©samiantĂ© de vieux bĂątiments. Pouvez-vous me rappeler de quelle annĂ©e date le vĂŽtre ?

Maxime a son idĂ©e derriĂšre la tĂȘte, car il a dĂ©jĂ  fait un projet de rĂ©novation de bĂątiment. Il sait trĂšs bien que la poussiĂšre d’amiante est trĂšs fine et donc dangereuse pour les ĂȘtres vivants. Il explique donc le dĂ©tail Ă  JoĂ«l : un protocole trĂšs strict sera imposĂ©. Les ouvriers installeront une zone de sĂ©curitĂ© autour du bĂątiment et bĂącheront toutes les ouvertures afin de retenir la poussiĂšre. AprĂšs quoi l’équipe possĂ©dant les habilitations amiante SS3 et SS4 installera une cabine Ă  l’entrĂ©e du bĂątiment dans laquelle les ouvriers s’équiperont d’une combinaison intĂ©grale et de masques FFP3. Au final, les parties amiantĂ©es retirĂ©es seront mises en sacs Ă©tanches pour finir en centre d’enfouissement.

— Il a Ă©tĂ© construit dans les annĂ©es 80 par mon arriĂšre-grand-pĂšre. Il est en briques rouges, sur une dalle en bĂ©ton. J’peux te dire que ce bĂątiment a bien vĂ©cu, mon ami, tu l’verras Ă  l’état des murs qui s’affaissent sous l’poids de la toiture. Elle a pris la flotte, elle est percĂ©e de partout


Il s’interrompt, saisit un carnet dans sa poche et se met à chercher


— J’note tout pour rien oublier. Alors
 Bon j’suis pas embĂȘtant sur la maniĂšre de rĂ©aliser les travaux, mais j’veux rĂ©utiliser un maximum de matĂ©riaux pour que ça coĂ»te moins cher


— On est d’accord pour le recyclage et le rĂ©emploi des matĂ©riaux, enchaĂźne Maxime.

— Oui par exemple, j’ai une poutre porteuse dans l’hangar, je pense qu’avec les prix du bois de plus en plus chers, j’peux la rĂ©utiliser pour la structure. En plus Ă  vot’Radio Padakor ils ont dit, faut faire gaffe Ă  ça, peut y a voir des accidents


— Alors monsieur Dujardin c’est sans problĂšme pour certains Ă©lĂ©ments de votre bĂątiment, mais pour votre poutre ce n’est pas possible. Je suis dĂ©solĂ©, mais les assurances ne valident pas ça, par risque que les rĂ©sistances soient modifiĂ©es. Mais ne vous en faites pas, on va essayer de rĂ©utiliser au maximum vos matĂ©riaux. Par exemple, votre poutre, on pourrait en faire un comptoir pour le point de vente. Il suffirait de la scier correctement, de la poncer puis de la vernir.

— Ah mais, c’est que tu t’y connais bien finalement ! Si tu veux, j’ai quelques copains du temps oĂč j’étais Ă  l’école du bois, avant de reprendre la ferme de mon pĂšre
 J’peux te les prĂ©senter. C’est des experts en charpente, des as ces gars-lĂ . On pourrait les faire venir pour jeter un coup d’Ɠil Ă  la poutre et discuter des possibilitĂ©s de rĂ©novation.

JoĂ«l s’animait en parlant de ses souvenirs, Ă©voquant les compĂ©tences spĂ©cifiques de chacun et les projets rĂ©alisĂ©s dans leur centre de formation. Ses yeux brillaient Ă  l’évocation de ce qui avait Ă©tĂ© visiblement un formidable moment de sa vie.

— C’est des gars gĂ©niaux, passionnĂ©s par leur travail. Ce que j’adore chez eux c’est qu’ils travaillent localement, ils utilisent seulement le bois qui pousse dans l’Oise, il y a rien de tel que des rĂ©sineux, sapins ou Ă©picĂ©as. Et ils respectent les cycles : ils coupent uniquement des arbres matures et veillent Ă  en laisser suffisamment pour la rĂ©gĂ©nĂ©ration naturelle du domaine forestier
 SergueĂŻ, lui c’est mon meilleur pote. Il vient de Russie et il nous a montrĂ© des superbes techniques pour sculpter l’bois. J’me souviens il avait fait une colombe ou on voyait chaque plume, pour l’élu de son cƓur, AndrĂ©, et aujourd’hui ils ont adoptĂ© 2 enfants ! Que ça passe vite
 M’enfin, il pourrait sĂ»rement faire quelque chose d’original qu’on remarquerait directement en passant la porte de la boutique


Y’a aussi son associĂ© Stefano, charpentier de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration. Si on a un doute, on pourra faire appel Ă  son pĂšre, Fabio, il est incollable. J’ai tout le matos dont on aura besoin Ă  la maison pour s’occuper de ça : un Ă©tabli, une scie circulaire robuste, une ponceuse et mĂȘme du vernis Ă©cologique, ça sera dĂ©jĂ  ça d’moins Ă  prĂ©voir dans le devis.

Photo pxhere.com licence CC0

 

Maxime, captivĂ© par ces aspects du projet, ajoute :

— On a aussi pensĂ© Ă  une idĂ©e pour attirer plus de monde. En installant des portes larges et un rampe d’accĂšs depuis un parking adaptĂ©, les personnes en fauteuil roulant pourraient profiter de vos produits. On ne va pas trop rentrer plus dans le dĂ©tail aujourd’hui, mais vous voyez l’idĂ©e. Je vais demander Ă  mes camarades compĂ©tents dans le domaine et on viendra directement Ă©valuer tous les travaux sur place. Vous ĂȘtes d’accord pour nous recevoir ?

— Alors lĂ  Maxime, ça me touche que tu penses tout de suite au handicap. J’suis si heureux de voir comme les mentalitĂ©s ont changĂ©, c’était pas si Ă©vident Ă  mon Ă©poque


Sinon, j’suis tous les jours à ma ferme, et si j’y suis pas, j’suis dans mon tracteur. Venez quand vous voulez, y’aura quelqu’un pour vous accueillir les bras grand ouverts.

Mais n’oublie pas que j’ai une limite de prix. C’est pas possible pour moi que les frais dĂ©passent mon budget. J’ai eu une gĂ©nĂ©reuse prime de l’agora de CrĂ©py-en-Valois pour rĂ©nover mon vieux bĂątiment mais j’pourrais pas ajouter des mille et des cents.

— JoĂ«l, intervient Pierrette, ne vous en faites pas trop pour le prix, nous respecterons votre budget. Je voudrais Ă©galement prĂ©ciser que nos Ă©tudiants interviendront uniquement dans la dĂ©construction-reconstruction du bĂąti et non pas dans l’amĂ©nagement proprement dit, il ne s’occuperont donc pas de la mise en place de votre matĂ©riel.

— Oui, ben Ă©videmment, j’m’occupe moi-mĂȘme du matos pour la fabrication du fromage.

— VoilĂ  ! Super, conclut Maxime, nous sommes d’accord
 Je vais m’occuper du recrutement puis nous conviendrons d’un crĂ©neau pour venir sur votre exploitation. Merci de votre venue.

JoĂ«l se lĂšve de sa chaise :
— Avec plaisir ! Maxime, par contre les prochaines fois, tutoie-moi, pas de gĂȘne entre nous gamin, on va travailler ensemble. Et merci Pierrette d’avoir pris le temps d’étudier mon projet.

Texte sous licence CC-BY-SA.
Autrices et auteurs : Gros Arthur, Pinabiaux Luka, Poirier AglaĂ©, RiviĂšre Auguste.

 

BIBLIOGRAPHIE

Réglementation autour du désamiantage

Une feuille de route pour le traitement des dĂ©chets amiantĂ©s, CGEDD CGE de l’économie et du dĂ©veloppement durable N° 013959-01, https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/cge/dechets-amiante.pdf
Amiot-Than-Trong Yvette. L’amiante. In : Droit et Ville, tome 46, 1998. pp. 213-222. DOI : https://doi.org/10.3406/drevi.1998.1479 https://persee.fr/doc/drevi_0396-4841_1998_num_46_1_1479

Contamination des sols par l’exploitation agricole

  • Cours / UTC / UB09 / ProcĂ©dĂ©s de traitement des polluantes dans les sols A23 (Edvina Lamy)
  • Vincent Chatellier. L’élevage bovin et l’environnement en France : le diagnostic justifie-t-il des alternatives techniques ?. Productions Animales, 2003, 16 (4), pp.231-249. ffhal-02678699ff (augmentation des teneurs en nitrates et en phosphore des eaux, Ă©mission de gaz Ă  effet de serre)

 

  • Norme AFNOR NF U 44 551, version Mai 2002. Supports de culture : DĂ©nominations, spĂ©cifications, marquage.
  • DĂ©construction : Cours / UTC / AP / Éco circulation P23 (Fabien Lamarque et Nathalie Molines)

AccĂšs PMR

Norme AFNOR NF P98-351, version AoĂ»t 2021. Cheminements — Insertion des personnes handicapĂ©es — Éveil de vigilance — CaractĂ©ristiques, essais et rĂšgles d’implantation des dispositifs podotactiles au sol d’éveil de vigilance Ă  l’usage des personnes aveugles ou malvoyantes

David Revoy, un artiste face aux IA génératives

Par : Goofy
2 juillet 2023 Ă  05:42

Depuis plusieurs annĂ©es, Framasoft est honorĂ© et enchantĂ© des illustrations que lui fournit David Revoy, comme sont ravi⋅es les lectrices et lecteurs qui apprĂ©cient les aventures de Pepper et Carrot et les graphistes qui bĂ©nĂ©ficient de ses tutoriels. Ses crĂ©ations graphiques sont sous licence libre (CC-BY), ce qui est un choix courageux compte tenu des « Ă©diteurs Â» dĂ©pourvus de scrupules comme on peut le lire dans cet article.

Cet artiste talentueux autant que gĂ©nĂ©reux explique aujourd’hui son embarras face aux IA gĂ©nĂ©ratives et pourquoi son Ă©thique ainsi que son processus crĂ©atif personnel l’empĂȘchent de les utiliser comme le font les « IArtistes Â»â€Š

Article original en anglais sur le blog de David Revoy

Traduction : Goofy, rĂ©visĂ©e par l’auteur.

Intelligence artificielle : voici pourquoi je n’utiliserai pas pour mes crĂ©ations artistiques de hashtag #HumanArt, #HumanMade ou #NoAI

par David REVOY

 

Pepper sur une chaise entourée de flammes, reprise d'un célÚbre mÚme "this is fine"

Image d’illustration : « This is not fine Â», licence CC-BY 4.0, source en haute rĂ©solution disponible

« C’est cool, vous avez utilisĂ© quel IA pour faire ça ? Â»

« Son travail est sans aucun doute de l’IA Â»

« C’est de l’art fait avec de l’IA et je trouve ça dĂ©primant
 Â»


 voilĂ  un Ă©chantillon des commentaires que je reçois de plus en plus sur mon travail artistique.

Et ce n’est pas agrĂ©able.

Dans un monde oĂč des lĂ©gions d’IArtistes envahissent les plateformes comme celles des mĂ©dias sociaux, de DeviantArt ou ArtStation, je remarque que dans l’esprit du plus grand nombre on commence Ă  mettre l’Art-par-IA et l’art numĂ©rique dans le mĂȘme panier. En tant qu’artiste numĂ©rique qui crĂ©e son Ɠuvre comme une vraie peinture, je trouve cette situation trĂšs injuste. J’utilise une tablette graphique, des layers (couches d’images), des peintures numĂ©riques et des pinceaux numĂ©riques. J’y travaille dur des heures et des heures. Je ne me contente pas de saisir au clavier une invite et d’appuyer sur EntrĂ©e pour avoir mes images.
C’est pourquoi j’ai commencĂ© Ă  ajouter les hashtags #HumanArt puis #HumanMade Ă  mes Ɠuvres sur les rĂ©seaux sociaux pour indiquer clairement que mon art est « fait Ă  la main Â» et qu’il n’utilise pas Stable Diffusion, Dall-E, Midjourney ou n’importe quel outil de gĂ©nĂ©ration automatique d’images disponible aujourd’hui. Je voulais clarifier cela pour ne plus recevoir le genre de commentaires que j’ai citĂ©s au dĂ©but de mon intro. Mais quel est le meilleur hashtag pour cela ?

Je ne savais pas trop, alors j’ai lancĂ© un sondage sur mon fil Mastodon

sondage sur le fil mastodon de David : Quel hashtag recommanderiez-vous à un artiste qui veut montrer que son art n'est paz créé par IA ? réponses : 55% #HumanMade 30% #Human Art 15% Autre (commentez)

Source : https://framapiaf.org/@davidrevoy/110618065523294522

RĂ©sultats

Sur 954 personnes qui ont votĂ© (je les remercie), #HumanMade l’emporte par 55 % contre 30 % pour #HumanArt. Mais ce qui m’a fait changer d’idĂ©e c’est la diversitĂ© et la richesse des points de vue que j’ai reçus en commentaires. Bon nombre d’entre eux Ă©taient privĂ©s et donc vous ne pouvez pas les parcourir. Mais ils m’ont vraiment fait changer d’avis sur la question. C’est pourquoi j’ai dĂ©cidĂ© de rĂ©diger cet article pour en parler un peu.

Critiques des hashtags #HumanMade et #HumanArt

Tout d’abord, #HumanArt sonne comme une opposition au cĂ©lĂšbre tag #FurryArt de la communautĂ© Furry. Bien vu, ce n’est pas ce que je veux.

Et puis #HumanMade est un choix qui a Ă©tĂ© critiquĂ© parce que l’IA aussi Ă©tait une crĂ©ation humaine, ce qui lui faisait perdre sa pertinence. Mais la plupart des personnes pouvaient facilement comprendre ce que #HumanMade signifierait sous une crĂ©ation artistique. Donc 55 % des votes Ă©tait un score cohĂ©rent.

J’ai aussi reçu pas mal de propositions d’alternatives comme #HandCrafted, #HandMade, #Art et autres suggestions.

Le succĂšs de #NoAI

J’ai Ă©galement reçu beaucoup de suggestions en faveur du hashtag #NoAI, ainsi que des variantes plus drĂŽles et surtout plus crues. C’était tout Ă  fait marrant, mais je n’ai pas l’intention de m’attaquer Ă  toute l’intelligence artificielle. Certains de ses usages qui reposent sur des jeux de donnĂ©es Ă©thiques pourraient Ă  l’avenir s’avĂ©rer de bons outils. J’y reviendrai plus loin dans cet article.
De toutes façons, j’ai toujours essayĂ© d’avoir un Ă©tat d’esprit « favorable Ă  Â» plutĂŽt que « opposĂ© Ă  Â» quelque chose.

C’est aux artistes qui utilisent l’IA de taguer leur message

Ceci est revenu aussi trĂšs frĂ©quemment dans les commentaires. Malheureusement, les IArtistes taguent rarement leur travail, comme on peut le voir sur les rĂ©seaux sociaux, DeviantArt ou ArtStation. Et je les comprends, vu le nombre d’avantages qu’ils ont Ă  ne pas le faire.

Pour commencer, ils peuvent se faire passer pour des artistes sans grand effort. Ensuite, ils peuvent conférer à leur art davantage de légitimité à leurs yeux et aux yeux de leur public. Enfin, ils peuvent probablement éviter les commentaires hostiles et les signalements des artistes anti-IA des diverses plateformes.
Je n’ai donc pas l’espoir qu’ils le feront un jour. Je dĂ©teste cette situation parce qu’elle est injuste.
Mais rĂ©cemment j’ai commencĂ© Ă  apprĂ©cier ce comportement sous un autre angle, dans la mesure oĂč ces impostures pourraient ruiner tous les jeux de donnĂ©es et les modĂšles d’apprentissage : les IA se dĂ©vorent elles-mĂȘmes.

Quand David propose de saboter les jeux de donnĂ©es
 :-P 

Pas de hashtag du tout

La derniĂšre suggestion que j’ai frĂ©quemment reçue Ă©tait de ne pas utiliser de hashtag du tout.
En effet, Ă©crire #HumanArt, #HumanMade ou #NoAI signalerait immĂ©diatement le message et l’Ɠuvre comme une cible de qualitĂ© pour l’apprentissage sur les jeux de donnĂ©es Ă  venir. Comme je l’ai Ă©crit plus haut, obtenir des jeux de donnĂ©es rĂ©alisĂ©es par des humains est le futur dĂ©fi des IA. Je ne veux surtout pas leur faciliter la tĂąche.
Il m’est toujours possible d’indiquer mon Ă©thique personnelle en Ă©crivant « Ć’uvre rĂ©alisĂ©e sans utilisation de gĂ©nĂ©rateur d’image par IA qui repose sur des jeux de donnĂ©es non Ă©thiques Â» dans la section d’informations de mon profil de mĂ©dia social, ou bien d’ajouter simplement un lien vers l’article que j’écris en ce moment mĂȘme.

Conclusion et considérations sur les IA

J’ai donc pris ma dĂ©cision : je n’utiliserai pour ma crĂ©ation artistique aucun hashtag, ni #HumanArt, ni #HumanMade, ni #NoAI.
Je continuerai Ă  publier en ligne mes Ɠuvres numĂ©riques, comme je le fais depuis le dĂ©but des annĂ©es 2000.
Je continuerai Ă  tout publier sous une licence permissive Creative Commons et avec les fichiers sources, parce que c’est ainsi que j’aime qualifier mon art : libre et gratuit.

Malheureusement, je ne serai jamais en mesure d’empĂȘcher des entreprises dĂ©pourvues d’éthique de siphonner complĂštement mes collections d’Ɠuvres. Le mal est en tout cas dĂ©jĂ  fait : des centaines, voire des milliers de mes illustrations et cases de bandes dessinĂ©es ont Ă©tĂ© utilisĂ©es pour entraĂźner leurs IA. Il est facile d’en avoir la preuve (par exemple sur haveibeentrained.com  ou bien en parcourant le jeu de donnĂ©es d’apprentissage Laion5B).

Je ne suis pas du tout d’accord avec ça.

Quelles sont mes possibilitĂ©s ? Pas grand-chose
 Je ne peux pas supprimer mes crĂ©ations une Ă  une de leur jeu de donnĂ©es. Elles ont Ă©tĂ© copiĂ©es sur tellement de sites de fonds d’écran, de galeries, forums et autres projets. Je n’ai pas les ressources pour me lancer lĂ -dedans. Je ne peux pas non plus exclure mes crĂ©ations futures des prochaines moissons par scans. De plus, les mĂ©thodes de protection comme Glaze me paraissent une piĂštre solution au problĂšme, je ne suis pas convaincu. Pas plus que par la perspective d’imposer des filigranes Ă  mes images


Ne vous y trompez pas : je n’ai rien contre la technologie des IA en elle-mĂȘme.On la trouve partout en ce moment. Dans le smartphones pour amĂ©liorer les photos, dans les logiciels de 3D pour Ă©liminer le « bruit Â» des processeurs graphiques, dans les outils de traduction [N. de T. la prĂ©sente traduction a en effet Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e avec l’aide DeepL pour le premier jet], derriĂšre les moteurs de recherche etc. Les techniques de rĂ©seaux neuronaux et d’apprentissage machine sur les jeux de donnĂ©es s’avĂšrent trĂšs efficaces pour certaines tĂąches.
Les projets FLOSS (Free Libre and Open Source Software) eux-mĂȘmes comme GMIC dĂ©veloppent leurs propres bibliothĂšques de rĂ©seaux neuronaux. Bien sĂ»r elles reposeront sur des jeux de donnĂ©es Ă©thiques. Comme d’habitude, mon problĂšme n’est pas la technologie en elle-mĂȘme. Mon problĂšme, c’est le mode de gouvernance et l’éthique de ceux qui utilisent de telles technologies.

Pour ma part, je continuerai Ă  ne pas utiliser d’IA gĂ©nĂ©ratives dans mon travail (Stable Diffusion, Dall-E, Midjourney et Cie). Je les ai expĂ©rimentĂ©es sur les mĂ©dias sociaux par le passĂ©, parfois sĂ©rieusement, parfois en Ă©tant impressionnĂ©, mais le plus souvent de façon sarcastique .

Je n’aime pas du tout le processus des IA


Quand je crĂ©e une nouvelle Ɠuvre, je n’exprime pas mes idĂ©es avec des mots.
Quand je crĂ©e une nouvelle Ɠuvre, je n’envoie pas l’idĂ©e par texto Ă  mon cerveau.

C’est un mixage complexe d’émotions, de formes, de couleurs et de textures. C’est comme saisir au vol une scĂšne Ă©phĂ©mĂšre venue d’un rĂȘve passager rendant visite Ă  mon cerveau. Elle n’a nul besoin d’ĂȘtre traduite en une formulation verbale. Quand je fais cela, je partage une part intime de mon rĂȘve intĂ©rieur. Cela va au-delĂ  des mots pour atteindre certaines Ă©motions, souvenirs et sensations.
Avec les IA, les IArtistes se contentent de saisir au clavier un certains nombre de mots-clĂ©s pour le thĂšme. Ils l’agrĂ©mentent d’autres mots-clĂ©s, ciblent l’imitation d’un artiste ou d’un style. Puis ils laissent le hasard opĂ©rer pour avoir un rĂ©sultat. Ensuite ils dĂ©couvrent que ce rĂ©sultat, bien sĂ»r, inclut des Ă©motions sous forme picturale, des formes, des couleurs et des textures. Mais ces Ă©motions sont-elles les leurs ou bien un sous-produit de leur processus ? Quoi qu’il en soit, ils peuvent possĂ©der ces Ă©motions.

Les IArtistes sont juste des mineurs qui forent dans les Ɠuvres d’art gĂ©nĂ©rĂ©es artificiellement, c’est le nouveau Readymade numĂ©rique de notre temps. Cette technologie recherche la productivitĂ© au moindre coĂ»t et au moindre effort. Je pense que c’est trĂšs cohĂ©rent avec notre Ă©poque. Cela fournit Ă  beaucoup d’écrivains des illustrations mĂ©diocres pour les couvertures de leurs livres, aux rĂ©dacteurs pour leurs articles, aux musiciens pour leurs albums et aux IArtistes pour leurs portfolios


Je comprends bien qu’on ne peut pas revenir en arriĂšre, ce public se sent comme empuissantĂ© par les IA. Il peut finalement avoir des illustrations vite et pas cher. Et il va traiter de luddites tous les artistes qui luttent contre ça


Mais je vais persister ici Ă  dĂ©clarer que personnellement je n’aime pas cette forme d’art, parce qu’elle ne dit rien de ses crĂ©ateurs. Ce qu’ils pensent, quel est leur goĂ»t esthĂ©tique, ce qu’ils ont en eux-mĂȘmes pour tracer une ligne ou donner tel coup de pinceau, quelle lumiĂšre brille en eux, comment ils masquent leurs imperfections, leurs dĂ©licieuses inexactitudes en les maquillant
 Je veux voir tout cela et suivre la vie des personnes, Ɠuvre aprĂšs Ɠuvre.

J’espĂšre que vous continuerez Ă  suivre et soutenir mon travail artistique, les Ă©pisodes de mes bandes dessinĂ©es, mes articles et tutoriels, pour les mĂȘmes raisons.


Vous pouvez soutenir la travail de David Revoy en devenant un mécÚne ou en parcourant sa boutique.

Échirolles libĂ©rĂ©e ! La dĂ©googlisation (4)

Par : Goofy
31 mars 2023 Ă  01:42

Dans ce quatriĂšme volet du processus de dĂ©googlisation de la ville d’Échirolles (si vous avez manquĂ© le dĂ©but) Nicolas Vivant aborde le complexe problĂšme de la fracture numĂ©rique, qui demande d’aller au-delĂ  de la mĂ©diation pour trouver des structures et des moyens adaptĂ©es aux pratiques diverses des citoyens : la stratĂ©gie numĂ©rique doit aller de pair avec l’action sociale.


DĂ©googlisation d’Échirolles, partie 4 : l’inclusion numĂ©rique

La fracture numĂ©rique : un symptĂŽme parmi d’autres

Avec 36 % de logements sociaux et 3 quartiers « politique de la ville Â» Échirolles est, sans nul doute, une ville populaire. Plusieurs Ă©tudes sur les difficultĂ©s liĂ©es au numĂ©rique ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es sur notre territoire : l’une par notre CCAS (2019), l’autre par un cabinet indĂ©pendant (2020-2021). Si elles n’ont pas montrĂ© de situation spĂ©cifique Ă  notre commune, elles ont permis de mesurer l’étendue des problĂ©matiques qu’il est indispensable de travailler.

Quelles sont les populations qui rencontrent des difficultĂ©s avec le numĂ©rique ?

  • Les personnes ĂągĂ©es ;
  • les personnes en situation de prĂ©caritĂ© sociale ou financiĂšre ;
  • les personnes ne maĂźtrisant pas bien la langue française ;
  • les jeunes qui possĂšdent les outils, mais ne maĂźtrisent pas les usages ;
  • les personnes en situation de handicap ou qui souffrent de pathologies.

Notre CCAS adresse avec sĂ©rieux l’ensemble de ces enjeux. Nos maisons des habitants (anciennement « centres sociaux Â») jouent un rĂŽle majeur dans leur prise en charge, partout sur le territoire communal. Des Ă©quipes existent, avec qui il n’est pas envisageable de ne pas travailler. Pour autant, dans un effort de cohĂ©rence avec le schĂ©ma directeur « Ă‰chirolles numĂ©rique libre Â», nos Ă©lus et notre direction gĂ©nĂ©rale ont choisi de rattacher l’inclusion numĂ©rique Ă  la DSCN (Direction de la StratĂ©gie et de la Culture NumĂ©riques).

Conclusion : la fracture numĂ©rique n’est pas un problĂšme en tant que tel. C’est un symptĂŽme d’enjeux sociaux qui doivent rester prioritaires dans l’aide apportĂ©e Ă  nos habitants. Traiter la fracture numĂ©rique sans prendre en compte les problĂ©matiques sous-jacentes serait un pansement sur une jambe de bois. Un travail en transversalitĂ© est indispensable.

La mĂ©diation comme unique solution ?

Les Ă©tudes rĂ©alisĂ©es ont Ă©galement montrĂ© que les difficultĂ©s rencontrĂ©es par notre population ne se limitaient pas aux usages. Un vĂ©ritable effort d’inclusion numĂ©rique nĂ©cessite d’adresser 6 grands domaines :

1. L’accĂšs au matĂ©riel (PC, smartphones, systĂšmes d’impression) ;
2. l’accĂšs Ă  une connexion internet de qualitĂ© ;
3. la formation technique ;
4. l’information, l’éducation populaire aux grands enjeux du numĂ©rique ;
5. l’assistance aux usages, l’accĂšs au droit ;
6. le support matériel.

Les efforts de l’État et des collectivitĂ©s sur l’inclusion numĂ©rique reposent principalement sur la mĂ©diation numĂ©rique (les points 3, 4 et 5, donc). Dans le cadre du plan « France Relance Â», par exemple, l’ANCT (Agence Nationale de CohĂ©sion des Territoires) finance depuis 2021 le recrutement de « Conseillers NumĂ©riques France Services Â» dans les associations ou les collectivitĂ©s territoriales. Des « Maisons France Services Â» et des « Bus France Services Â» Ă©maillent Ă©galement nos rĂ©gions.

Pour les autres points (1, 2 et 6), seul le secteur privĂ© se positionne. On connaĂźt, par exemple, le travail d’associations comme EmmaĂŒs Connect pour la mise Ă  disposition de smartphones et de cartes SIM prĂ©payĂ©es, mais seuls les publics en grande prĂ©caritĂ© sont adressĂ©s.

La mise Ă  disposition, dans les communes, d’accĂšs publics, permet de rĂ©pondre, en partie, aux problĂ©matiques du manque de matĂ©riel et d’accĂšs Ă  internet. L’accĂšs aux tĂ©lĂ©services mis Ă  disposition (et souvent rendus obligatoires) par l’état et les grandes structures compĂ©tentes dans le domaine social, est possible depuis ce type de lieu. Mais la dimension intime de l’accĂšs au numĂ©rique n’est pas prise en compte : on ne contacte pas sa grand-mĂšre (ou sa compagne) en visioconfĂ©rence depuis un lieu public. On ne regarde pas une sĂ©rie ou un match de foot depuis une maison des habitants.

Sans faire l’effort de mettre Ă  la disposition des publics fragiles du matĂ©riel et une connexion Ă  internet de qualitĂ© Ă  domicile, on ne pratique pas une vĂ©ritable inclusion : ceux qui ont les moyens disposent d’accĂšs dans des conditions confortables et dans l’intimitĂ©, les autres doivent sortir, par tous les temps, pour bĂ©nĂ©ficier d’un accĂšs au numĂ©rique limitĂ©, Ă  des horaires qu’ils ne peuvent pas choisir et sous le regard de leurs concitoyens.

La mĂ©diation numĂ©rique ne peut constituer, Ă  elle seule, un dispositif d’inclusion numĂ©rique efficace et complet. Un travail plus ambitieux est indispensable. Nous essayons de nous y atteler (et ce n’est pas simple).

L’inclusion Ă  l’échirolloise

L’accĂšs au matĂ©riel

Pour la mise Ă  disposition de matĂ©riel pour ceux qui en ont le plus besoin, la ville a choisi de s’appuyer sur une association Ă©chirolloise rĂ©cente : PC solidaire (site en cours de dĂ©veloppement au moment oĂč cet article est rĂ©digĂ©). Le processus est en cours de crĂ©ation : notre DSI remettra son matĂ©riel usagĂ© Ă  cette association, qui se chargera de le reconditionner et de le remettre gratuitement, via les maisons des habitants, aux bĂ©nĂ©ficiaires.

L’association a eu l’excellente idĂ©e de se pencher sur le schĂ©ma directeur de la ville et a choisi, librement, de s’en inspirer. Le systĂšme d’exploitation par dĂ©faut devrait donc ĂȘtre le mĂȘme que celui est en cours de dĂ©ploiement : Zorin OS.

L’accùs à internet

C’est le point le plus difficile Ă  travailler, et de loin. L’offre Ă©tant exclusivement privĂ©e, nous essayons de nĂ©gocier avec les FAI (fournisseurs d’accĂšs Ă  internet) la mise en place d’une solution trĂšs abordable Ă  destination des bĂ©nĂ©ficiaires de logement sociaux. Des discussions sont en cours, mais aujourd’hui aucune offre vĂ©ritablement satisfaisante n’est en place. Seule proposition (pas suffisamment) connue, Ă  destination des populations bĂ©nĂ©ficiant des minima sociaux, celle d’Orange, « Coup de pouce Internet Â», Ă  15,99€/mois.

La formation, l’information et l’assistance

GrĂące Ă  un financement de l’ANCT, la Ville et son CCAS ont pu, en 2021, recruter 4 conseillers numĂ©riques. Ils interviennent dans les maisons des habitants, les bibliothĂšques et la maison des associations. SpĂ©cialisĂ©s dans la mĂ©diation numĂ©rique et formĂ©s dans le cadre du dispositif de l’État ils rĂ©alisent, depuis juillet 2021, des accompagnements individuels, des ateliers et des sessions de formation. Malheureusement, l’État annonce une baisse des financements et ces emplois sont menacĂ©s. Nous travaillons donc Ă  la mise en place d’un nouveau dispositif, pĂ©renne cette fois-ci, et qui ne dĂ©pendra pas de financements extĂ©rieurs.


Quelques-uns de nos conseillers, au travail dans une MDH

D’autres initiatives existent Ă  Échirolles depuis des annĂ©es : « Les Ă©crans, parlons-en ! Â», par exemple. Conçu par le service « Ă©ducation Â» de la ville en lien Ă©troit avec le CCAS, ce dispositif part du principe qu’une bonne hygiĂšne numĂ©rique passe aussi par l’éloignement raisonnĂ© des Ă©crans.

Mais encore ?

La ville a choisi de ne pas limiter son aide aux seuls habitants, mais aussi aux nombreuses associations qui animent le territoire (→ https://asso-echirolles.fr). Notre tissu associatif est riche de ses bĂ©nĂ©voles, dynamique et innovant dans ses actions. Sa contribution au « vivre ensemble Â» est majeure. L’étude « Ă‰chirolles numĂ©rique Â» de 2021 a montrĂ© que l’accĂšs aux ressources numĂ©riques Ă©tait trĂšs variable en fonction des associations. Nous avons donc dĂ©cidĂ© de leur apporter une aide sur deux volets : la crĂ©ation de sites web et (dans un second temps) la mise Ă  disposition d’outils numĂ©riques de gestion associative.

Le principe est simple : la DSI de la ville prend en charge l’hĂ©bergement, crĂ©e un sous-domaine dĂ©diĂ© Ă  l’association, installe un CMS (systĂšme de gestion de contenu) libre et gĂšre les mises Ă  jour (CMS, thĂšmes, extensions
) et les sauvegardes. 6 ateliers de formation sont organisĂ©s pour apprendre Ă  crĂ©er son contenu et Ă  faire vivre le site. À l’issue de ces ateliers, l’association administre son site en autonomie. En cas de problĂšme, un forum permet d’échanger avec le formateur et les autres associations qui bĂ©nĂ©ficient du dispositif. Le point fort : si les personnes en charge du site ne sont plus en mesure de s’en occuper, un retour en atelier est toujours possible pour qu’une nouvelle Ă©quipe s’en saisisse.

Inclusion vs dégooglisation

L’efficacitĂ© du dispositif d’inclusion numĂ©rique de la ville repose sur deux piliers principaux : le schĂ©ma directeur, boussole technique et politique de nos choix, et le travail en transversalitĂ©, qui garantit une prĂ©sence partout sur le territoire et la prise en compte de la problĂ©matique dans sa globalitĂ©. RattachĂ© Ă  la direction du numĂ©rique, il permet une action cohĂ©rente Ă  l’échelle de la ville.

Ce lien entre action sociale et stratĂ©gie numĂ©rique est l’une des forces d’Échirolles. Il est l’un des Ă©lĂ©ments qui permettent de faire rayonner le schĂ©ma directeur Ă  l’échelle de la commune, et pas seulement en interne. Mais une autre façon d’agir (et surtout d’interagir) au delĂ  sur pĂ©rimĂštre de la ville existe. Elle fera l’objet du cinquiĂšme et dernier article de cette sĂ©rie.

→ L’épisode 1 (structuration)
→ L’épisode 2 (transformation)
→ L’épisode 3 (solutions)
→ L’épisode 4 (vous ĂȘtes ici)
→ L’épisode 5 (fĂ©dĂ©ration)

***

Retrouvez-moi sur Mastodon : https://colter.social/@nicolasvivant

DĂ©mystifier les conneries sur l’IA – Une interview

Par : Goofy
22 février 2023 à 16:54

Cet article a Ă©tĂ© publiĂ© Ă  l’origine par THE MARKUP, il a Ă©tĂ© traduit et republiĂ© selon les termes de la licence Creative Commons Attribution-NonCommercial-NoDerivatives
Publication originale sur le site themarkup.org

DĂ©mystifier le buzz autour de l’IA

Un entretien avec Arvind Narayanan

par JULIA ANGWIN
Si vous avez parcouru tout le battage mĂ©diatique sur ChatGPT le dernier robot conversationnel qui repose sur l’intelligence artificielle, vous pouvez avoir quelque raison de croire que la fin du monde est proche.

Le chat « intelligent Â» de l’IA a enflammĂ© l’imagination du public pour sa capacitĂ© Ă  gĂ©nĂ©rer instantanĂ©ment des poĂšmes, des essais, sa capacitĂ© Ă  imiter divers styles d’écrits, et Ă  rĂ©ussir Ă  des examens d’écoles de droit et de commerce.

Les enseignants s’inquiĂštent de la tricherie possible de leurs Ă©tudiants (des Ă©coles publiques de New York City l’ont dĂ©jĂ  interdit). Les rĂ©dacteurs se demandent si cela ne va pas faire disparaĂźtre leur travail (BuzzFeed et CNET ont dĂ©jĂ  utilisĂ© l’IA pour crĂ©er des contenus). Le journal The Atlantic a dĂ©clarĂ© que cela pourrait « dĂ©stabiliser les professions de cadres supĂ©rieurs Â». L’investisseur en capital-risque Paul Kedrosky l’a qualifiĂ© de « bombe nuclĂ©aire de poche Â» et blĂąmĂ© ses concepteurs pour l’avoir lancĂ© dans une sociĂ©tĂ© qui n’y est pas prĂȘte.

MĂȘme le PDG de l’entreprise qui a lancĂ© ChatGPT, Sam Altman, a dĂ©clarĂ© aux mĂ©dias que le pire scĂ©nario pour l’IA pourrait signifier « notre extinction finale Â».

Cependant pour d’autres ce buzz est dĂ©mesurĂ©. Le principal scientifique chargĂ© de l’IA chez Meta’s AI, Yann LeCun, a dĂ©clarĂ© Ă  des journalistes que ChatGPT n’a « rien de rĂ©volutionnaire Â». Le professeur de langage informatique de l’universitĂ© de Washington Emily Bender prĂ©cise que « la croyance en un programme informatique omniscient vient de la science-fiction et devrait y rester Â».

Alors, jusqu’à quel point devrions-nous nous inquiĂ©ter ? Pour recueillir un avis autorisĂ©, je me suis adressĂ©e au professeur d’informatique de Princeton Arvind Narayanan, qui est en train de co-rĂ©diger un livre sur « Le charlatanisme de l’IA Â». En 2019, Narayanan a fait une confĂ©rence au MIT intitulĂ©e « Comment identifier le charlatanisme del’IA Â» qui exposait une classification des IA en fonction de leur validitĂ© ou non. À sa grande surprise, son obscure confĂ©rence universitaire est devenue virale, et ses diapos ont Ă©tĂ© tĂ©lĂ©chargĂ©es plusieurs dizaines de milliers de fois ; ses messages sur twitter qui ont suivi ont reçu plus de deux millions de vues.

Narayanan s’est alors associĂ© Ă  l’un de ses Ă©tudiants, Sayash Kapoor, pour dĂ©velopper dans un livre la classification des IA. L’annĂ©e derniĂšre, leur duo a publiĂ© une liste de 18 piĂšges courants dans lesquels tombent rĂ©guliĂšrement les journalistes qui couvrent le sujet des IA. Presque en haut de la liste : « illustrer des articles sur l’IA avec de chouettes images de robots Â». La raison : donner une image anthropomorphique des IA implique de façon fallacieuse qu’elles ont le potentiel d’agir dans le monde rĂ©el.

Narayanan est Ă©galement le co-auteur d’un manuel sur l’équitĂ© et l’apprentissage machine et dirige le projet Web Transparency and Accountability de l’universitĂ© de Princeton pour contrĂŽler comment les entreprises collectent et utilisent les informations personnelles. Il a reçu de la Maison-Blanche le Presidential Early Career Award for Scientists and Engineers [N. de T. : une distinction honorifique pour les scientifiques et ingĂ©nieurs qui entament brillamment leur carriĂšre].

Voici notre échange, édité par souci de clarté et briÚveté.

Angwin : vous avez qualifiĂ© ChatGPT de « gĂ©nĂ©rateur de conneries Â». Pouvez-vous expliquer ce que vous voulez dire ?

Narayanan : Sayash Kapoor et moi-mĂȘme l’appelons gĂ©nĂ©rateur de conneries et nous ne sommes pas les seuls Ă  le qualifier ainsi. Pas au sens strict mais dans un sens prĂ©cis. Ce que nous voulons dire, c’est qu’il est entraĂźnĂ© pour produire du texte vraisemblable. Il est trĂšs bon pour ĂȘtre persuasif, mais n’est pas entraĂźnĂ© pour produire des Ă©noncĂ©s vrais ; s’il gĂ©nĂšre souvent des Ă©noncĂ©s vrais, c’est un effet collatĂ©ral du fait qu’il doit ĂȘtre plausible et persuasif, mais ce n’est pas son but.

Cela rejoint vraiment ce que le philosophe Harry Frankfurt a appelĂ© du bullshit, c’est-Ă -dire du langage qui a pour objet de persuader sans Ă©gards pour le critĂšre de vĂ©ritĂ©. Ceux qui dĂ©bitent du bullshit se moquent de savoir si ce qu’ils disent est vrai ; ils ont en tĂȘte certains objectifs. Tant qu’ils persuadent, ces objectifs sont atteints. Et en effet, c’est ce que fait ChatGPT. Il tente de persuader, et n’a aucun moyen de savoir Ă  coup sĂ»r si ses Ă©noncĂ©s sont vrais ou non.

Angwin : Qu’est-ce qui vous inquiĂšte le plus avec ChatGPT ?

Narayanan : il existe des cas trĂšs clairs et dangereux de mĂ©sinformation dont nous devons nous inquiĂ©ter. Par exemple si des personnes l’utilisent comme outil d’apprentissage et accidentellement apprennent des informations erronĂ©es, ou si des Ă©tudiants rĂ©digent des essais en utilisant ChatGPT quand ils ont un devoir maison Ă  faire. J’ai appris rĂ©cemment que le CNET a depuis plusieurs mois maintenant utilisĂ© des outils d’IA gĂ©nĂ©rative pour Ă©crire des articles. MĂȘme s’ils prĂ©tendent que des Ă©diteurs humains ont vĂ©rifiĂ© rigoureusement les affirmations de ces textes, il est apparu que ce n’était pas le cas. Le CNET a publiĂ© des articles Ă©crits par une IA sans en informer correctement, c’est le cas pour 75 articles, et plusieurs d’entre eux se sont avĂ©rĂ©s contenir des erreurs qu’un rĂ©dacteur humain n’aurait trĂšs probablement jamais commises. Ce n’était pas dans une mauvaise intention, mais c’est le genre de danger dont nous devons nous prĂ©occuper davantage quand des personnes se tournent vers l’IA en raison des contraintes pratiques qu’elles affrontent. Ajoutez Ă  cela le fait que l’outil ne dispose pas d’une notion claire de la vĂ©ritĂ©, et vous avez la recette du dĂ©sastre.

Angwin : Vous avez dĂ©veloppĂ© une classification des l’IA dans laquelle vous dĂ©crivez diffĂ©rents types de technologies qui rĂ©pondent au terme gĂ©nĂ©rique de « IA Â». Pouvez-vous nous dire oĂč se situe ChatGPT dans cette taxonomie ?

Narayanan : ChatGPT appartient Ă  la catĂ©gorie des IA gĂ©nĂ©ratives. Au plan technologique, elle est assez comparable aux modĂšles de conversion de texte en image, comme DALL-E [qui crĂ©e des images en fonction des instructions textuelles d’un utilisateur]. Ils sont liĂ©s aux IA utilisĂ©es pour les tĂąches de perception. Ce type d’IA utilise ce que l’on appelle des modĂšles d’apprentissage profond. Il y a environ dix ans, les technologies d’identification par ordinateur ont commencĂ© Ă  devenir performantes pour distinguer un chat d’un chien, ce que les humains peuvent faire trĂšs facilement.

Ce qui a changĂ© au cours des cinq derniĂšres annĂ©es, c’est que, grĂące Ă  une nouvelle technologie qu’on appelle des transformateurs et Ă  d’autres technologies associĂ©es, les ordinateurs sont devenus capables d’inverser la tĂąche de perception qui consiste Ă  distinguer un chat ou un chien. Cela signifie qu’à partir d’un texte, ils peuvent gĂ©nĂ©rer une image crĂ©dible d’un chat ou d’un chien, ou mĂȘme des choses fantaisistes comme un astronaute Ă  cheval. La mĂȘme chose se produit avec le texte : non seulement ces modĂšles prennent un fragment de texte et le classent, mais, en fonction d’une demande, ces modĂšles peuvent essentiellement effectuer une classification Ă  l’envers et produire le texte plausible qui pourrait correspondre Ă  la catĂ©gorie donnĂ©e.

Angwin : une autre catĂ©gorie d’IA dont vous parlez est celle qui prĂ©tend Ă©tablir des jugements automatiques. Pouvez-vous nous dire ce que ça implique ?

Narayanan : je pense que le meilleur exemple d’automatisation du jugement est celui de la modĂ©ration des contenus sur les mĂ©dias sociaux. Elle est nettement imparfaite ; il y a eu Ă©normĂ©ment d’échecs notables de la modĂ©ration des contenus, dont beaucoup ont eu des consĂ©quences mortelles. Les mĂ©dias sociaux ont Ă©tĂ© utilisĂ©s pour inciter Ă  la violence, voire Ă  la violence gĂ©nocidaire dans de nombreuses rĂ©gions du monde, notamment au Myanmar, au Sri Lanka et en Éthiopie. Il s’agissait dans tous les cas d’échecs de la modĂ©ration des contenus, y compris de la modĂ©ration du contenu par l’IA.

Toutefois les choses s’amĂ©liorent. Il est possible, du moins jusqu’à un certain point, de s’emparer du travail des modĂ©rateurs de contenus humains et d’entraĂźner des modĂšles Ă  repĂ©rer dans une image de la nuditĂ© ou du discours de haine. Il existera toujours des limitations intrinsĂšques, mais la modĂ©ration de contenu est un boulot horrible. C’est un travail traumatisant oĂč l’on doit regarder en continu des images atroces, de dĂ©capitations ou autres horreurs. Si l’IA peut rĂ©duire la part du travail humain, c’est une bonne chose.

Je pense que certains aspects du processus de modĂ©ration des contenus ne devraient pas ĂȘtre automatisĂ©s. DĂ©finir oĂč passe la frontiĂšre entre ce qui est acceptable et ce qui est inacceptable est chronophage. C’est trĂšs compliquĂ©. Ça demande d’impliquer la sociĂ©tĂ© civile. C’est constamment mouvant et propre Ă  chaque culture. Et il faut le faire pour tous les types possibles de discours. C’est Ă  cause de tout cela que l’IA n’a pas de rĂŽle Ă  y jouer.

Angwin : vous dĂ©crivez une autre catĂ©gorie d’IA qui vise Ă  prĂ©dire les Ă©vĂ©nements sociaux. Vous ĂȘtes sceptique sur les capacitĂ©s de ce genre d’IA. Pourquoi ?

Narayanan : c’est le genre d’IA avec laquelle les dĂ©cisionnaires prĂ©disent ce que pourraient faire certaines personnes Ă  l’avenir, et qu’ils utilisent pour prendre des dĂ©cisions les concernant, le plus souvent pour exclure certaines possibilitĂ©s. On l’utilise pour la sĂ©lection Ă  l’embauche, c’est aussi cĂ©lĂšbre pour le pronostic de risque de dĂ©linquance. C’est aussi utilisĂ© dans des contextes oĂč l’intention est d’aider des personnes. Par exemple, quelqu’un risque de dĂ©crocher de ses Ă©tudes ; intervenons pour suggĂ©rer un changement de filiĂšre.

Ce que toutes ces pratiques ont en commun, ce sont des prĂ©dictions statistiques basĂ©es sur des schĂ©mas et des corrĂ©lations grossiĂšres entre les donnĂ©es concernant ce que des personnes pourraient faire. Ces prĂ©dictions sont ensuite utilisĂ©es dans une certaine mesure pour prendre des dĂ©cisions Ă  leur sujet et, dans de nombreux cas, leur interdire certaines possibilitĂ©s, limiter leur autonomie et leur ĂŽter la possibilitĂ© de faire leurs preuves et de montrer qu’elles ne sont pas dĂ©finies par des modĂšles statistiques. Il existe de nombreuses raisons fondamentales pour lesquelles nous pourrions considĂ©rer la plupart de ces applications de l’IA comme illĂ©gitimes et moralement inadmissibles.

Lorsqu’on intervient sur la base d’une prĂ©diction, on doit se demander : « Est-ce la meilleure dĂ©cision que nous puissions prendre ? Ou bien la meilleure dĂ©cision ne serait-elle pas celle qui ne correspond pas du tout Ă  une prĂ©diction ? Â» Par exemple, dans le scĂ©nario de prĂ©diction du risque de dĂ©linquance, la dĂ©cision que nous prenons sur la base des prĂ©dictions est de refuser la mise en libertĂ© sous caution ou la libĂ©ration conditionnelle, mais si nous sortons du cadre prĂ©dictif, nous pourrions nous demander : « Quelle est la meilleure façon de rĂ©habiliter cette personne au sein de la sociĂ©tĂ© et de diminuer les risques qu’elle ne commette un autre dĂ©lit ? Â» Ce qui ouvre la possibilitĂ© d’un ensemble beaucoup plus large d’interventions.

Angwin : certains s’alarment en prĂ©tendant que ChatGPT conduit Ă  “l’apocalypse,” pourrait supprimer des emplois et entraĂźner une dĂ©valorisation des connaissances. Qu’en pensez-vous ?

Narayanan : Admettons que certaines des prĂ©dictions les plus folles concernant ChatGPT se rĂ©alisent et qu’il permette d’automatiser des secteurs entiers de l’emploi. Par analogie, pensez aux dĂ©veloppements informatiques les plus importants de ces derniĂšres dĂ©cennies, comme l’internet et les smartphones. Ils ont remodelĂ© des industries entiĂšres, mais nous avons appris Ă  vivre avec. Certains emplois sont devenus plus efficaces. Certains emplois ont Ă©tĂ© automatisĂ©s, ce qui a permis aux gens de se recycler ou de changer de carriĂšre. Il y a des effets douloureux de ces technologies, mais nous apprenons Ă  les rĂ©guler.

MĂȘme pour quelque chose d’aussi impactant que l’internet, les moteurs de recherche ou les smartphones, on a pu trouver une adaptation, en maximisant les bĂ©nĂ©fices et minimisant les risques, plutĂŽt qu’une rĂ©volution. Je ne pense pas que les grands modĂšles de langage soient mĂȘme Ă  la hauteur. Il peut y avoir de soudains changements massifs, des avantages et des risques dans de nombreux secteurs industriels, mais je ne vois pas de scĂ©nario catastrophe dans lequel le ciel nous tomberait sur la tĂȘte.

Comme toujours, merci de votre attention.

À bientît,
Julia Angwin
The Markup

On peut s’abonner ici Ă  la lettre hebdomadaire (en anglais) du magazine The Markup, envoyĂ©e le samedi.

Contra Chrome : une BD dĂ©capante maintenant en version française

Par : Goofy
8 septembre 2022 Ă  06:25

Il y a loin de la promotion du navigateur Chrome Ă  ses dĂ©buts, un outil cool au service des internautes, au constat de ce qu’il est devenu, une plateforme de prĂ©dation de Google, c’est ce que permet de mesurer la bande dessinĂ©e de Leah,

Contra Chrome est un vĂ©ritable remix de la BD promotionnelle originale (lien vers le document sur google.com) que Leah Elliott s’est Ă©vertuĂ©e Ă  dĂ©tourner pour exposer la vĂ©ritable nature de ce navigateur qui a conquis une hĂ©gĂ©monie au point d’imposer ses rĂšgles au Web.

Nous avons trouvé malicieux et assez efficace son travail qui a consisté à conserver les images en leur donnant par de nouveaux textes un sens satirique et pédagogique pour démontrer la toxicité de Google Chrome.

La traduction qui est aujourd’hui disponible a Ă©tĂ© effectuĂ©e par les bĂ©nĂ©voles de Framalang et par Calimero (qui a multipliĂ© sans relĂąche les ultimes rĂ©visions). Voici en mĂȘme temps que l’ouvrage, les rĂ©ponses que Leah a aimablement acceptĂ© de faire Ă  nos questions.

 

Bonjour, peux-tu te présenter briÚvement pour nos lecteurs et lectrices

Je m’appelle Leah et je suis autrice de bandes dessinĂ©es et artiste. J’ai une formation en art et en communication, et je n’ai jamais travaillĂ© dans l’industrie technologique.

Est-ce que tu te considĂšres comme une militante pour la prĂ©servation de la vie privĂ©e ?

Eh bien, le militantisme en matiĂšre de vie privĂ©e peut prendre de nombreuses formes. Parfois, c’est ĂȘtre lanceur d’alerte en fuitant des rĂ©vĂ©lations, parfois c’est une bande dessinĂ©e, ou la simple installation d’une extension de navigateur comme Snowflake, avec laquelle vous pouvez donner aux dissidents des États totalitaires un accĂšs anonyme Ă  un internet non censurĂ©.

Dans ce dernier sens, j’espĂšre avoir Ă©tĂ© une militante avant de crĂ©er Contra Chrome, et j’espĂšre l’ĂȘtre encore Ă  l’avenir.

Comment t’es venue l’idĂ©e initiale de rĂ©aliser Contra Chrome ?

Ça s’est fait progressivement.

Lorsque la bande dessinĂ©e Chrome de Scott McCloud est sortie en 2008, je n’avais qu’une trĂšs vague idĂ©e du fonctionnement d’Internet et de la façon dont les entreprises rĂ©coltent et vendent mes donnĂ©es. Je me figurais essentiellement que je pouvais me cacher dans ce vaste chaos. Je pensais qu’ils rĂ©coltaient tellement de donnĂ©es alĂ©atoires dans le monde entier qu’ils ne pouvaient pas espĂ©rer me trouver, moi petite aiguille dans cette botte de foin planĂ©taire.

Et puis les rĂ©vĂ©lations de Snowden ont Ă©clatĂ©, et il a dit : « Ne vous y trompez pas Â», en dĂ©voilant tous les ignobles programmes de surveillance de masse. C’est alors que j’ai compris qu’ils ne se contenteraient pas de moissonner le foin, mais aussi des aiguilles.

Depuis, j’ai essayĂ© de m’éduquer et d’adopter de meilleurs outils, dĂ©couvrant au passage des logiciels libres et open source respectueux de la vie privĂ©e, dont certains des excellents services proposĂ©s par Framasoft.

Lorsque j’ai retrouvĂ© la bande dessinĂ©e de McCloud quelque temps aprĂšs les rĂ©vĂ©lations de Snowden, j’ai soudain rĂ©alisĂ© qu’il s’agissait d’un vĂ©ritable trĂ©sor, il ne manquait que quelques pages


Qu’est-ce qui t’a motivĂ©e, Ă  partir de ce moment ?

L’indignation, principalement, et le besoin de faire quelque chose contre un statu quo scandaleux. Il y a un dĂ©calage tellement affreux entre la sociĂ©tĂ© que nous nous efforçons d’ĂȘtre, fondĂ©e sur des valeurs et les droits de l’homme, et les Ă©normes structures d’entreprises barbares comme Google, qui rĂ©coltent agressivement des masses gigantesques de donnĂ©es personnelles sans jamais se soucier d’obtenir le consentement Ă©clairĂ© de l’utilisateur, sans aucune conscience de leurs responsabilitĂ©s sur les retombĂ©es individuelles ou sociĂ©tales, et sans aucun Ă©gard pour les consĂ©quences que cela a sur le processus dĂ©mocratique lui-mĂȘme.

En lisant Shoshana Zuboff, j’ai vu comment ce viol massif de donnĂ©es touche Ă  la racine de la libertĂ© personnelle de chacun de se forger sa propre opinion politique, et comment il renforce ainsi les rĂ©gimes et les modes de pensĂ©e autoritaires.

Trop de gens n’ont aucune idĂ©e de ce qui est activĂ© en continu 24 heures sur 24 au sein de leur propre maisons intelligente et sur les tĂ©lĂ©phones de leurs enfants, et je voulais contribuer Ă  changer ça.

Certains aspects de la surveillance via le navigateur Chrome sont faciles Ă  deviner, cependant ta BD va plus en profondeur et rĂ©vĂšle la chronologie qui va des promesses rassurantes du lancement Ă  la situation actuelle qui les trahit. Est-ce que tu as bĂ©nĂ©ficiĂ© d’aide de la part de la communautĂ© des dĂ©fenseurs de la vie privĂ©e sur certains aspects ou bien as-tu menĂ© seule ton enquĂȘte ?

Comme on peut le voir dans les nombreuses annotations Ă  la fin de la bande dessinĂ©e, il s’agit d’un Ă©norme effort collectif. En fin de compte, je n’ai fait que rassembler et organiser les conclusions de tous ces militants, chercheurs et journalistes. J’ai Ă©galement rencontrĂ© certains d’entre eux en personne, notamment des experts reconnus qui ont menĂ© des recherches universitaires sur Google pendant de nombreuses annĂ©es. Je leur suis trĂšs reconnaissante du temps qu’ils ont consacrĂ© Ă  ma bande dessinĂ©e, qui n’aurait jamais existĂ© sans cette communautĂ© dynamique.

Pourquoi avoir choisi un « remix Â» ou plutĂŽt un dĂ©tournement de la BD promotionnelle, plutĂŽt que de crĂ©er une bande dessinĂ©e personnelle avec les mĂȘmes objectifs ?

En relisant la BD pro-Google de McCloud, j’ai constatĂ© que, comme dans toute bonne bande dessinĂ©e, les images et le texte ne racontaient pas exactement la mĂȘme histoire. Alors que le texte vantait les fonctionnalitĂ©s du navigateur comme un bonimenteur sur le marchĂ©, certaines images me murmuraient Ă  l’oreille qu’il existait un monde derriĂšre la fenĂȘtre du navigateur, oĂč le contenu du cerveau des utilisateurs Ă©tait transfĂ©rĂ© dans d’immenses nuages, leur comportement analysĂ© par des rouages inquiĂ©tants tandis que des Ă©trangers les observaient Ă  travers un miroir sans tain.

Pour rendre ces murmures plus audibles, il me suffisait de rĂ©arranger certaines cases et bulles, un peu comme un puzzle Ă  piĂšces mobiles. Lorsque les Ă©lĂ©ments se sont finalement mis en place un jour, ils se sont mis Ă  parler d’une voix trĂšs claire et concise, et ont rĂ©vĂ©lĂ© beaucoup plus de choses sur Chrome que l’original.

Lawrence Lessig a expliquĂ© un jour que, tout comme les essais critiques commentent les textes qu’ils citent, les Ɠuvres de remixage commentent le matĂ©riel qu’elles utilisent. Dans mon cas, la BD originale de Chrome expliquait prĂ©tendument le fonctionnement de Chrome, et j’ai transformĂ© ce matĂ©riel en une BD qui rend compte de son vĂ©ritable fonctionnement.

Est-ce que tu as enregistrĂ© des rĂ©actions du cĂŽtĂ© de l’équipe de dĂ©veloppement de Chrome ? Ou du cĂŽtĂ© de Scott Mc Cloud, l’auteur de la BD originale ?

Non, c’est le silence radio. Du cĂŽtĂ© de l’entreprise, il semble qu’il y ait eu quelques opĂ©rations de nettoyage Ă  la Voldemort : Des employĂ©s de Google sur Reddit et Twitter, se sont conseillĂ© mutuellement de ne pas crĂ©er de liens vers le site, de ne pas y rĂ©agir dans les fils de discussion publics, exigeant mĂȘme parfois que les tweets contenant des images soient retirĂ©s.

Quant Ă  Scott, rien non plus jusqu’à prĂ©sent, et j’ai la mĂȘme curiositĂ© que vous.

Ton travail a suscitĂ© beaucoup d’intĂ©rĂȘt dans diverses communautĂ©s, de sorte que les traductions plusieurs langues sont maintenant disponibles (anglais, allemand, français et d’autres Ă  venir
). Tu t’attendais Ă  un tel succĂšs ?

Absolument pas. Le jour oĂč je l’ai mis en ligne, il n’y a eu aucune rĂ©action de qui que ce soit, et je me souviens avoir pensĂ© : « bah, tu t’attendais Ă  quoi d’autre, de toutes façons ? Â». Je n’aurais jamais imaginĂ© le raz-de-marĂ©e qui a suivi. Tant de personnes proposant des traductions, qui s’organisaient, tissaient des liens. Et tous ces messages de remerciement et de soutien, certaines personnes discutent de ma BD dans les Ă©coles et les universitĂ©s, d’autres l’impriment et la placent dans des espaces publics. Ça fait vraiment plaisir de voir tout ça.

Il y a une sorte de rĂ©confort Ă©trange dans le fait que tant d’ĂȘtres humains diffĂ©rents, de tous horizons et de tous les coins de la planĂšte, partagent ma tristesse et mon horreur face au systĂšme du capitalisme de surveillance. Cette tristesse collective ne devrait pas me rendre heureuse, et pourtant elle me donne le courage de penser Ă  un avenir trĂšs diffĂ©rent.

Quel navigateur utilises-tu au lieu de Chrome ? Lequel recommanderais-tu aux webnautes soucieux de prĂ©server leur vie privĂ©e ?

Je suis peut-ĂȘtre allĂ©e un peu loin dĂ©sormais, mais je pratique ce que je prĂȘche dans la BD : pour 95 % de ma navigation, j’utilise simplement le navigateur Tor. Et lorsque Tor est bloquĂ© ou lorsqu’une page ne fonctionne pas correctement, j’utilise Firefox avec quelques modifications et extensions pour amĂ©liorer la confidentialitĂ©.

Donc gĂ©nĂ©ralement, que je cherche des recettes de muffins, que je vĂ©rifie la mĂ©tĂ©o ou que je lise les nouvelles, c’est toujours avec Tor. Parce que j’ai l’impression que le navigateur Tor ne peut prendre toute sa valeur que si suffisamment de personnes l’utilisent en mĂȘme temps, pour qu’un brouillard suffisamment grand de non-sens triviaux entoure et protĂšge les personnes vulnĂ©rables dont la sĂ©curitĂ© dĂ©pend actuellement de son utilisation.

Pour moi, c’est donc une sorte de devoir civique en tant que citoyenne de la Terre. De plus, je peux parcourir mes recettes de muffins en ayant la certitude qu’il ne s’agit que d’un navigateur et non d’un miroir sans tain.

Merci Leah et Ă  bientĂŽt peut-ĂȘtre !


Cliquez sur l’image ci-dessous pour accĂ©der Ă  la version française de Contra chrome

 

Brian Eno n’aime pas les NFT – Open Culture (5)

Par : Goofy
24 août 2022 à 05:42

Le 5e numĂ©ro de notre mini-sĂ©rie de l’étĂ©, qui vagabonde librement d’un article de openculture.com Ă  l’autre, vous propose aujourd’hui de lire quelques propos assez vifs sur les NFT que l’on peut dĂ©finir grossiĂšrement comme des titres de propriĂ©tĂ©, enregistrĂ©s dans une sorte de « grand livre Â» numĂ©rique public et dĂ©centralisĂ© (en savoir plus avec ces questions/rĂ©ponses). Leur apparition ces derniĂšres annĂ©es suscite autant d’engouement spĂ©culatif que de critiques acerbes.

Voici par exemple le point de vue de Brian Eno, un musicien, producteur, compositeur dont la carriĂšre et la notoriĂ©tĂ© dans le monde de la musique sont immenses : les plus grands ont bĂ©nĂ©ficiĂ© de son talent, on lui doit le dĂ©veloppement et la popularisation d’un genre musical et nombreuses sont ses expĂ©rimentations artistiques, pas seulement musicales..

 

Article original : Brian Eno Shares His Critical Take on Art & NFTs : “I Mainly See Hustlers Looking for Suckers”

Traduction : Goofy

Brian Eno expose son point de vue critique sur l’art et les NFT : « Je vois surtout des arnaqueurs qui cherchent des pigeons Â»

par Josh Jones

Image via Wikimedia Commons

Dans notre monde marquĂ© par les inĂ©galitĂ©s, on peut avoir l’impression que nous n’avons plus grand-chose en commun, qu’il n’y a pas de « nous Â», mais seulement « eux Â» et « nous Â». Mais les multiples crises qui nous sĂ©parent ont aussi le potentiel d’unir l’espĂšce. AprĂšs tout, une planĂšte qui se rĂ©chauffe rapidement et une pandĂ©mie mondiale nous menacent tous, mĂȘme si elles ne nous menacent pas de la mĂȘme maniĂšre.

Les solutions existent-elles dans la crĂ©ation de nouvelles formes de propriĂ©tĂ© privĂ©e, de nouvelles façons de dĂ©placer le capital dans le monde ? Les sous-produits de la marchandisation et du gaspillage capitalistes, Ă  l’échelle de l’extinction, peuvent-ils ĂȘtre attĂ©nuĂ©s par de nouvelles formes ingĂ©nieuses de financiarisation ? Tels semblent ĂȘtre les arguments avancĂ©s par les zĂ©lateurs des crypto-monnaies et de NFT, un acronyme signifiant jetons non fongibles et – si vous ne l’avez pas encore remarquĂ© – qui semble la seule chose dont tout le monde parle aujourd’hui dans le monde de l’art.

Brian Eno a exprimĂ© son opinion sur le sujet de maniĂšre assez abrupte dans une interview rĂ©cente. « Les NFT me semblent juste un moyen pour les artistes d’obtenir une petite part du gĂąteau du capitalisme mondial Â», a-t-il dit sur le site The Crypto Syllabus. « Comme c’est mignon : maintenant les artistes peuvent aussi devenir de petits trous du cul de capitalistes Â». Il dĂ©sapprouve Ă©videmment l’utilisation de l’art uniquement pour gĂ©nĂ©rer des profits, car si nous avons appris quelque chose de la thĂ©orie de la crĂ©ativitĂ© et de l’influence d’Eno au cours des derniĂšres dĂ©cennies, c’est bien que selon lui le moteur principal de la crĂ©ation artistique est
 de gĂ©nĂ©rer davantage d’art.

« Si j’avais voulu gagner de l’argent avant tout, j’aurais eu une carriĂšre diffĂ©rente, comme n’importe qui d’autre. Je n’aurais probablement pas choisi d’ĂȘtre un artiste Â».

Il est tout Ă  fait inutile d’essayer de cataloguer Eno comme technophobe ou dĂ©connectĂ©, c’est tout le contraire. Mais les produits financiers fictifs qui ont envahi toutes les autres sphĂšres de la vie n’ont pas leur place dans les arts, affirme-t-il.

Lorsqu’on lui demande pourquoi les NFT sont prĂ©sentĂ©s comme un salut pour les artistes et le monde de l’art par les visionnaires des crypto-monnaies, parmi lesquels figurent nombre de ses amis et collaborateurs, Eno rĂ©pond :

Je peux comprendre pourquoi les personnes qui en ont profitĂ© sont satisfaites, et il est assez naturel dans un monde libertarien de croire que quelque chose qui vous profite doit automatiquement ĂȘtre « bon Â» pour le monde entier. Cette croyance est une version de ce que j’appelle « l’automatisme Â» : l’idĂ©e que si vous laissez les choses tranquilles et que vous laissez une chose ou l’autre – le marchĂ©, la nature, la volontĂ© humaine – suivre son cours sans entrave, vous obtiendrez automatiquement un meilleur rĂ©sultat qu’en intervenant. Les personnes qui ont ce genre de croyances n’ont aucun scrupule Ă  intervenir elles-mĂȘmes, mais veulent simplement une situation oĂč personne d’autre ne peut intervenir. Surtout pas l’État.

Le fait que la vente des NFT n’ait profitĂ© qu’à un trĂšs petit nombre de personnes – Ă  hauteur de 69 millions de dollars en une seule vente dans une affaire rĂ©cente trĂšs mĂ©diatisĂ©e – ne semble pas particuliĂšrement gĂȘner ceux qui insistent sur leurs avantages. Les crĂ©ateurs des NFT ne semblent pas non plus gĂȘnĂ©s par l’énorme surcharge Ă©nergĂ©tique que nĂ©cessite cette technologie, « un systĂšme pyramidal de cauchemar Ă©cologique Â», comme le dĂ©peint Synthtopia – dont Eno dit :

« dans un monde en rĂ©chauffement, une nouvelle technologie qui utilise de vastes quantitĂ©s d’énergie comme « preuve de travail Â», c’est-Ă -dire simplement pour Ă©tablir un certain Ăąge d’exclusivitĂ©, est vraiment insensĂ©e. Â»

Eno rĂ©pond volontiers aux questions sur les raisons pour lesquelles les NFT semblent si sĂ©duisantes – ce n’est pas un grand mystĂšre, juste une nouvelle forme d’accumulation, de marchandisation et de gaspillage, une forme en particulier qui n’ajoute rien au monde tout en accĂ©lĂ©rant l’effondrement du climat. Les NFT sont le « readymade inversĂ© Â», selon David Joselit : lĂ  oĂč « Duchamp utilisait la catĂ©gorie de l’art pour libĂ©rer la matĂ©rialitĂ© de la forme marchandisable, les NFT dĂ©ploient la catĂ©gorie de l’art pour extraire la propriĂ©tĂ© privĂ©e d’informations librement disponibles Â».

Le discours autour des NFT semble Ă©galement libĂ©rer l’art de la catĂ©gorie de l’art, et tout ce que cela a signifiĂ© pour l’humanitĂ© depuis des millĂ©naires en tant que pratique communautaire, rĂ©duisant les productions crĂ©atives Ă  des certificats numĂ©riques d’authenticitĂ©. « J’essaie de garder l’esprit ouvert sur ces questions Â», concĂšde Eno. « Des personnes que j’apprĂ©cie et en qui j’ai confiance sont convaincues que [les NFT] sont la meilleure chose depuis l’invention du pain en tranches, alors j’aimerais avoir une vision plus positive, mais pour l’instant, je vois surtout des arnaqueurs qui cherchent des pigeons. Â»

Pour aller plus loin

(en français)

(en anglais)

L’auteur de l’article
Josh Jones est un Ă©crivain et musicien de Durham, NC. Son compte twitter est @jdmagness


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Les conseils de Ray Bradbury Ă  qui veut Ă©crire – Open Culture (4)

Par : Goofy
18 août 2022 à 01:42

Dans le 4e Ă©pisode de notre mini-sĂ©rie de l’étĂ©, nous recueillons les conseils d’écriture de Ray Bradbury (oui, celui des Chroniques martiennes et Fahrenheit 451, entre autres) qu’il expose au fil d’une confĂ©rence rĂ©sumĂ©e pour vous dans cet article d’openculture.com, un portail trĂšs riche en ressources culturelles.
Ah, au fait, profitons-en pour vous rappeler que le Ray’s Day c’est lundi 22 aoĂ»t : en hommage au grand Ray, c’est l’occasion de lire des tas de textes en tous genres et de faire connaĂźtre les vĂŽtres et mĂȘme de les mettre en ligne. Rendez-vous sur le nouveau site du Ray’s Day qui sert de socle Ă  cette initiative.

 

Article original : Ray Bradbury Gives 12 Pieces of Writing Advice to Young Authors (2001)

Traduction : goofy

Ray Bradbury donne 12 conseils d’écriture aux jeunes auteur⋅e⋅s

par Colin Marshall

À l’instar de l’icĂŽne du genre Stephen King, Ray Bradbury est parvenu Ă  toucher un public bien plus large que celui auquel il Ă©tait destinĂ© en offrant des conseils d’écriture Ă  tous ceux qui prennent la plume. Dans ce discours prononcĂ© en 2001 lors du symposium des Ă©crivains organisĂ© par l’universitĂ© Point Loma Nazarene Ă  By the Sea, Ray Bradbury raconte des anecdotes tirĂ©es de sa vie d’écrivain, qui offrent toutes des leçons pour se perfectionner dans l’art d’écrire.

La plupart d’entre elles ont trait aux pratiques quotidiennes qui constituent ce qu’il appelle « l’hygiĂšne de l’écriture Â».

 

En regardant cette confĂ©rence divertissante et pleine de digressions, vous pourriez en tirer un ensemble de points totalement diffĂ©rents, mais voici, sous forme de liste, comment j’interprĂšte le programme de Bradbury :

  • Ne commencez pas par vouloir Ă©crire des romans. Ils prennent trop de temps. Commencez plutĂŽt votre vie d’écrivain en rĂ©digeant « un sacrĂ© paquet de nouvelles Â», jusqu’à une par semaine. Prenez un an pour le faire ; il affirme qu’il est tout simplement impossible d’écrire 52 mauvaises nouvelles d’affilĂ©e. Il a attendu l’ñge de 30 ans pour Ă©crire son premier roman, Fahrenheit 451. « Ă‡a valait le coup d’attendre, hein ? Â»
  • On peut les aimer, mais on ne peut pas les Ă©galer. Gardez cela Ă  l’esprit lorsque vous tenterez inĂ©vitablement, consciemment ou inconsciemment, d’imiter vos Ă©crivains prĂ©fĂ©rĂ©s, tout comme il a imitĂ© H.G. Wells, Jules Verne, Arthur Conan Doyle et L. Frank Baum.
  • Examinez des nouvelles « de qualitĂ© Â». Il suggĂšre Roald Dahl, Guy de Maupassant, et les moins connus Nigel Kneale et John Collier. Tout ce qui se trouve dans le New-Yorker d’aujourd’hui ne fait pas partie de ses critĂšres, car il trouve que leurs histoires sont « dĂ©pourvues de mĂ©taphores Â».
  • Bourrez-vous le crĂąne. Pour accumuler les blocs de construction intellectuelle de ces mĂ©taphores, il suggĂšre un cours de lecture Ă  l’heure du coucher : une nouvelle, un poĂšme (mais Pope, Shakespeare et Frost, pas les « conneries Â» modernes) et un essai. Ces essais devraient provenir de divers domaines, dont l’archĂ©ologie, la zoologie, la biologie, la philosophie, la politique et la littĂ©rature. « Au bout de mille nuits Â», rĂ©sume-t-il, « bon Dieu, vous saurez plein de trucs ! Â».
  • DĂ©barrassez-vous des amis qui ne croient pas en vous. Se moquent-ils de vos ambitions d’écrivain ? Il suggĂšre de les appeler pour les « virer Â» sans tarder.
  • Vivez dans la bibliothĂšque. Ne vivez pas dans vos « maudits ordinateurs Â». Il n’est peut-ĂȘtre pas allĂ© Ă  l’universitĂ©, mais ses habitudes de lecture insatiables lui ont permis d’ĂȘtre « diplĂŽmĂ© de la bibliothĂšque Â» Ă  28 ans.
  • Tombez amoureux des films. De prĂ©fĂ©rence des vieux films.
  • Écrivez avec joie. Dans son esprit, « l’écriture n’est pas une affaire sĂ©rieuse Â». Si une histoire commence Ă  ressembler Ă  du travail, mettez-la au rebut et commencez-en une qui ne l’est pas. « Je veux que vous soyez jaloux de ma joie Â», dit Bradbury Ă  son public.
  • Ne prĂ©voyez pas de gagner de l’argent. Avec son Ă©pouse, qui « a fait vƓu de pauvretĂ© pour l’épouser Â», Ray a atteint l’ñge de 37 ans avant de pouvoir s’offrir une voiture (et il n’a toujours pas rĂ©ussi Ă  passer son permis).
  • Faites une liste de dix choses que vous aimez et de dix choses que vous dĂ©testez. Puis Ă©crivez sur les premiĂšres, et « tuez Â» les secondes – Ă©galement en Ă©crivant Ă  leur sujet. Faites de mĂȘme avec vos peurs. Tapez tout ce qui vous passe par la tĂȘte. Il recommande l' Â»association de mots Â» pour lever tout blocage crĂ©atif, car « vous ne savez pas ce que vous avez en vous avant de le tester Â».
  • N’oubliez pas qu’avec l’écriture, ce que vous recherchez, c’est une seule personne qui vienne vous dire : « Je vous aime pour ce que vous faites. Â» Ou, Ă  dĂ©faut, vous cherchez quelqu’un qui vienne vous dire : « Vous n’ĂȘtes pas aussi fou que tout le monde le dit Â».

Autres ressources

Ray Bradbury : Literature is the Safety Valve of Civilization

The Shape of A Story : Writing Tips from Kurt Vonnegut

John Steinbeck’s Six Tips for the Aspiring Writer and His Nobel Prize Speech

L’auteur de l’article

Colin Marshall produit Notebook on Cities and Culture. Pour le suivre sur Twitter : @colinmarshall.


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Des biùres avec Bukowski – Open Culture (3)

Par : Goofy
15 août 2022 à 03:35

Aujourd’hui notre mini-sĂ©rie de l’étĂ© consacrĂ©e Ă  la culture ouverte vous emmĂšne sur le chemin zigzaguant et gĂ©nial des poĂšmes de Charles Bukowski : voici de sa propre voix une cĂ©lĂ©bration animĂ©e de sa boisson favorite grĂące Ă  un article traduit du site openculture.com



Avertissement : l’alcoolisme, la misanthropie et la misogynie de Bukowski Ă©tant notoires, le poĂšme et la vidĂ©o peuvent heurter votre sensibilitĂ©. Auquel cas il vous appartient de ne pas aller plus loin sur cette page.

Article original : Watch “Beer,” a Mind-Warping Animation of Charles Bukowski’s 1971 Poem Honoring His Favorite Drink

Traduction : Goofy

Une animation hallucinante pour illustrer un poÚme de Charles Bukowski en hommage à sa boisson préférée


par

 

Je ne sais pas combien de bouteilles de biĂšre
j’ai consommĂ©es en attendant que ça se remette au beau.
je ne sais pas non plus combien de vin
et de whisky
et de biĂšre
plutît de la biùre d’ailleurs
j’ai consommĂ© aprĂšs toutes ces ruptures
en guettant la sonnerie du téléphone,
le bruit de leurs pas,
mais c’était toujours trop tard
que le téléphone sonnait
et c’était toujours aussi trop tard
qu’elles revenaient.
Alors que j’étais sur le point
de rendre mon Ăąme
elles arrivaient, fraĂźches comme des primevĂšres :
« Mais, Grands Dieux, t’avais besoin de te
mettre dans ces Ă©tats ?
maintenant il va falloir que j’attende
3 jours avant que tu me baises ! Â»

La femme s’use moins vite
elle vit sept ans et demi de plus
que l’homme, et elle boit trùs peu de biùre
car elle sait le mal que ça fait à sa ligne.

Tandis que nous partons de la tronche
elles sont dehors
dansant et riant
avec des cow-boys en chaleur.

En résumé, il y a la biÚre
des sacs et des sacs de bouteilles vides
et quand tu essaies d’en soulever un
le fond qui est mouillé et
qui est en papier
ne résiste pas et les bouteilles passent à travers
elles roulent sur le sol
et ça résonne partout
et en se renversant le peu de biĂšre qui restait
se mĂ©lange Ă  la cendre de cigarettes ;
quoi qu’il en soit, à 4 heures du matin
un sac qui crĂšve
te procure l’unique sensation de la journĂ©e.

De la biĂšre
des fleuves et des mers de biĂšre
de la biĂšre de la biĂšre de la biĂšre
la radio passe des chansons d’amour
et comme le téléphone reste muet
et que les murs de ta chambre
ne bougent pas
qu’y a-t-il d’autre que la biĂšre ?

(Traduction © Gérard Guégan)

Charles Bukowski savait vraiment Ă©crire. Et Charles Bukowski savait vraiment boire. Ces deux faits, sĂ»rement les plus connus sur le « diplĂŽmĂ© du caniveau Â», le poĂšte et auteur de romans tels que Postier et Souvenirs d’un pas grand-chose (ainsi que de ce qu’on pourrait appeler la chronique de sa vie quotidienne, Journal d’un vieux dĂ©gueulasse), vont de pair. La boisson a fourni suffisamment de matiĂšre Ă  sa prose et Ă  ses vers – et, dans la vie, suffisamment de carburant pour l’existence qu’il a posĂ©e sur la page avec un art de l’évocation si brutal – que nous pouvons difficilement imaginer l’écriture de Bukowski sans sa boisson, ou sa boisson sans son Ă©criture.

On s’attend donc naturellement Ă  ce qu’il ait Ă©crit une ode Ă  la biĂšre, l’une de ses boissons de prĂ©dilection. « La biĂšre Â», qui figure dans le recueil de poĂ©sie de Bukowski de 1971, L’amour est un chien de l’enfer, rend hommage aux innombrables bouteilles que l’homme a bues « en attendant que les choses s’amĂ©liorent Â», « aprĂšs des ruptures avec les femmes Â», « en attendant que le tĂ©lĂ©phone sonne Â», « en attendant le bruit des pas Â».

La femme, Ă©crit-il, sait qu’il ne faut pas consommer de la biĂšre Ă  l’excĂšs Ă  la maniĂšre des hommes, car « elle sait que c’est mauvais pour la silhouette Â». Mais Bukowski, au mĂ©pris de sa silhouette, trouve dans cette boisson, la plus prolĂ©taire de toutes, une sorte de rĂ©confort.

La biĂšre prend vie dans l’animation ci-dessus rĂ©alisĂ©e par NERDO. Quelques extraits des notes d’accompagnement :

« La composition est un manifeste du mode de vie de l’auteur, c’est pourquoi nous avons dĂ©cidĂ© de pĂ©nĂ©trer dans l’esprit de l’auteur, et ce n’est pas un voyage sans danger [
]

Un solo de cerveau sans filtre, un rĂ©cit de folie ordinaire, montrant Ă  quel point la solitude et la dĂ©cadence peuvent se cacher Ă  l’intĂ©rieur d’un esprit de gĂ©nie.

Ce pĂ©riple sauvage passe par ce que nous reconnaissons aujourd’hui comme de nombreux signifiants visuels de l’expĂ©rience bukowskienne : enseignes au nĂ©on, cigarettes, pĂątĂ©s de maisons en dĂ©composition, polaroĂŻds clinquants – et, bien sĂ»r, la biĂšre, littĂ©ralement « des riviĂšres et des mers de biĂšre Â», que nul autre qu’Homer Simpson, autre amateur animĂ© de la boisson, n’a un jour, tout aussi Ă©loquemment, dĂ©peinte comme « la cause et la solution Ă  tous les problĂšmes de la vie Â»

BiÚre fait partie de notre collection de 1000 livres audio à télécharger gratuitement.

D’autres ressources (en anglais) Ă  parcourir :

Quatre poÚmes de Charles Bukowski animés

D’autres poĂšmes de Bukowski lus par lui-mĂȘme,Tom Waits et Bono

Tom Waits lit deux poĂšmes de Charles Bukowski, « The Laughing Heart Â» et “Nirvana”.

Écoutez 130 minutes des toutes premiĂšres lectures enregistrĂ©es de Charles Bukowski (1968)

Charles Bukowski s’insurge contre les emplois de type « 9 Ă  5 Â» dans une lettre d’une brutale honnĂȘtetĂ© (1986)

« Journal d’un vieux dĂ©gueulasse : Les caricatures perdues de Charles Bukowski dans les annĂ©es 60 et 70.

L’auteur de l’article

BasĂ© Ă  SĂ©oul, Colin Marshall Ă©crit et diffuse des articles sur les villes, la langue et le style. Il travaille actuellement Ă  la rĂ©daction d’un livre sur Los Angeles, A Los Angeles Primer, Ă  la sĂ©rie de vidĂ©os The City in Cinema, au projet de journalisme financĂ© par le crowdfunding Where Is the City of the Future ? et au Korea Blog de la Los Angeles Review of Books. On peut le suivre sur Twitter Ă  @colinmarshall.

 


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Les femmes du Bauhaus, punks avant l’heure ? – Open Culture (2)

Par : Goofy
10 août 2022 à 05:42

Poursuivons aujourd’hui cette mini-sĂ©rie de l’étĂ© consacrĂ©e Ă  la culture ouverte avec une facette souvent ignorĂ©e ou oubliĂ©e du mouvement artistique Bauhaus : l’importance des femmes artistes qui y figuraient. Ce nouvel article traduit du site openculture.com leur rend justice Ă  travers quelques photographies


Article original : The Women of the Bauhaus : See Hip, Avant-Garde Photographs of Female Students &amp ; Instructors at the Famous Art School

Traduction : Goofy

Les femmes du Bauhaus : dĂ©couvrez les photographies avant-gardistes et branchĂ©es des Ă©tudiantes et professeures de la cĂ©lĂšbre Ă©cole d’art

par Josh Jones

Regardez les photos de Bush Tetras, un groupe de No Wave/Post-Punk composĂ© de trois filles et d’un garçon, au dĂ©but des annĂ©es 1980, dans le centre de Manhattan.

 

Et maintenant, regardez la photographie ci-dessus, intitulĂ©e « Marcel Breuer et son harem Â», prise vers 1927 par le photographe du Bauhaus Erich ConsemĂŒller. Si l’on excepte le fait que Breuer ressemble plus Ă  Ron Mael des Sparks sans moustache qu’au batteur Dee Pop, on pourrait confondre cette photo avec celle du groupe punk.

Cela soulĂšve quelques questions : les Ă©tudiantes en art des Bush Tetras ont-elles regardĂ© du cĂŽtĂ© des femmes du Bauhaus pour trouver leur style ? Ou bien les femmes du Bauhaus se sont-elles tournĂ©es vers l’avenir et ont-elles prĂ©sagĂ© le punk ? Le second scĂ©nario semble plus probable puisque les femmes du Bauhaus n’ont pas Ă©tĂ© terriblement connues, jusqu’à une Ă©poque rĂ©cente.

Je me sens personnellement lĂ©sĂ©, aprĂšs avoir Ă©tudiĂ© l’art et l’histoire de l’art Ă  l’universitĂ© il y a de nombreuses annĂ©es, qu’on ne me parle que maintenant de plusieurs artistes majeures de cette Ă©cole allemande d’art radical fondĂ©e par Walter Gropius. Tous ses cĂ©lĂšbres reprĂ©sentants et stars de l’art sont des hommes, mais il semble que le ratio hommes-femmes du Bauhaus ait Ă©tĂ© plus proche de celui de la population gĂ©nĂ©rale (comme l’était, dans de nombreux cas, celui des premiĂšres scĂšnes punk et post-punk).

Mais nous avons tendance Ă  ne pas retenir leurs noms ni Ă  voir les Ɠuvres de ces artistes et, dans certains cas, leurs Ɠuvres ont mĂȘme Ă©tĂ© attribuĂ©es Ă  titre posthume Ă  leurs collĂšgues masculins. Nous ne connaissons pas non plus le style progressiste de chacune, qui compte pourtant dans l’approche globale du Bauhaus visant Ă  rĂ©volutionner les arts, y compris la mode, comme moyen de libĂ©rer l’humanitĂ© des dogmes du passĂ©.

Il est regrettable que la mĂ©moire du Bauhaus, comme celle du punk, ait reproduit les mĂȘmes vieilles rĂšgles que ses artistes ont brisĂ©es. L’égalitĂ© des sexes au sein de l’école Ă©tait radicale, d’oĂč le titre satirique de la photographie, qui « exprime le contraire exact de ce que la photo elle-mĂȘme montre Â», note le site Bauhaus Kooperation :

« la modernitĂ©, l’émancipation, l’égalitĂ©, voire la supĂ©rioritĂ©, des femmes qui y figurent Â». Le « MaĂźtre junior Â» de l’atelier de menuiserie, Breuer regarde les trois artistes Ă  sa gauche « d’un air sceptique, les bras croisĂ©s Â», comme pour dire : « Ce sont vraiment « mes Â» femmes ? ! Â». Les artistes du « harem Â», de gauche Ă  droite, sont Martha Erps, la femme de Breuer, Katt Both, et la femme du photographe, Ruth HollĂłs, qui « semble rĂ©primer le rire en regardant le photographe (son mari) Â».

Erich ConsemĂŒller, qui enseignait l’architecture au Bauhaus, avait Ă©tĂ© chargĂ© par Gropius de documenter l’école et sa vie. Gropius l’a associĂ© Ă  la photographe Lucia Moholy, Ă©pouse de LĂĄszlĂł Moholy-Nagy (voir la photo d’elle ci-dessus, prise par son mari entre 1924 et 1928). Moholy prenait surtout des photos d’extĂ©rieur, comme la photo qu’elle a prise plus haut d’Erps et HollĂłs sur le toit de l’Atelierhaus Ă  Dessau au milieu des annĂ©es 1920.

ConsemĂŒller s’est principalement concentrĂ© sur les intĂ©rieurs dans son travail, avec des exceptions expĂ©rimentales comme la sĂ©rie « Fantaisie mĂ©canique Â» que l’on voit ici, qui utilise les vĂȘtements, les poses et les doubles expositions pour souligner visuellement une sorte d’uniformitĂ© d’objectif, en plaçant et en joignant les artistes masculins et fĂ©minins du Bauhaus dans des arrangements presque typographiques.

En effet, presque tous les artistes du Bauhaus – comme le voulait la pratique de l’école – se sont essayĂ©s Ă  la photographie, et beaucoup ont utilisĂ© ce mĂ©dium pour documenter, de maniĂšre Ă  la fois occasionnelle et dĂ©libĂ©rĂ©e, l’engagement du Bauhaus en faveur de l’égalitĂ© des sexes et de la pleine inclusion des femmes artistes dans ses programmes, une dĂ©claration que le peintre et photographe T. Lux Feininger semble souligner dans la photographie de groupe ci-dessous des tisserands de l’école sur les marches du nouveau bĂątiment du Bauhaus en 1927. (Artistes prĂ©sents sur la photo : LĂ©na Bergner, Gunta Stölzl, Ljuba Monastirsky, Otti Berger, Lis Beyer, Elisabeth Mueller, Rosa Berger, Ruth HollĂłs et Lisbeth Oestreicher).

Les artistes du Bauhaus, hommes et femmes, ressemblaient beaucoup, Ă  certains Ă©gards, aux premiers punks, inventant de nouvelles façons de secouer l’establishment et de sortir des rĂŽles prescrits. Mais au lieu de proposer une alternative anodine au statu quo, ils offraient une recette pour sa transformation totale par l’art. Qui peut dire jusqu’oĂč ce mouvement aurait progressĂ© s’il n’avait pas Ă©tĂ© brisĂ© par les nazis. « Ensemble, Ă©crivait Gropius, appelons de nos vƓux, concevons et crĂ©ons la construction de l’avenir, comprenant tout sous une seule forme, l’architecture, la sculpture et la peinture Â»â€Š et presque tout le reste de l’environnement bĂąti et visuel, aurait-il pu ajouter.

Photo via Barbara Hershey

Pour aller plus loin (articles en anglais)

Les pionniĂšres du mouvement artistique du Bauhaus : DĂ©couvrez Gertrud Arndt, Marianne Brandt, Anni Albers et d’autres innovatrices oubliĂ©es.

La politique et la philosophie du mouvement de design Bauhaus : Une brĂšve introduction

Bauhaus World, un documentaire gratuit qui cĂ©lĂšbre le 100e anniversaire de la lĂ©gendaire Ă©cole allemande d’art, d’architecture et de design.

L’auteur de cet article est Josh Jones, Ă©crivain et musicien de Durham, NC. Pour suivre son compte twitter :  @jdmagness.

 


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Dark Side of the Rainbow, un mashup – Open Culture (1)

Par : Goofy
5 août 2022 à 09:45

Petite sĂ©rie de l’étĂ© : au grĂ© de mes dĂ©couvertes, je partagerai ici quelques-unes des nombreuses ressources disponibles sur le trĂšs riche site https://www.openculture.com/ que je vous invite Ă  dĂ©couvrir et partager Ă  votre tour sans modĂ©ration.

Aujourd’hui, premier Ă©pisode avec un mashup (disons un « collage Â» artistique) audiovisuel entre deux Ɠuvres iconiques archi-cĂ©lĂšbres : un album-culte de Pink Floyd et une comĂ©die musicale tout aussi culte, le magicien d’Oz.

Le mashup ou collage, est un genre musical hybride. Le mashup est Ă  l’origine une chanson crĂ©Ă©e Ă  partir d’une ou deux autres chansons prĂ©-enregistrĂ©es, habituellement en superposant la partie vocale d’une chanson sur la partie instrumentale d’une autre, (Source WikipĂ©dia. Pour en savoir plus
) mais on peut lui donner une acception plus large car plusieurs domaines artistiques, et pas seulement musicaux, peuvent ĂȘtre combinĂ©s dans un mashup.

Ah au fait : pour vous Ă©viter un lien vers YouTube, j’ai utilisĂ© une instance d’invidious qui agit comme un proxy (en gros, un intermĂ©diaire qui soustrait la pollution visuelle et prĂ©datrice de YouTube). Si celle que j’ai choisie ne fonctionne pas, essayez une autre instance fonctionnelle en piochant dans cette liste mise Ă  jour rĂ©guliĂšrement.

 

article original : Dark Side of the Rainbow : Pink Floyd Meets The Wizard of Oz in One of the Earliest Mash-Ups

Traduction : Goofy

 

Dark Side of the Rainbow : Pink Floyd rencontre le Magicien d’Oz dans l’un des plus anciens mashups.

par Colin Marshall


Mec, je suis sĂ©rieux
 tu mets le Magicien d’Oz, tu mets Dark Side of the Moon, et tu les dĂ©marres en mĂȘme temps. Ça marche Ă  fond. C’est trooop synchroooone ! Ça te retourne la tĂȘte, mec.

On peut se moquer gentiment de ceux qui considĂšrent que c’est un moyen gĂ©nial d’entrer dans leur trip prĂ©fĂ©rĂ©, si l’on peut dire, et chercher des rĂ©sonances entre une comĂ©die musicale de la MGM de 1939 et le huitiĂšme album de Pink Floyd, mais on ne peut nier que le mashup Dark Side of the Rainbow, comme ils l’appellent (quand ils ne l’appellent pas Dark Side of Oz ou The Wizard of Floyd), est devenu un phĂ©nomĂšne culturel certes modeste, mais sĂ©rieux. En rĂ©alitĂ©, comme l’enthousiasme pour lancer Dark Side of the Moon en regardant Le Magicien d’Oz remonte au moins aussi loin que les discussions sur Usenet (lien) au milieu des annĂ©es 90, il se pourrait bien que ce soit le premier mash-up sur Internet. Depuis, la rumeur selon laquelle l’expĂ©rience de visionnage Ă©tait Ă©trange s’est rĂ©pandue bien au-delĂ  des profondeurs de l’underground ; mĂȘme une institution aussi ostensiblement stricte que la chaĂźne cĂąblĂ©e Turner Classic Movies a dĂ©jĂ  diffusĂ© Le Magicien d’Oz avec Dark Side of the Moon comme bande-son.Il est clair que les gens trouvent leur compte dans ce « collage Â» audiovisuel, quel que soit leur Ă©tat d’esprit. Au minimum, ils s’amusent des coĂŻncidences entre les sons et thĂšmes lyriques de l’album et les sĂ©quences du film. Dark-side-of-the-rainbow.com proposait (NdT sur un site aujourd’hui disparu) une liste trĂšs complĂšte de ces intersections, dĂšs le battement de cƓur en fondu enchaĂźnĂ© qui ouvre l’album jusqu’à l’apparition du titre du film :

Dans ce concept album nous avons [symboliquement] le dĂ©but de la vie humaine. De nombreux parents commencent Ă  donner un nom Ă  leur enfant dĂšs qu’ils en connaissent l’existence, souvent avant mĂȘme de connaĂźtre le sexe de l’enfant. Ici, nous avons le nom d’un film, qui se trouve ĂȘtre le nom d’un des personnages du film, juste au moment oĂč nous prenons conscience de cette nouvelle vie.

Pour les paroles qui accompagnent l’entrĂ©e de Dorothy Ă  Munchkinland :

« Trouve un travail mieux payĂ© et tout ira bien Â» : Dorothy ne le sait pas encore, mais elle est sur le point de passer du statut de fermiĂšre Ă  celui de tueuse de mĂ©chantes sorciĂšres.

Pour le battement de cƓur qui clĂŽt l’album, alors que l’homme en fer blanc reçoit un cƓur Ă  lui :

Dans le concept album, ce battement de cƓur qui s’éteint reprĂ©sente la mort. Le nouveau cƓur de l’homme de fer blanc, que l’on peut entendre battre, symbolise la renaissance. Une fois de plus, ce contraste entre ce que nous voyons dans le film et ce que nous entendons dans l’album vise Ă  crĂ©er un Ă©quilibre. Et comme c’est ainsi que se termine l’histoire, cet Ă©quilibre montre comment, Ă  la fin, le conte de fĂ©es a effectivement surmontĂ© la tragĂ©die.

Les Pink Floyd eux-mĂȘmes ont dĂ©savouĂ© toute intention de composition dĂ©libĂ©rĂ©ment synchrone (Alan Parsons, qui a rĂ©alisĂ© l’enregistrement, qualifie mĂȘme l’idĂ©e de « foutage de gueule Â»), et mĂȘme les plus fervents amateurs de Dark Side of the Rainbow ont peu de doutes Ă  ce sujet. Certains diront que le groupe, dĂ©jĂ  adepte de la composition de musiques de films, a fait tout cela inconsciemment, mais pour moi, la popularitĂ© durable de ce premier mashup est la preuve de quelque chose de bien plus intĂ©ressant : la tendance ininterrompue de l’humanitĂ© – voire sa compulsion – Ă  trouver des modĂšles lĂ  oĂč il n’y en a peut-ĂȘtre pas.

« Lorsque les coĂŻncidences s’accumulent de la sorte, on ne peut s’empĂȘcher d’ĂȘtre impressionnĂ© par elles, car plus le nombre d’élĂ©ments d’une telle sĂ©rie est Ă©levĂ©, ou plus son caractĂšre est inhabituel, plus cela devient invraisemblable. Â»

Voilà ce que Carl Jung a écrit à propos du concept psychologique de synchronicité.

Dommage qu’il n’ait pas assez vĂ©cu pour voir ça.

Autres ressources sur le mĂȘme sujet

Colin Marshall anime et produit Notebook on Cities and Culture et Ă©crit des essais sur la littĂ©rature, le cinĂ©ma, les villes, l’Asie et l’esthĂ©tique. Sur Twitter, c’est @colinmarshall.


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